Parce que nous le valons bien • Joshey

Il sourit en coin quand il entend le début de la mélodie qui accourt dans ses oreilles. Quelques notes et il sait déjà ce qui arrive. « Sunday morning, rain is falling… ». Il se mord la lèvre avant de lâcher un peu ce qu’il est en train de faire afin d’aller augmenter le son de la chaîne hifi. C’est tellement bon que ça mérite un peu de déranger les voisins d’à côté et puis merde, il est seulement 16h non ? Il effectue quelques mouvements de danse désordonnés dans le salon tout en riant à moitié. Ça lui arrive parfois de péter des petites piles comme ça et de se mettre à faire l’andouille en solitaire. Rusty le regarde d’un air dépité en se demandant ce qui peut bien lui prendre sans doute. Ça s’enchaine avec Misery et il jubile complètement tout en continuant son petit déhanché de spaghetti épileptique. Lorsque qu’il voit Rusty se cacher les yeux avec sa patte, il grimace avant de s’arrêter quand la playlist se met à jouer du Muse pour son plus grand plaisir. Un sourire tendre naît sur son visage alors qu’il retourne à la cuisine pour continuer à préparer l’entrée. Un trio de verrines en tout genre que Riley devrait apprécier sans doute. Du moins, il espère. Il regarde aussi les cadeaux qui restent pour elle sous le petit sapin que son père lui a donné de force et qu’il a décoré maladroitement. Quand il repense à tout ça, il se dit que mine de rien, ils auront perdu neuf mois avec cette histoire. Neuf longs mois d’amitié avant tout. Lorsque ça sonne, il se tourne et s’essuie les mains sur son tablier bleu à petit ourson avant d’aller lui ouvrir. « Holà ! » Il la laisse entrer et referme la porte derrière elle. « Ça va ? Ça a été ton shooting ? » Il observe ce qu'elle tient pour savoir si elle a pris de la glace ou pas. Le ventre parle à la place du cerveau quand il s'agit de crèmes glacées...

Ma peau est encore glacée de plusieurs heures de shooting en extérieur. Quand enfin, je peux enfiler un pull c'est un souffle de soulagement qui s'échappe de mes lèvres. Rapidement, je me rhabille de la tête au pied et tresse mes longs cheveux dorés sur le côté. Je jette un coup d'œil à ma montre. « Merde ! ». Puis attrape mes affaires, encore débraillée pour m'engouffrer dans le premier taxi. Il me reste une demi-heure pour faire quelques courses et arriver chez Joshua à l'autre bout de la ville. Mon meilleur ami qui a organisé un repas de Noël de rattrapage. Parce que cette année, je ne l'ai pas accompagné au traditionnel repas familial Armstrong pour la simple et bonne raison qu'il y a emmené sa petite amie. Ren, cette fille que je ne connais pas mais avec laquelle j'entretiens déjà des rapports complexes. Je ne l'aime pas. Et je ne serais jamais capable de l'apprécier pour un millions de raison, mais sûrement surtout parce qu'elle est la petite amie de Josh. L'officielle, celle qui assiste au repas de Noël. Et moi cette année, je suis restée seule. Seule avec la solitude, le manque, la peine dont il n'est pas à l'origine parce qu'elle est bien plus profonde que cela, bien plus familiale … Ce repas est l'occasion pour moi de profiter de rattraper cette soirée et de retrouver mon meilleur ami.  « Vous pouvez me déposer là merci ! ». Quelques billets échangés et je reprends ma course folle. Dans une petite épicerie de bon produit j'achète deux bouteilles, une de rouge pour le repas et une de champagne pour le dessert. Dans une pâtisserie aussi réputée qu'excessive, j'achète une bûche glacée au café. Connaissant mon invité, je ne peux y déroger. Enfin, je me presse vers la boutique dans laquelle j'entre dans le seul but d'atteindre l'appartement de Josh, mais non sans jeter un œil à l'agencement et aux travails des deux cousins. Incroyable. Une fois arrivée à l'étage, je frappe quelques coups contre la porte, un sourire déjà affiché sur le visage. Josh ouvre rapidement et la chaleur de son appartement vient m'enrober. « Hey ! ». Je dépose un baiser sur sa joue et entre chez lui. Ce geste d'habitude si machinal, ne l'était plus vraiment. Ce que je m'efforce à changer. A mon aise, bien que je sois bien plus habituée à l'ancien appartement, je me dirige vers la cuisine. « Je suis frigorifiée, ils m'ont fait poser en robe légère en extérieur. Heureusement que le résultat était sympa ! ». Tout en expliquant ma journée, je dépose les bouteilles à leur place et la bûche dans le frigo. « Et toi ? Comment tu va ? ». Comment il va, comment se passe sa vie en ce moment ... Tant de questions que je ne formule pas. Une fois fait, je déboutonne ma veste et vais la déposer sur un porte-manteau dans l'entrée avant de revenir vers lui. Je ne peux m'empêcher de le détailler de la tête au pied, de scruter chacun de ses traits et de tomber sur ce … tablier. Les lèvres pincées je me retiens de rire et lui lance : « Mr Armstrong, vous venez de perdre toute crédibilité ! ».

Le baiser sur sa joue le fait sourire. Ça fait bien longtemps qu’un geste aussi simple n’est pas arrivé entre eux. Preuve qu’ils ont grandi et un peu mûri non ? Il se plait à le croire en tout cas parce que ça veut dire qu’ils vont pouvoir retrouver leur amitié si c’est le cas. Elle lui manque tellement et de bien des façons. C’était si simple avant qu’ils ne se fassent tout ce mal. Il l’a blâmée pendant des mois, mais il n’a pas fait mieux à vrai dire. Il avait déjà tiré des plans sur la comète sans savoir si ça lui convenait à elle, si ça l’intéressait, ni même sans chercher à comprendre son malaise. Il s’est victimisé comme il sait si bien le faire. Oui, il s’en veut pour ça, on ne peut pas dire le contraire, mais c’est fait maintenant. Il l’écoute parler de sa journée de shooting tout en continuant de préparer l’entrée avec soin et attention. « Les photographes sont des sadiques ! » Il a encore énormément de mal, pour sa part à jouer les mannequins. Il a dû refaire un shooting récemment pour un magazine de musique et pour les affiches du concert et mon dieu, que c’était difficile. Il grimace en y pensant d’ailleurs avant de sourire légèrement. « Je vais très bien même si tu es sadique et que tu n'as PAS acheté de glace ! » C’est vrai, après tout, il a tout qui se concrétise dans sa vie. De la stabilité, la musique, la boutique. Il ne pouvait rêver mieux non ? Il se tourne afin d’attraper de la crème et quand il la voit buguer, il hausse un sourcil avant de se rendre compte qu’elle a tiqué sur le tablier. « Déjà, c’est un cadeau ! » Bon, d’accord, ça n’excuse absolument pas le fait qu’il soit ridicule au possible. « Et ensuite… J’ai que celui-là… » Oui, parce qu’il n’ose pas en racheter un second de peur de froisser Ren et franchement, il n’a pas le temps pour aller en prendre un. Il rêve du jour où une âme censée lui en offrira un plus décent et en même temps, il se dit qu’il va être abonné à ce genre de connerie à vie. « Je suis mignon non ? » Il fait une moue adorable avant de continuer à cuisiner. Il lui lance deux avocats. « Epluches qu’on en fasse du guacamole ! Et te salie pas, j’ai pas d’autres tabliers. » Il lui tire la langue. « Sinon tu prends le sweat là. » Il lui montre d’un signe de tête. « C’pas grave s’il est sale, c’est celui que j’avais pendant les travaux. » Il hausse les épaules avant de s’attaquer aux oignons. « Sinon, quoi de beau ? J’ai su que tu te présentes pour les présidentielles à l’UCLA, c’est une bonne idée. »

De vrais sadiques oui. Mes mains passent encore sur mes bras frileux pour tenter d'apaiser le feu de glace qui rage encore sur ma peau. Puis mon regard rieur se porte dans le sien quand maintenant, c'est moi qu'il traite de sadique. « Quoi ?? ». J'affiche une mine faussement choquée et le dévisage. Il n'a pas vu la buche glacée bien emballée qui attend dans le frigo qu'on en arrive au dessert ! Je peux supporter quelques reproches jusque là ... « Tu ne m'en voudras pas bien longtemps ... ». C'est fini ça. La rancoeur, la colère, la déception ... Dis-moi que tu ne m'en voudras plus ... Plus jamais. Et parce que ce terrain est trop glissant, je pointe quelque chose de beaucoup plus léger. Du moins en apparences ... Ce tablier ridicule qu'il arbore et qui me donne l'impression d'être face à un gamin fana de kawai. Un cadeau comme il le précise. Un cadeau de Ren comme il le tait, comme je l'ai vu sur sa page twitter. « Fait gaffe, bientôt tu te retrouveras avec des chaussons lapins et des oreillers petits chats. ». Une main remonte sur mes lèvres pour étouffer les rires, pour étoufer les piques que je cache derrière de l'humour, pour étoufer cette petite rage qui me grignotte doucement le coeur ... Tu vois, je sais Joshua. Tu vois, je ne la supporte pas, je ne supporte pas qu'elle soit si ... si différente de moi. « Mh quelques années en arrière je t'aurais dit que oui, tu es mignon mais là ... Je ne sais pas trop ! ». Je lui tire la langue malicieusement et attrapes les avocats à la volée, de justesse. Je les pause sur le plan de travail en ajoutant un : « Bien chef ! », puis me dirige vers le sweat déposé sur une chaise pour le passer. L'odeur de Joshua me colle immédiatement à la peau, sa chaleur, ses petites gouttes de sueurs qui se sont imprégnés dans les tissus, son parfum. Je soupire de bien être et vient me mettre à l'oeuvre près de lui. « Oui je me suis présentée, un petit peu comme ça, sur un coup de tête, un petit peu parce que tu m'en as donné envie ... ». Je lui souris et reprends d'un ton plus enjoué. « Devine qui a été élue la plus jolie fille de l'université ?? ». Mon regard et mon sourire ne laisse aucun doute sur l'identité de la gagnante, mais je reprends mon sérieux pour lui demander : « Et toi alors ? Tu ne te tues pas à la tâche j'espère ? ».

Il hoche doucement sa tête quand elle affirme qu’il ne lui en voudra pas bien longtemps. Non, c’est vrai, tout simplement parce qu’il n’a pas envie d’être encore en colère après elle et certainement pas pour une connerie pareille. Ils se sont assez bouffés, rongés. Il est temps de redevenir ami. « C’est sûr… » Il lui sourit tendrement, pour la rassurer, pour rendre le sujet léger, pour mieux passer ça. Il ne pensait pas que ça déclencherait une sorte de petite panique en elle, et pourtant, c’est ce qu’il lit dans son regard. Elle le dissimule en passant à autre chose, il entre dans le jeu rapidement sans mentionner Ren pour autant. Il sait bien que Riley ne la supporte pas vraiment et il n’a pas envie que sa relation vienne pourrir la soirée, non pas qu’il en ait honte. Non pas du tout, il n’a juste pas envie de raviver des rancoeurs stupides pour rien. En tout cas, lorsqu’il voit son ex prendre plaisir à se marrer de son pauvre tablier, il n’a qu’une envie, c’est lui enfiler pour se moquer à son tour, sauf que sur une femme, ça ne fait pas autant cucul que sur un homme et quand il s’en rend compte, il fait une moue dépité en oubliant son plan foireux. A la place, il lui envoie les avocats afin qu’elle bosse un peu. Après tout, elle a demandé à ce qu’il cuisine ensemble non ? Alors au travail. Il la regarde enfiler le sweat. Des souvenirs reviennent. Des nuits ensemble, des matins, des moments. Ça lui réchauffe doucement le cœur alors qu’il continue de s’affairer à ses préparatifs. Il a un petit sourire au coin de la bouche qui refuse de le quitter. Il hausse un sourcil avant de la regarder. « Je t’ai donné envie de te présenter ? » Il ne pensait pas à ça comme motivation, autant l’avouer. « J’ai réellement adoré ça. C’est dur de se dire que ça va se terminer réellement bientôt… » Il a une pointe de tristesse dans la voix. C’était dur de quitter l’université à cause de la fraternité, c’est comme un second au-revoir de savoir qu’un autre chef va arriver. Mais c’est la vie après tout. Il pose lentement son couteau avant de laisser son regard se glisser sur elle. « Miss Clarke ! Je vous félicite !! » Sincèrement, il est contente pour elle. « Une preuve que la plupart des étudiants n’est pas si aveugle ou stupide ! » Il lui embrasse la joue pour la féliciter un peu plus. « Si un peu. » Il se frotte le nez avec sa manche. Ça pique les oignons… « Le matin, je m’entraine souvent pour le gros concert, je donne des cours ici, l’aprem j’essaye de gérer la boutique parce que c’est aussi mon bébé, le soir quand je fais pas de petits showcases pour attirer les fans, je suis ici et je compose pour le prochain album qui sortira en avril ou mai… » Il la regarde. « Mais j’aime ça… J’ai hâte de le faire ce gros concert. J’ai commencé à faire des interviews, d’autres shooting aussi… »  Il rit doucement. « J’aime pas les shooting, je suis pas fait pour être mannequin. » Il hausse ses épaules nonchalamment avant de composer une des verrines.

Peut-être que c’est lui qui m’en a donné l’envie … Lui et sa façon de parler de son rôle de chef, d’organisateur, de médiateur. Lui et cet investissement qu’il mettait et met encore dans cette confrérie qui restera toujours la sienne. Lui et ces moments émouvants, cocasses, mais surtout inoubliables de cette année en tant que chef d’une confrérie. Oui, peut-être qu’il m’a donné envie de me présenter. « C’est une page qui se tourne, même si la maison des Phi restera toujours ta maison. Et puis tu vas avoir tellement d’autres choses à vivre … ». Mon regard se dépose sur lui, l’incite à imaginer ces milles décors qui défilent sous mes yeux. Les scènes, les foules en délire, les pays tous différents. La tristesse laissera place, dans le pire des cas, à la nostalgie, mais Joshua va vivre d’autres choses, des choses qui le marqueront tout autant voir plus, j’en suis persuadée. Et moi, moi je ne fais que marcher dans ses pas, rêvant les mêmes rêves dans un autre domaine … L’air rêveur, mon regard croise le sien et je lui souris avant de me concentrer sur l’épluchage et le dénoyautage de mes avocats. C’est idiot mais j’apprécie la simplicité de ce moment. La chaleur de son appartement, de son sourire, la musique que j’adore et qui rend l’atmosphère détendu et agréable, la cuisine qui nous rapproche, qui nous rends ce qu’on avait de plus naturel, de plus simple … Ces petits moments à deux, dans les rires, dans les confidences. Comme celles qu’il me fait, juste après quelques flatteries et un baiser bien mérité, sur son train de vie, ses projets. « Effectivement ! ». Un programme bien chargé qui ne laisse pas beaucoup de place au personnel sous quelques formes qu’il soit. « Essaye de ne pas t’oublier non plus dans tout ça ». Toi et celle qui partage actuellement ta vie. Parce que je suis la première à savoir que Joshua a la grande capacité d’être partout et nulle part à la fois. Qu’il peut s’enfermer dans son travail. Un travail qui paiera et qui paye déjà. Mais à quoi bon posséder tout ça, si l’on n’a personne avec qui le partager ? Le succès, les voyages, la reconnaissance, le bonheur … Je lui souris et enchaîne sur ses mots. « Il aura lieu où ce concert ? ». Je dépose les avocats coupés dans un bol et les écrase à l’aide d’une fourchette, connaissant la recette par cœur à force de m’en goinfrer avec mon ami. « Je trouve que tu te débrouillais très bien ! ». Je retiens un rire, puis un autre à chaque nouvelle image de Joshua qui défile dans ma tête. Des images d’un souvenir, celui de ce shooting où je l’ai maquillé et habillé, ce premier shooting où il n’était pas du tout à l’aise et où j’avais effectué quelques mouvements devant lui, pour l’aider à se détendre, pour le guider. « Bon t’était un peu raide, je l’avoue, t’as pas ça dans le sang ! ». Puis j’éclate de rire, ne pouvant plus retenir les rires qu’il m’a inspirés.

« Je ne pensais pas m’attacher comme ça aux gars pour tout te dire. » Il faut être franc, il s’était présenté sans grande conviction et maintenant que ça se termine, il regrette un peu. Il aurait aimé en faire plus. Beaucoup plus à vrai dire. Il a essayé de prôner la tolérance et il ne sait pas vraiment si ça marchait, mais il était le premier à avoir des amis (et même de la famille) dans chaque confrérie et à ne rien cacher, tout au contraire. Il avait envie de montrer qu’une entente était possible tout en montrant qu’ils pouvaient garder leur propre identité. Il espère avoir réussi. M’enfin, il espère qu’elle y arrivera et qu’elle pourra vivre ça aussi à son tour. Elle ou Alice d’ailleurs, il sera autant fier de l’une que de l’autre même si sa préférence ira toujours vers Riley. Ne pas s’oublier, c’est une chose facile à dire. D’un côté, il a l’impression de se retrouver en faisant entièrement ce qu’il aime et de l’autre, il a peur de se planter royalement ou de perdre pied. Elle pose une question qui tue un peu. Il n’avait pas envie d’aborder encore le sujet, mais en même temps…. « Dans un amphithéâtre. » Il reste évasif et s’apprête à lui expliquer, cependant, il passe à autre chose en sentant le stress monter. Ils évoquent une note plus légère, c’est mieux comme ça à vrai dire. « Je ne suis pas comme toi et Andy. » Déjà pour danser, il est raide, alors pour poser « naturellement… ». M’enfin, ça viendra sûrement avec le temps à ce qu’il parait. L’entrée se termine et ils la mettent au frais avant d’aller s’avachir dans le canapé avec l’apéro et des bières devant la télé. Un bon repos mérité après tout ça. Il hésite encore un peu avant d’aller chercher son pc et de revenir avec pour lui monter une photo. « Je vais chanter là, au Gibson Amphitheater…. Devant 6000 personnes… » Et quand il le dit, on peut ressentir tout le stress dans sa gorge et sa voix. Ça l’angoisse profondément, il faut bien l’avouer. D’accord, il y avait eu beaucoup, beaucoup de monde au coachella, mais il était avec les gars, là, il aura des musiciens avec lui, mais ce ne sont pas vraiment des amis et toute l’attention sera sur lui. « L’album a vraiment…. Vraiment bien marché ici et Riley et j’ai été placé n°1 sur itunes et dans bien des états aussi… » Il la regarde. « Après le concert là, je pars en tournée pour faire des émissions et des concerts un peu partout dans le pays pendant deux ou trois mois. J’vais probablement passer chez Ellen Degeneres dans quelques semaines pour en faire la promo… » C’est juste tellement dingue ce qui lui arrive qu’il ne sait plus vraiment s’il est prêt à tout ça et en même temps, il crève d’envie de tout vivre. « Y’a que Andy au courant j’ose rien dire à personne… Même Ren, je sais que ça lui fait peur tout ça et…. Je crois que j’ai peur aussi que les gens changent en l’apprenant… » Il pose le pc et se lève pour aller fouiller dans un tiroir et venir donner deux billets à Riley. « J’ai pu en garder 15 pour les amis et la famille. Tiens. »

Dans un amphithéâtre …. Mes sourcils se froncent lorsque mon regard s’arrête quelques secondes sur lui. Pas d’enthousiasme, pas d’euphorie dans la voix, pas d’étoiles dans les yeux. Quelque chose le tracasse et je n’ai pas besoin de longs discours, de milliers de mots de sa part pour le comprendre. Intéressée mais silencieuse, je laisse Joshua changer rapidement de sujet pour ne pas le bousculer par des questions sur des thèmes qu’il ne veut, de toute évidence pas aborder. Je ris, lorsqu’il déclare plus légèrement qu’il n’est pas moi ou Andy. Son cousin et meilleur ami que j’ai poussé vers le mannequinat et avec qui je shoots de temps en temps. Bien plus décontracté que Joshua à l’idée de passer sous l’objectif. « Tu t’y feras, de toute façon tu n’as pas le choix tu n’y échapperas pas. ». Et plus il serait connu, plus les séances photos afflueraient. Joshua doit y être préparé et si je ne suis pas là pour lui mentir, je serais toujours là pour l’aider. Terminant mon œuvre, j’attrape le paquet de chips mexicaines et le guacamole tandis que Joshua amène un pack de bière dans le salon. On s’installe, il me décapsule une bouteille et c’est tout en la sirotant que je plonge les chips dans la mixture verte. Je soupire et le suis des yeux lorsqu’il se relève en silence pour aller chercher son PC. Je me redresse et observe cette photo qu’il ouvre en me précisant que c’est là qu’il va chanter, devant 6000 personnes. Les yeux ronds, je comprends à présent pourquoi il n’est pas aussi enjoué qu’habituellement. C’est une grosse salle oui, mais tout un symbole à la fois. Celui de sa réussite et de tout ce qui s’en suivrait. Les tournées, les furies médiatiques, les moments loin de ses proches … Je le laisse terminer, aller chercher les places qu’il me confie avant de prendre la parole. « Tu sais Josh, tu n’auras peut-être pas d’autres chances de vivre un truc pareil dans ta vie. Les choses vont s’enchaîner, vont défilées à une vitesse folle, il faudra que tu gardes la tête sur les épaules … Qu’à ce moment-là tu n’oublies pas qui tu es et d’où tu viens. ». Qui sont tes amis, Andy, Alice, moi et même Ren si tu y tiens. J’ai peur, je te l’avoue sans mots, j’ai peur de te laisser partir mais te retenir briserait tes rêves, finirait par te briser toi. Et au fond, on ne serait pas de vrais amis si l’on muselait ces rêves, les mêmes qui font mes nuits. « Les gens changeront et peut-être que toi aussi tu changeras. Tout ce que je peux te promettre c’est que moi je ne changerais pas. Que je répondrais toujours au téléphone, que je ferais des milliers de kilomètres pour t’aider sur un shooting, que je serais toujours la même quand tu en auras besoin ». Parce que je ne peux parler qu’en mon nom. Je lui souris et dépose ma main sur son genou que je serre doucement entre mes doigts, comme pour lui donner de l’assurance. « Merci pour les places ».

Oh non, ça c’est sûr, il va bien devoir s’y faire, c’est une réalité à vrai dire parce qu’avec sa popularité montante, ça va devenir son quotidien et Riley a raison. Il va s’y faire. Il n’est pas encore à l’aise parce que ce n’est qu’un début. Il suffit de se rappeler ses premières scènes pour savoir qu’il a besoin d’un petit temps d’adaptation avant de pouvoir faire de son mieux. C’est un fait, tout le monde est comme ça non ? Du moins, il se plait à le penser. Ça ira. C’est sûr, ça ira. Il a encore besoin d’un peu d’entraînement, comme lorsqu’il a appris à jouer du piano. Et puis arrive le moment de lui montrer ce qu’il prépare. Andy est au courant, c’est normal pour un manager, mais ça fait du bien de le dire à une amie et de savoir que Riley aura toujours les bons mots pour le secouer parce que c’est ce qu’on apprend à faire en quinze ans d’amitié. Il sourit néanmoins à sa remarque. « J’ai l’impression d’entendre Alice. » Elle lui avait déjà dit la même chose au moment de l’annonce de son solo… « Et je compte sur vous pour me fouetter si jamais j’oublie. » M’enfin, il ne pense pas que ça arrivera. Au contraire, il a peur que les autres oublient qui il est… Qu’il n’est pas qu’un chanteur en devenir mais avant tout un homme comme tout le monde. Elle a encore raison, les gens changeront forcément, lui avec à ce qu’il parait, il change depuis la nuit des temps. C’est le propre de l’être humain non ? Et puis, elle le remercie pour les places, elle ne doit pas se rendre compte qu’il a les larmes aux yeux. Il reste interdit durant plusieurs secondes à fixer le vide tout en cachant ses yeux avec ses longues mèches noires. Une de ses mains vient alors se poser sur sa bouche comme s’il réfléchissait et soudainement, il se tourne pour venir l’enlacer contre lui. « Merci…. » Il avait besoin d’entendre tout ça, vraiment besoin. Il finit par afficher un large sourire malgré ses yeux humides. « Tu m’as manqué espèce de sale chieuse ! » Il rit enfin en la regardant avant d’essuyer son visage et de sourire encore. « Bon ! Bouffe, films et cadeaux ? » Il est décidé à passer une bonne soirée avec elle, ça fait trop longtemps.

Les mêmes mots qu’Alice … Je souris avec une certaine tendresse. Dans nos différences, je ne peux nier que ma meilleure amie et moi nous ressemblons énormément. Et que de ce fait, je ne suis absolument pas surprise que nous ayons pu tenir un discours similaire à Joshua. « Nous n’hésiterons pas à venir te secouer au moindre faux pas ! ». Ça aussi, j’en suis sûre. Autant Alice que moi tenons à Joshua, peut-être pas de la même façon mais toutes les deux, nous serons prête à lui sonner les cloches si cela s’avérait un jour nécessaire.

Après un long monologue de ma part, je contemple les billets blancs entre mes doigts qui révèlent fièrement en grandes lettres d’imprimerie noires le nom de mon meilleur ami. Tout un symbole de sa réussite mais aussi de ses angoisses … Je n’ai même pas remarqué son silence, son air interdit et ses quelques gouttes qui perlent au coin de ses yeux, dissimulées par des mèches brunes. C’est seulement lorsqu’il m’enlace soudainement, presque brusquement que je comprends. Et c’est avec la même violence salvatrice que mes bras viennent trouver son dos que je sais beaucoup moins sensible depuis son opération. Merci murmure-t-il quand mon corps, mon cœur et mes tripes le lui hurlent en retour. Merci à toi Joshua de m’avoir pardonné … Parce qu’à présent je peux retrouver le bonheur du sourire d’un ami, la chaleur réconfortante de ses bras. Parce que j’ai eu l’impression d’avoir traversé un désert de solitude. « Toi aussi tu m'as manqué ... Tellement Josh ... » Mes bras resserrent leur étreinte autour de lui une dernière fois avant de le relâcher dans un soupire de soulagement. « Cadeaux, bouffe et films ! ». Rectifiais-je malicieusement, trop pressée d’ouvrir ces paquets qui me narguent depuis le pied du sapn. Trop impatiente de lui offrir ce cadeau que j’ai confectionné de mes propres mains et que je sors de mon gigantesque sac à main.

« Nous n’hésiterons pas à venir te secouer au moindre faux pas ! » Je me mets instinctivement à prier pour que cela n’arrive alors jamais. Non, mais entre nous, elles sont géniales, mais je pense ne pas survivre avec deux furies dans les cheveux si jamais j’ai couillé quelque part. Alice et Riley peuvent avoir un côté complètement terrifiant. Surtout quand elles s’y mettent à deux. Donc, je vais vraiment éviter d’avoir des soucis. C’est mieux comme ça. Et puis finalement, j’ose. J’ose l’enlacer, la câliner, respirer son odeur, lui dire comme elle m’a manqué. Parce que c’est le cas et ce n’est pas mon ex qui me manque même si j’ai aimé l’aimer, c’est avant tout l’amie que j’avais perdu avec tout ce bordel qui me manquait. Pourquoi les gens refusent de comprendre ça ? C’est une marque de maturité non de savoir voir les choses comme ça et de s’en rendre compte pour pouvoir le vivre ? Mais entre certaines AB, des amis et Ren, des fois je me demande si je ne fais pas fausse route avant de comprendre que j’ai le droit d’être ami avec elle.

« Toi aussi tu m'as manqué ... Tellement Josh ... » Un petit soupir s’échappe de mes lèvres. Ça fait du bien quand elle le dit. C’est comme si tous les mauvais souvenirs étaient balayés d’un revers de main afin de ne pouvoir conserver que le meilleur de notre relation. Du moins, j’aime avoir ce sentiment. J’essaye aussi de ne pas être trop sentimental. C’est mieux comme ça. Ne pas tomber dans la mièvrerie, c’est notre devise depuis toujours. Autant continuer à la respecter non ? « Cadeaux, bouffe et films ! » Elle ne change pas et elle ne changera sans doute jamais. Je me lève en riant doucement afin de me diriger sous ce fameux sapin… moche. On ne peut pas vraiment le qualifier de chef d’œuvre artistique en réalité et je n’en suis pas vraiment fier. J’attrape les trois paquets qui traînent pour elle. Dans le premier, elle trouvera une tablette graphique, comme ça, elle pourra dessiner des robes ou des sacs à main avec plus de facilité et d’une façon moderne, dans le second, un bracelet  en argent et jade que j’ai chiné dans une boutique de Santa Monica et dans le dernier… Well, c’est sans doute con ou cucul mais, j’ai aimé le faire celui-ci. Lorsque mon père m’a donné des albums photos de ma jeunesse et mon adolescence et il y en avait pas mal avec elle et certaines avec Owen aussi. Alors j’en ai prise certaines et je les ai déposées dans un cadre assez grand en essayant de rendre le tout un peu esthétique dans un bordel organisé. « J’espère que ça ira… »

Un sourire espiègle aux lèvres, je propose ou plutôt j’impose à Joshua l’ouverture des cadeaux avant tout autre chose. Pour me faire plaisir et sûrement aussi parce qu’il sait que je vais être insupportable s’il ne s’exécute pas, mon meilleur ami se lève pour aller chercher les trois paquets qu’il reste sous le pauvre sapin de noël et me les tendre. Je les attrape tous et les dépose sur mes jambes. Dans un ordre précis, j’ouvre un premier paquet rectangulaire dans lequel je trouve une tablette graphique. Malicieuse je relève le regard vers lui. « Tu n’aimes pas voir mes croquis papier traîner partout ? ». Je ris avant de déclarer plus sérieusement. « C’est génial ! J’en avais vraiment besoin ! ». Puis je dépose la petite tablette sur la table basse pour ouvrir le second paquet dans lequel je trouve cette fois ci un cadeau que je lui reconnais bien. Un bracelet en jade et en argent qu’il a dû choisir spécialement pour moi dans une boutique inconnue au fin fond d’un quartier inexploré. Touchée, je scrute le bijou avant de lui tendre. « Met le moi ! ». Je tends fièrement mon poignet et attend qu’il l’entoure du bijou dont j’apprécie le style ancien et simple. Joshua a toujours eu du goût, du flaire pour les cadeaux, pour les bijoux et je m’oblige à décoller les yeux de ce présent pour passer au dernier. Un paquet mystérieux, grand et fin à la fois … Je m’interroge quelques secondes avant de me décider à l’ouvrir. Le papier déchiré laisse entrevoir des photos et déjà mon cœur se serre dans ma poitrine. Doucement j’enlève les derniers morceaux de papier et me mord l’intérieur de la joue pour ne pas laisser échapper les gouttes qui perlent à mes yeux. Des dizaines de photos retraçant vingt années de ma vie sont éparpillés dans le cadre. Des photos avec Josh, avec Owen, avec des visages dont j’ai oublié les noms mais pas les souvenirs … « Josh c’est … ». Et alors que je cherche mes mots, je me rends compte qu’aucun n’exprimera mieux la gratitude que l’étreinte que je lui donne à cet instant. Mon bras le serre à nouveau contre moi et je dépose un baiser sur sa joue avant de le relâcher. « Merci ». D’un revers de main, j’essuie ma joue au cas où une vicieuse aurait profité d’un moment d’émotion pour se glisser sur ma joue. Puis j’attrape le petit paquet en papier de soie que je lui tends. A l’intérieur il trouvera une veste en cuir que j’ai dessiné pour lui, à partir de ses mesures que je connais par cœur et sur laquelle j’ai brodé moi-même au fil bleu sur le col, ses initiales. « J’espère que ça te plaira ».

« Tu n’aimes pas voir mes croquis papier traîner partout ? » « A vrai dire, mon père m’a acheté un cahier de musique électronique un peu dans la même optique et je le détestais avant d’me rendre compte que c’est bien pratique par moment et ça m’a fait penser à toi et tes croquis. » Je ris doucement, merci Papa pour la bonne idée à vrai dire. Moi qui ne savais pas quoi lui prendre cette année, au moins, j’avais déjà une chose de faite comme ça. « C’est génial ! J’en avais vraiment besoin ! » Est-ce que j’ai besoin de dire à quel point je suis soulagé de l’entendre dire ça ? Non, je ne pense pas. Je retiens le long soupir d’aise que j’ai envie de sortir du fond de mes entrailles pour conserver une attitude de mec cool mais ça me démange quand même. Lorsqu’elle passe au bijou, à vrai dire, j’ai encore une pointe d’appréhension. La mode change tellement et en plus, c’est son domaine alors c’est un peu délicat d’offrir des choses comme ça, mais quand j’ai vu le bracelet dans une boutique, j’avais l’impression qu’il attendait que je l’achète. « Met le moi ! » « Volontiers Princesse. » Un sourire étire mes lèvres alors que je lui passe autour de son poignet délicat. « Au moins maintenant, t’es vraiment belle. » Ou comment l’emmerder un peu pour casser le côté cucul, mais ça ne dure pas vraiment longtemps… Quand elle attrape le dernier cadeau, je sais que ça fera mouche et le fait qu’elle manque de mot pendant que ses mains finissent d’enlever le papier est un bon indicateur pour savoir ce qu’elle ressent. Je reste souriant à ses côtés en observant les vieux clichés, puis elle et de finir dans ses bras pour l’enlacer à mon tour. Je ne sais pas, maintenant, je me demande si ce cadeau n’est pas une preuve de mon pardon total… Une façon de lui prouver que notre amitié est plus précieuse que tout, surtout depuis tout ce temps. Elle me tend alors mon paquet et je le déchire comme un barbare, bien trop pressé de savoir ce qu’il contient. Mes yeux se posent sur la veste en cuir et je souris de plus belle avant de me lever pour l’enfiler et de me regarder dans le miroir du salon. « Elle est géniale ! » Je sautille en l’air avant de la regarder. « Elle m’accompagnera pendant la tournée. Peu importe ce que la styliste dira, je l’enverrai chier pour la mettre pendant une partie de chaque concert ! » Je viens embrasser sa joue longuement avant de me mettre sur la table basse face à elle. « C’est bon d’être amis à nouveau… » Et je souris tendrement avant de penser à la bouffe. Il est tard, on a faim ! Autant manger et apprécier encore plus cette soirée.