parfois il suffit juste de demander de l'aide (héloise)

Ces derniers temps avaient été difficiles pour Adam. L’homme avait la sale habitude de répercuter physiquement tout ce qui se passait dans sa tête. D’une nature calme, contrôlée, son sang bouillait constamment à l’intérieur de ses veines. Il n’avait pas combattu, il n’avait pas été à la salle depuis un moment et frapper dans le sac lui avait manqué. Avec hargne et rigueur il frappait encore et encore pour laisser sortir ce trop-plein. Un trop de plein de tout. D’énergie, de colère, de rancœur, de regrets. Là, contre ce sac de boxe, les points à nu, il se sentait enfin bien. Et cela aurait pu durer des heures. Mais un petit gémissement dans son dos l’intima d’arrêter. Instinctivement il se tourna et remarqua une jeune femme qu’il avait l’habitude de voir en ces lieux au sol, au milieu du ring. Elle semblait avoir pris un mauvais coup, ou peut-être s’était-elle mal placée, quoi qu’il en soit elle gisait là et Adam s’approcha pour passer la tête entre deux filets. « Tu vas pouvoir te relever ? ». Il n’osait pas accourir et jouer au chevalier servant. Ce n’était pas son genre et de ce qu’il avait pu observer à force de la croiser dans la salle, la jeune femme ne semblait avoir besoin de personne, elle se débrouillait très bien toute seule. Dès son premier jour, l’homme avait été bluffé par sa persévérance et sa détermination, par la force et le mentale qu’elle démontrait à chaque entraînement. Mais cette fois ci, elle semblait bel et bien en difficulté et dans l’incapacité de pouvoir faire face seule. Ce qui arrivait, même au plus fort, au plus dur. Proche mais à distance, Adam n’attendait que son autorisation pour venir l’aider.

Un entraînement de boxe, ça va lui faire le plus grand bien, elle en est persuadée. Elle ne pensait pas s’y intéresser autant à vrai dire, mais elle doit bien se l’avouer, maintenant, elle est totalement accroe et au moins, on la prend au sérieux quand elle entre sur le ring et les gens arrêtent de la voir comme une petite poupée blonde semblant fragile comme tout. Elle ne l’est plus, elle ne veut plus l’être. Elle a enfilé un short et un haut noir, avant d’attacher ses cheveux en une longue tresse pour ne pas être embêtée avec ça. Elle part directement s’échauffer avec ses écouteurs dans les oreilles tout en écoutant de la musique. La corde à sauter, les abdos, le sac de frappe. Elle ne lésine sur aucune chose à faire pour que la séance se déroule au mieux. Elle transpire, elle a mal partout et en même temps, elle est fière d’elle. « Heloise, ça te dit un combat ? » Elle regarde Hayleen et hoche doucement sa tête. Pourquoi pas après tout ? Elle enfile le casque de protection, le protège-dent, ses gants et grimpe directement. Les salutations sont faites, la boxe peut prendre place. Elle est vive, précise, incisive. Elle a envie de montrer ce qu’elle vaut, mais au bout d’une dizaine de minute, la brune lu envoie son pied directement dans son mauvais genou. Malgré sa genouillère, elle flanche et fait un faux mouvement qui la met directement à terre dans un gémissement plaintif. Elle retire ses gants, son casque et la protection pour pouvoir masser son membre maudit. Elle ne pensait pas que ça arriverait un jour en toute honnêteté. Elle geint, elle ni peut rien, ça fait vraiment mal. Elle s’évertue à retenir ses larmes autant qu’elle le peut. « Tu vas pouvoir te relever ? »Elle redresse son doux visage vers l’homme. Adam Lewis. Elle ne le connait pas, mais elle sait son nom parce qu’ici, il est connu et qu’elle a entendu un bon nombre de fille baver sur lui et sa sexyness. Elle rougit spontanément avant d’hocher la tête et d’attraper la corde pour se hisser, mais à peine un appui sur sa jambe et elle flanche à nouveau pour se retrouver au sol dans un petit cri à la foi humiliant et douloureux. Elle déteste être vulnérable. Elle le regarde finalement, suppliante en comprenant qu’il est prêt à l’aider. « J’y arrive pas… » Elle retire sa main, laissant alors apparaître sa longue cicatrice, prouvant que son pauvre genou a déjà bien souffert. « ça fait vraiment mal… » Elle le sait fragile, alors elle panique… Et si c’est encore grave ? Elle rampe doucement pour passer sous la corde et se laisser glisser hors du ring tout en s’accrochant à tout et n’importe quoi sans poser son pied au sol de peur de tomber encore.

Le visage fin de l’asiatique se redressait vers celui d’Adam. La détresse se lisait aisément dans ses prunelles quand elle tenta de se hisser à l’aide de la corde et qu’un cri de douleur s’échappa de ses lèvres avant qu’elle ne retombe au sol. Adam imaginait aisément ce qu’elle devait ressentir, au-delà de la douleur elle-même. De la frustration, de l’impuissance, de la colère. Et quand il s’approcha d’elle, c’est sans un mot qu’il plaça ses bras de chaque côté de son corps pour le soulever dans les airs. « Ça ne sert à rien de marcher, ça serait idiot d’aggraver ton cas. ». Il aurait simplement pu servir d’appui, passer un bras dans son dos et l’aider à se traîner jusqu’au premier banc. Mais Adam avait remarqué cette cicatrice sur son genou, témoin d’un accident ou d’une lourde opération qu’il ne fallait pas prendre à la légère. Avec délicatesse, il la déposait sur le banc et s’accroupissait devant elle pour examiner son genou. Ses doigts parcouraient sa peau découverte  et pressaient certains endroits pour étudier les réactions de la jeune femme à la douleur potentielle. « Il vaudrait peut-être mieux que je t’emmène à l’hôpital. ». Son regard ferme se posait dans celui de la jeune femme dont il ne connaissait pas encore le prénom. Pas question d’apposer un bandage ou une compresse froide. Adam n’avait pas peur de se blesser, mais il ne prenait jamais à la légère une blessure.

Sans l’avoir vu venir, elle se retrouve portée comme une plume dans les bras de l’homme. Machinalement, elle s’accroche à son cou en rougissant avant de l’observer sans savoir quoi dire. « Ça ne sert à rien de marcher, ça serait idiot d’aggraver ton cas. » Lentement, elle hoche la tête, après tout, il a raison et quand ça concerne son genou, elle est tellement terrorisée qu’elle ferait n’importe quoi pour que tout aille bien. Elle se souvient de la galère, des béquilles, des mois de rééducation, de l’annonce pour la danse. Non, elle ne veut pas revivre ça. Jamais. Elle se retrouve rapidement assise sur un banc et son premier réflexe est de vouloir examiner son genou, mais il le fait avant elle. Sans rien dire, elle l’observe et grimace dès qu’il la touche, elle lâche un gémissement plus fort quand il presse un endroit, juste à côté de sa cicatrice, lui arrachant un spasme de douleur. « Il vaudrait peut-être mieux que je t’emmène à l’hôpital. » Elle se mord la lèvre totalement angoissée à cette idée. Lentement, elle ferme ses yeux humides de larmes afin de les contenir et quand elle les ouvre à nouveau, elle est bien déterminée à ne pas se laisser submerger. Faiblement, elle hoche à nouveau sa tête en le regardant. « D’accord… » Elle lui montre alors ses affaires pas loin. « On peut les prendre avec ? Je n’ai pas envie de tout laisser là, ça peut être long aux urgences… S’il vous plait. » Il est beau. Elle se demande quel âge il peut bien avoir mais en tout cas, les trait de son visage sont harmonieux et son corps…. Elle l’observe en rougissant avant d’attraper le sac que sa partenaire de ring vient lui ramener avant qu’il n’ait eu le temps de s’en charger et de le tenir contre elle. « Merci Leen. » Elle lui offre un petit sourire de circonstance avant de le regarder lui. « Merci… de m’aider…. » Elle rougit doucement tout en le fixant avant de baisser les yeux et de s’agripper à nouveau à lui.

Tout en attendant son autorisation, Adam se relevait. La jeune femme avait vraiment l’air de souffrir et l’hôpital restait la plus sage des solutions. Il la regardait contenir ses larmes, les ravaler, une action qui le fit sourire et l’impressionna quelque peu. Puis il l’écouta, surpris qu’elle mette autant de politesse dans ses mots. Avec son fonction de professeur, il avait l’habitude des courbettes et des politesses mais cela l’exaspérait toujours autant. « Tu peux me tutoyer, d’ailleurs je m’appelle Adam. ». Un léger sourire aux lèvres, il attrapa le sac des mains de la jeune femme blessée, un sac qu’il jeta sur son épaule avant de la reprendre dans ses bras. « On peut prendre ta voiture ? ». Parce qu’il se voyait mal faire le trajet en moto. La jeune femme pointait du doigt une petite voiture bleue. Adam serait un peu à l’étroit mais il ne ferait pas la fine bouche. Cela devait faire des années qu’il n’avait pas conduit une voiture, mais c’était comme le vélo, ça ne se perdait pas. Il déposa l’asiatique sur le siège passager puis jeta le sac à l’arrière de la voiture. Il se plaça côté conducteur et mis le contact. Un sourire béat s’accrocha à ses lèvres malgré la situation. Il desserra le frein à main et passa sa première vitesse. Une manuelle, les américains ont pourtant tendance à conduire des automatiques. Profitant de chaque sensation de la route, il ne fut pas très bavard. Et enfin, ils arrivèrent à l’hôpital. De nouveau, il prit la jeune femme entre ses bras. « Ne t’y habitues pas trop, ça ne sera pas tous les jours comme ça princesse. ». Accompagnant ses mots d’un petit clin d’œil, il ouvrit la porte des urgences et la laissa sur les sièges pour aller expliquer la situation à l’infirmière à l’accueil et récupérer la traditionnelle paperasse à remplir. « Tiens. Tu as du boulot, ça te fera un peu oublier la douleur jusqu’à ce qu’il s’occupe de toi. Ça va ? ». Il essayait de la distraire, même si ce n’était pas vraiment le fort d’Adam.

« Tu peux me tutoyer, d’ailleurs je m’appelle Adam. » Elle sourit doucement. « Moi c’est V…. Heloise… » Elle le regarde en rougissant quelque peu et quand il prend son sac et le jette sur son épaule d’un air nonchalant, elle fait les yeux ronds avant de se trouver à nouveau dans ses bras et de s’accrocher à lui. « On peut prendre ta voiture ? » « Oh euh… oui. C’est la petite micra bleue garée devant. » Espérons qu’il ne soit pas trop à l’étroit dedans le pauvre d’ailleurs, parce que si elle est parfaite pour elle, pour un grand costaud comme lui, c’est sans doute une autre paire de manche. Elle se retrouve en un rien de temps sur le siège passager et regarde son sac voler à l’arrière. Tout son petit bordel mal organisé à l’intérieur doit être encore plus sens dessus dessous. Elle grimace un peu à vrai dire avant de se contenter de regarder la route. Avec des muscles pareils, la délicatesse ne doit pas faire partie de sa vie. Il n’est pas vraiment bavard et elle ne cherche pas à l’être non plus. Il semble aimer la route et la conduite agréable de la voiture, alors elle le laisse faire en tentant de son côté d’être solide face à la douleur. Une fois garés, il vient de nouveau la rechercher et la porter, alors encore, elle s’accroche à son cou, son visage prêt du sien. « Ne t’y habitues pas trop, ça ne sera pas tous les jours comme ça princesse. » Elle rougit avant de sourire. « Je ne compte pas me blesser encore même si le sauvetage est agréable… » Bah quoi ? Faudrait être cruche ou lesbienne pour dire le contraire. Il la dépose sur un siège et part expliquer la situation à l’accueil avant de revenir avec un dossier à remplir. Argh, elle déteste ça. « Tiens. Tu as du boulot, ça te fera un peu oublier la douleur jusqu’à ce qu’il s’occupe de toi. Ça va ? » Sagement, elle l’attrape avant d’en profiter et de mettre sa jambe douloureuse sur celle de son preux chevalier. La laisser « pendre » est une horreur alors qu’allongé, c’est beaucoup moins douloureux pour elle. « Ça va, c’est supportable. » Elle lui sourit avant de se mettre à remplir le dossier minutieusement en y inscrivant son nom entier, toutes les coordonnées nécessaires et puis arrive la case : antécédents. Alala, ça va être long à remplir ça. Elle se met alors à expliquer ce que son genou a déjà subi avant. Elle se gratte la tête doucement et glisse le nom et numéro de Blake dans la personne à prévenir en cas d’urgence ainsi que celui de Madison. « Merci au fait. » Elle s’arrête pour le regarder. « Tu n’étais pas obligé, c’est vraiment gentil. » Elle observe un instant sa cicatrice avant de se plonger à nouveau dans le dossier. Son cas n’est pas grave et la salle d’attente est pleine, ça va être long…

Héloise. Adam mettait enfin un prénom sur un visage, un prénom qu’il retiendrait sûrement pour s’être si souvent poser la question sans prendre le temps de le faire réellement. Adam marchait au feeling, il n’avait jamais pris pour habitude de forcer le destin, sauf lorsqu’une poussée d’adrénaline l’incitait à sauter d’une falaise … Mais lorsqu’il s’agissait de relation humaine, c’était totalement différent. Il ne calculait pas, tentait sa chance quand il le désirait, ne préméditait pas … Et c’était peut-être un coup de pouce du destin, plutôt malheureux pour la jeune femme mais qui leur permettait de franchir des barrières inconscientes, qu’ils terminaient d’achever avec un peu d’humour. Un léger rire filtrait à travers les lèvres d’Adam. « Content que cela te convienne, je ne suis pas aussi serviable d’habitude. ». Non, il n’était pas du genre à jouer les héros, à sauver la veuve et l’orphelin. Adam pouvait parfois faire preuve d’une grande insensibilité. Aujourd’hui Il était simplement dans une bonne journée. Il accueilli la jambe de la jeune femme sur la sienne et examina quelques instants sa cicatrice avant qu’elle ne reprenne la parole. « T’en fais pas, c’est rien. ». Non vraiment rien. « Tu t’es fait ça comment ? ». Il pointait sa jambe du bout du doigt.

« Content que cela te convienne, je ne suis pas aussi serviable d’habitude. » « J’ai beaucoup de chance alors. » Elle sourit doucement en le regardant avant de rougir légèrement et de reporter son attention sur les papiers à remplir, il y en avait tellement. Comme c’est chiant. Une petite moue boudeuse s’installe sur son visage alors qu’elle griffonne autant de renseignements que ses souvenirs lui permettent. Le plus long reste la case antécédents afin de bien expliquer ce que son genou a déjà subi. Elle en profite pour remercier son chevalier, après tout, il n’était pas obligé de l’aider, de la porter, de venir ici avec elle, de rester. « T’en fais pas, c’est rien. » Elle sourit encore un peu avant de reprendre son dur labeur. « Tu t’es fait ça comment ? » C’était prévisible non ? Elle pousse un léger soupir en se souvenant de cette fameuse journée. « On était en vacances et j’avais vraiment envie de faire du jet ski avec mon père. » Elle frissonne à chaque pensée. « Il a bien voulu et tout se passait bien en fait, mais deux autres personnes ont perdu le contrôle du leur et on nous a heurté. J’ai eu une commotion cérébrale alors je me souviens de rien, mais je sais que mon genou a été écrasé durant le choc. J’ai quand même eu plus de chance que mon père… » Elle baisse la tête avant de se remettre à son écriture. Elle s’arrête avant de le regarder et de sourire encore, doucement, tendrement. « J’ai commencé la boxe à cause de l’accident là en fait. » Elle rougit. « Enfin pas totalement, mais je ne serais jamais mise à la boxe si je n’avais pas été obligé d’arrêter la danse… » C’est intense comme sport, mais elle en fait moins souvent et dès qu’elle a mal, elle s’arrête, elle sait qu’avec la danse, elle aurait poussé le bouchon un peu trop loin et de toute façon, les mouvements classiques lui arrachent trop de douleur. « On ne se serait pas connus. » Rien n’arrive pas hasard à ce qui se dit.

La cicatrice sur son genou ne pouvait être que le reflet d’un souvenir douloureux. Ce genre d’opérations n’avait rien d’anodin, ni la cicatrice qu’elles laissaient derrière elles. Et Adam qui n’était pourtant pas d’une nature curieuse n’avait pu s’empêcher de poser la question. Seulement, il ne s’attendait pas à un quart de la réponse que la jeune femme lui formulait. Un accident de jet ski, la perte de contrôle, le genou et les souvenirs en morceaux, son père qui n’avait pas eu autant de chance. Il fronça les sourcils sans même s’en rendre compte tout en la dévisageant quelques secondes. Il n’osait pas demander ce qui était arrivé à son père. Le sujet semblait beaucoup trop épineux quand bien même elle tenait à faire bonne figure. Alors Adam préférait s’orienter sur quelque chose de plus léger. « Il te manque quelque chose. ». Laissant quelques secondes de suspens, il continua : « Un bon prof de boxe. ». Il lui adressa un sourire. « J’entraîne de temps en temps si ça t’intéresse. ». Adam avait eu quelques élèves, des garçons, des filles, il ne faisait pas de discrimination à l’entraînement, il trouvait même que les femmes avaient plus de dynamisme, plus de hargne et il aimait ça. « Tu peux peut-être encore danser, juste pour le plaisir ? ». Après tout, si elle pouvait boxer, elle pouvait peut-être encore faire quelques pas de danse ? Plus au niveau où elle avait l’habitude d’exercer, plus pour les mêmes buts, plus pour les mêmes rêves mais juste pour le plaisir. « Tu as raison, on ne se serait jamais croisé … ». Ils venaient de mondes différents, peut-être qu’ils ne se seraient jamais rencontré. Et Adam ne savait pas vraiment ce que cette rencontre allait leur réserver mais il était loin de se poser réellement la question.

« Il te manque quelque chose. » Elle redresse sa tête de surprise avant de la pencher sur le côté tout en le regardant de ses grands yeux de biche semblant innocents et loin de tous principes immoraux. « Un bon prof de boxe. » Elle ne sait pas pourquoi, mais elle sourit. Elle sourit franchement, elle ne s’attendait tellement pas à une réponse pareille qu’elle ne peut s’empêcher de sourire à vrai dire. « J’entraîne de temps en temps si ça t’intéresse. » « Oh oui !! » Elle rougit instantanément face à sa réaction un peu… disproportionnée, enfin, elle n’a pas fait exprès, mais voilà quoi. Elle se racle doucement la gorge avant de le regarder, puis d’esquiver le sien en souriant de gêne et de contentement. « J’en serais ravie… » Elle se replonge doucement sur sa fiche. « Tu peux peut-être encore danser, juste pour le plaisir ? ». Elle redresse à nouveau sa tête pour le regarder encore avec cette fois, une tristesse infinie en elle. « C’est trop frustrant… » Elle fait une petite moue mignonne et chagrinée avant de soupirer. « J’ai essayé, mais j’avais un haut… très haut niveau, je devais entrer dans un des plus prestigieux corps de ballet d’Angleterre et tout a été ruiné… J’ai essayé, mais il y a tellement de mouvements qui me font souffrir, dont les pointes et c’est genre… la base de tout. » Elle soupire à nouveau en secouant doucement sa tête. Elle essaye néanmoins de repartir sur une note assez joyeuse pour ne pas être simplement dans le mélodramatique, elle a horreur de ça pour tout dire. « Tu as raison, on ne se serait jamais croisé … » Elle lui sourit tendrement avant d’entendre une infirmière l’appeler, ça la surprend pas mal à vrai dire. Elle regarde le fauteuil roulant qu’on lui présente et se glisse dedans avant de regarder l’homme face à elle. « Merci pour tout Adam… » Elle lui offre un de ses magnifiques sourires, ceux qui sont doux et chaleureux à la fois. Sagement, elle se laisse emmener en se disant qu’il va sûrement rentrer chez lui maintenant, alors elle envoie un message à Blake pour lui expliquer et lui dire qu’elle le préviendra quand c’est fini pour qu’il puisse venir la chercher.

Sa réaction enjouée quant à sa proposition de l’entraîner faisait sourire le professeur. La boxe était bien plus qu’un loisir, qu’une manière de gagner de l’argent. Pour Adam c’était un exutoire, mais aussi un sport qui bien pratiquer pouvait même être beau d’une certaine façon. Le professeur aimait partager sa vision de la boxe, la discipline, la rigueur qu’elle entraînait, le dépassement de soi dans ce que l’on est capable de donner mais aussi de supporter. D’un signe de tête, il promettait à la jeune femme de revenir vers elle pour des cours qui se voudraient particuliers. Adam n’avait pas l’autorisation d’exercer en tant que réel professeur de boxe, il n’avait pas la licence mais il pouvait faire profiter une ou deux personnes à la fois de son savoir-faire. Silencieux, il l’écouta ensuite lui expliquer pourquoi elle ne pouvait plus danser, même pour le plaisir. Adam se rendait compte qu’ils n’étaient pas sur la même longueur d’onde. Pour le plaisir signifiait une certaine intensité pour la jeune femme qu’elle ne pouvait plus atteindre, alors que lui parlait simplement de mouvements, de gestes flous le concernant sur une mélodie, un rythme. La danse c’était ça pour lui, rien de plus, rien de moins. Durant ses voyages à travers le monde, il avait vu toutes les formes imaginables de danse, le classique n’était pas la seule façon de danser. Mais le professeur se retint de le lui signifier. Heloise était encore loin d’avoir fait le deuil de son rêve et il n’avait aucun conseil à lui donner, seul le temps pouvait ou non guérir ses blessures. De toute façon, le nom de la jeune femme résonnait déjà dans la salle d’attente. On lui apporta un fauteuil roulant dans lequel Adam l’aida à se hisser puis elle le remercia avant de disparaître dans les couloirs de l’hôpital californien. C’était peut-être là que s’arrêtait sa mission, mais le professeur décida de rester, ne serait-ce que quelques minutes pour s’assurer que tout se passait bien. Il attrapa un magasine qu’il feuilleta distraitement sans véritablement en lire les lignes quand quelques minutes plus tard un homme qui se présenta comme le copain d’Heloise interrogea les infirmières sur son état. Finalement, il était peut-être temps pour lui de rentrer. Jetant le magasine sur la petite table basse, il se leva et pris le chemin de la sortie, les mains dans les poches décidé à marcher jusqu’à son appartement.