Elle semble assez surprise de me voir devant elle, ici et maintenant, pour tout avouer. Je ne peux pas la blâmer. Il faut dire que Gwen et moi sommes deux personnes très ... Différentes. Je comprends donc l'étonnement de ma nouvelle interlocutrice lorsqu'elle entend une voix aigüe là où elle s'attendait probablement à entendre celle de Gwen, rendue plus grave par sa consommation excessive de tabac. Parce que tous les étudiants en médecine ne font pas nécessairement attention à leur santé. Je ne sais pas comment elle compte faire, d'ailleurs, maintenant qu'elle est enceinte - certainement, elle ferait au moins attention à la santé de son enfant, à défaut de faire attention à la sienne, à elle ?
En tous les cas, Klara - elle s'appelait bien Klara, non ? - ne semble pas trop dérangée par ce changement de programme impromptu. Tant mieux. Cela me facilitera la tâche. Voilà qu'elle se met à fouiller dans son sac. En silence, je l'attends, et cela me permet de l'observer davantage. Je remarque ses cheveux éclatants, ses cheveux riches, si riches en couleur que j'en serai presque jalouse. Si les Gamma Psi étaient capables de jalousie, évidemment. La jeune femme me tend alors des feuilles, accompagnant celles-ci d'une explication qui, malgré ma neutralité et mon impassibilité extérieures, me donne envie intérieurement de froncer les sourcils. Pourquoi donc est-ce que Gwen a accepté d'aider un tel projet ? Me plongeant dans une analyse objective des documents, j'essaie de ne pas me laisser aveugler par mon jugement, refoulant donc le déluge de questions qui se précipitent, malgré moi, profondément dans mes pensées. Pourquoi chercher à créer des logiciels pour nous remplacer, nous, les médecins ? Comment réellement élaborer un programme capable de faire ce qu'on n'acquiert avec mérite qu'après des longues et rudes années d'études, de pratique et d'expertise dans le milieu médical ? Comment insuffler à un logiciel les conclusions logiques et uniques qu'un médecin ne saurait tirer que par le biais de ses expériences et selon le cas particulier de son patient ? Klara me pose alors une question, bien qu'il me faut quelques secondes pour que celle-ci me tire de mes pensées et me ramène à la réalité.
- Hein ? Désolée, je m'étais parmi ces documents ... C'est ... Très dense. Sans oublier, évidemment, le poids de mes pensées, qui s'ajoute au poids des informations qu'elle vient de me mettre sous les yeux. J'expire alors avant de remettre en place quelques mèches étant venues se rebeller contre mon visage. Gwen ? Pause. Son ex était dans ma classe. Puis, il avait décidé de faire de la psychiatrie, plutôt, l'oncologie n'ayant pas été son appel comme il avait été le mien.
Rapprochant alors les feuilles de mon visage, je me plonge à nouveau dans mon analyse des documents. Un silence s'installe à nouveau entre nous, mais je suis bien trop absorbée par mon analyse pour ne serait-ce que le remarquer. Éventuellement, je fronce les sourcils, et pas qu'en songe, cette fois-ci, mais bel et bien physiquement, avant de déclarer :
- Non, ça, ça ne va pas ... Il y a une erreur, ici.
Rapprochant alors les papiers du visage de Klara, en oubliant ma fierté de médecin au passage, je lui montre une ligne en fin de page à l'aide de mon index.
- Le logiciel prend en compte tous ces facteurs ci pour déterminer si la tumeur du patient est cancéreuse ou non ... Mais là, lorsqu'il prend en compte les antécédents familiaux, il ignore la possibilité même d'une famille éloignée, telle qu'un oncle ou qu'une tante, qui pourrait potentiellement avoir eu des tumeurs cancéreuses par le passé.
La voilà, cette fierté évaporée ; elle était revenue avec cette explication qui m'avait permis de lui prouver - et de me prouver à moi - qu'un logiciel ne pourrait pas nécessairement toujours remplacer un médecin. Comment remplacer l'imprévisible par une machine conçue pour justement prévoir des choses d'une façon logique et objective ? Le cerveau humain, malgré toutes les évolutions de la technologie, ne pourra jamais réellement être concurrencé par l'informatique, à mes yeux, tout simplement parce que celle-ci sera perpétuellement incapable de formuler de réelles pensées cognitives, ce qui, à mes yeux, demeure l'une des plus grandes forces de nos capacités cérébrales.
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