Le ronronnement du moteur de sa Yamaha R1 se faisait entendre sur le parking de l’université. Sa montre affichait 7h03, autant dire que personne n’était à l’université à cette heure-ci ou presque, si ce n’est les élèves habitant les maisons des confréries, mais ça, c’est une autre histoire et ils doivent probablement dormir à cette heure. Eteignant son engin, elle descendait de sa moto et retirait son casque. Les légers cernes sous ses yeux témoignaient d’une fatigue certaine, de plusieurs heures de sommeil manquantes au compteur de son organisme. Fatiguée elle l’était, mais lassée également. Sa perte de mémoire sur deux ans avait réduit ses activités aux cours. En dernière année de master, elle se devait de faire son année – en plus de la réussir – mais aussi de revoir les deux années d’étude perdues suite à son accident il y a un an. Elle passait donc son temps penchée sur les notes des deux années précédentes et sur les bouquins de cette nouvelle année. Elle ne sortait plus, se méfiait des personnes et ne parlons même pas des hommes, ils n’existeraient pas que ça serait la même chose. Suite à son accident, elle avait bien tenté de recoller les morceaux avec l’homme qu’on désignait comme son petit-ami, bien qu’elle avait oubliée. Pendant six mois, ils s’étaient battus, mais leur relation était vouée à l’échec, se soldant par une séparation d’un commun accord il y a six mois. Suite à cela, elle avait bien tenté avec un autre homme, le seul depuis sa relation sérieuse et manque de bol, ils apprirent pendant leur relation qu’il était professeur dans la même université qu’elle étudie. Depuis plus rien, elle avait laissé tomber, se contentant de laisser venir les choses, vivant au jour le jour et tant pis si elle finissait vieille fille avec 999 chats. Baillant un court instant, elle rangeait sa combinaison moto ainsi que son casque et son sac sous le siège de sa femme mécanique comme elle aime l’appeler, avant d’accrocher l’antivol à la roue. Se dirigeant vers l’enceinte de l’université, sa tenue pouvait surprendre. Un jogging moulant pantacourt, un débardeur tout aussi près du corps et des baskets relativement plates suivaient parfaitement les lignes de son corps. Nul doute pour ceux qui la connaissent, qu’elle se rendait sur le terrain de course. S’échauffant doucement en route en faisant des petits cercles avec ses articulations, elle ne mit pas de temps à arriver à ce dernier pour commencer à courir. Son footing matinal représentait sa pause à elle, son moment seule avec elle-même – ou parfois accompagnée par son amie Lexie. Elle pouvait souffler, ne penser à rien, vider son esprit avant d’entamer une journée tranquillement après une bonne course suivie d’une douche. C’était un jour comme un autre, le soleil commençait à taper sur Los Angeles depuis que les beaux jours avaient tendance à revenir. Elle s’attendait à une belle journée, une de plus, normale, sans drame particulier. Mais cela c’était sans compter sur sa cheville. Les recommandations des médecins étaient claires : suite à son accident, ils lui avaient déconseillé de forcer sur sa cheville droite. Elle pouvait faire du sport, sans trop pousser non plus et en s’échauffant bien avant. Fatiguée, elle n’avait pas réellement pris le temps d’échauffer sa cheville comme il se doit, et au bout d’une vingtaine de minutes de course, cette dernière lui faisait payer cet affront. Un claquement sourd de son articulation lui infligeait alors une vive douleur, l’obligeant à s’arrêter à cloche pied et s’assoir brusquement sur l’herbe qui bordait le couloir dans lequel elle courait. Etouffant un cri de surprise et de douleur, elle prenait sa cheville entre ses mains par réflexe : « Bordel… putain. » Des mots qu’elle n’avait pas l’habitude de prononcer mais qui, sous la douleur, étaient de circonstance. Couchée dans l’herbe, elle tentait alors de la bouger mais la douleur était réellement trop importante pour qu’elle puisse faire un seul geste. Se mordant doucement la lèvre, elle se contentait de maintenir sa cheville en hauteur en posant sa jambe délicatement sur la seconde qu’elle avait repliée vers elle. Sa montre affichait à présent 7h30. Par chance elle ne commençait qu’à 10h et avait donc quelques heures devant elle pour calmer cette douleur. Le tout étant de savoir comment… |