Sa remarque me laissa matière à réflexion. Sans doute avait-il raison mais je n'aurais su dire si je devais parler d'un choix ou plutôt d'une envie. A l'évidence, nous avons toujours plus ou moins le choix. Mais là, c'était une situation particulière. Je sentais que cet homme avait une emprise sur moi qu'il prenait déjà plaisir à contrôler. Oui, il était un homme adorateur de la domination. Cela se voyait comme le nez au milieu de la figure et il ne m'avait pas fallu longtemps pour le comprendre, quand bien même cette impression avait été atténuée au téléphone. Est-ce que j'aimais ça ? Je n'aurais su le dire pour le moment. Tout ce que je savais, c'est que je me plaisais à répondre, d'une manière ou d'une autre, à ses piques incessantes. Il me suffisait d'un regard à travers ses prunelles pour deviner qu'il avait envie de faire Dieu sait quoi, mais certainement pas des choses sages. Et quoi que j'en dise, ça me stimulait bien plus que je ne l'aurais voulu. Au lieu de répondre à ses mots qui me dérangeaient, je m'étais éloignée pour aller fermer la fenêtre et attraper ma veste. Là, je l'entendis s'approcher de moi. Une sensation de douce fièvre s'empara de moi, réalisant que s'il le voulait, il pourrait sans doute faire ce qu'il voulait de moi. Non pas car je me laisserais faire, mais parce que sa carrure le lui permettait. Était-ce réellement son genre, de coincer une femme dans un coin de pièce, de cette façon ? Une peur minime m'envahit, une peur qui m'excitait aussi. C'était indéfinissable, je ne pouvais que le vivre. Là, je sentis son souffle sur ma peau. Ma main s'agrippa au dossier de la chaise, tandis que mes paupières s'abaissaient légèrement sur le côté. Encore des paroles qui me prouvèrent sa tendance souveraine. Que voulait-il que je nie, au juste ? Qu'il me faisait de l'effet ? Quand sa main frôla la mienne, je dirigeai mon regard vers elles deux, comme si cela allait l'arrêter dans sa course folle du contrôle. Il se remit déjà à parler. Un fin sourire se dressa sur mes lèvres bien sûr, en l'écoutant. Quelle assurance... « Vous ne me connaissez pas. Comment pouvez-vous être si sûr de vous... ? » Demandai-je spontanément, sans quitter sa main du regard. Peut-être que je me trompais, mais je sentais que toutes ses remarques étaient à l'origine des pensées charnelles. Mais pas n'importe lesquelles. Peut-être que j'avais raison de le craindre un peu, finalement. Sans que je ne m'y attende, ses lèvres que j'avais déjà observées très discrètement se posèrent dans mon cou, m'arrachant un frisson aussi glacial que brûlant. C'était un doux contact, plus doux que ce que ses paroles laissaient sous-entendre. Lorsque son autre main vint se glisser sous mon chemisier au niveau de ma hanche, je déglutis silencieusement, me demandant pour la première fois réellement si je devais fuir ou rester. Renier l'excitation que je ressentais tout au fond de moi pour cet inconnu fort désirable ou me laisser aller à la découverte de ce qu'il semblait promettre. Je ne me décidai pas ; c'était une torture intérieure que j'essayais de ne pas laisser paraître. Sa caresse subtile me dérangea autant qu'elle m'attisa, et sa main sur la mienne n'arrangea en rien ce violent contraste qui m'envahissait. Alors que j'avais enfin décidé de fuir pour pouvoir affronter son visage, Edward m'attira un peu plus contre lui, et je pus sentir son corps entier contre le mien. Ses lèvres dévorèrent toujours avec grande sensualité la peau de mon cou ; plus j'attendais, plus j'allais m'en sortir avec difficulté. J'aurais voulu m'échapper, le laisser en plan dans ce bureau qui était mien, mais mon corps était en totale contradiction avec mes pensées, si bien que ma tête bascula très légèrement en arrière. Les paupières closes, la lèvre inférieure pincée, j'appréciais cette emprise qu'il avait sur moi, sans doute parce qu'il me plaisait au fond. Parce que depuis la première fois où je l'avais croisé dans un couloir de cette université, je l'avais trouvé diaboliquement attirant. Était-ce trop tard ? …
Non. J'aurais certainement pu remercier le ciel, ou plutôt un courant d'air pour avoir fait claquer une porte non loin de nous. Cette même porte eut un effet brusque sur moi qui parvins alors à me détacher du professeur. Aussitôt je me retournai et croisai du regard ses yeux clairs, trop clairs étrangement. « Vous faites ça avec toutes les femmes qui vous plaisent, monsieur Stanson ? » Je réussis à sourire faiblement, avant de baisser mon regard furtivement sur ses lèvres. « Laissez-moi vous redemander si vous êtes marié ? » Là, j'arborai un petit air malicieux en retrouvant ses deux prunelles. Je voulais absolument avoir la réponse à cette question, mais je n'étais pas sûre qu'il accepte de me la donner. Comme si un jeu s'était mis en route sans même qu'on ne le veuille.