RUSSIAN ROULETTE
MONROE VALENTINE
Il s’en était passé des choses du côté de la police en une année, peut-être parce que je leur avais énormément simplifié la tâche en leur donnant une partie de mes tactiques pour repérer les concurrents. C’est un peu grâce à moi qu’ils étaient parvenus à boucler le trafic de quatre ou cinq dealeurs qui étaient des concurrents lorsque j’exerçais encore. En gage de ma bonne volonté je m’étais gentiment proposé pour former quelques nouveaux agents sur le terrain, dans la plus grande discrétion bien entendu, je leur avais donné quelques petits tuyaux, ce qu’ils oubliaient toujours de regarder, là où ils n’allaient pas fouiller alors que la solution à leurs recherches se trouvait là. Après leur avoir énormément donné je me rendais compte que j’allais devoir me méfier davantage si je ne voulais pas être repris la main dans le sac, je n’avais plus un temps d’avance mais la moitié d’un temps, je devais trouver un moyen rapide de me perfectionner, de trouver de nouvelles méthodes pour esquiver les perquisitions. C’est d’ailleurs pour m’éviter du boulot supplémentaire que je ne prenais jamais de stock, je vendais ce qu’il y avait besoin d’écouler et je recommandais au dernier moment, on ne pouvait donc pas me surprendre avec de la drogue ou des antidouleurs, il n’y avait alors plus qu’à faire des suppositions, la seule chose qu’étaient capables de faire les flics du coin. Je ne comptais pas leur simplifier la tâche, il en était hors de question, ils n’allaient pas me faire du cadeau parce que je les avais aidé pendant un an, au contraire, ils allaient prendre un plaisir sadique à me remettre derrière les barreaux à la première erreur. S’ils savaient ce que je prépare, mon business reprend seulement des couleurs, les affaires se portent très bien et la demande ne cesse de croitre m’assurant une bonne part du gâteau dans le secteur.
Malgré tout, je ne suis pas à l’abri d’être surpris, c’est le cas aujourd’hui. Lorsque j’apprends qu’une perquisition est programmée dans un lieu de transfert où je stock provisoirement mes marchandises sur une dizaine d’heures je n’ai guère le choix que d’improviser. C’est rapidement que je m’étais rendu sur les lieux pour prendre les quelques doses que j’avais dans le coin, sept, peut-être huit grammes, pas de quoi mettre le feu aux flaques mais tout de même suffisamment pour friser l’overdose au moins deux fois. Une partie de mon stock concernait Monroe, ça tombe bien, il était mon plan de secours lorsque je me retrouvais dans une position délicate, qui irait soupçonner un pompier après tout ? Je faisais d’une pierre deux coups. Sans le prévenir je m’étais donc déplacé en voiture jusqu’à son domicile. Je connaissais l’endroit comme ma poche, logique puisque j’y venais une fois par semaine au minimum, cette fréquence étant de plus en plus intensifiée avec l’évolution un peu particulière de notre relation. Je pressais fort la sonnette, patientant tranquillement alors que déjà j’entendais les clés tourner dans la serrure, signe qu’il déverrouillait la porte.
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