Le soleil n’était plus à son zénith depuis plusieurs heures mais la lumière continuait d’illuminer la crique. Pour une raison qui lui était inconnue, la crique avait été désertée et il ne restait plus qu’un silence et quelques mouettes comme seul compagnon. D’humeur chafouine, il avait décidé de passer la soirée à la plage, seul, pour se libérer l’esprit de ses soucis quotidiens. Un bon livre, du bon vin et le son des vagues qui venaient se fracasser contre les rochers ou sur le sable. Cette grande étendue bleue face à lui lui donnait des envies de voyage, de partir, de laisser derrière lui la vie estudiantine et les tracas de la vie de tous les jours. Inspectant d’un œil distrait ce que ses amis postaient sur Instagram, il avait l’impression d’être le seul à ne rien faire d’exceptionnel de son été. Il retira ses tongs et les laissa traîner derrière lui dans le sable. Elles n’étaient ni très chères, ni très importantes à ses yeux. Et il doutait de toute façon que quelqu’un prenne la peine de les lui voler. Il posa sa serviette à terre avant de commencer à se déshabiller. Il fallait bien qu’il profite pour une fois un peu du soleil. Il n’avait pas honte de son corps mais préférait tout de même bronzer quand il n’y avait personne sur la plage. Par personne, il fallait surtout entendre pas d’enfants qui couraient partout en criant, en construisant des châteaux de sable et en respirant. Il posa la bouteille de vin blanc à sa droite, les Poèmes saturniens à sa gauche. Il avait besoin de commencer la soirée avec quelque chose de léger. La bouteille s’ouvrit avec facilité et les pages défilaient tout aussi facilement au fur et à mesure que l’alcool pénétrait son sang.
Son regard fût pris un instant en dehors de sa lecture. Il n’avait pas senti de présence autour de lui mais, pourtant, quelque chose rayonnait au beau milieu de l’eau. Tel Poséidon chevauchant son char tiré par des hippocampes, un dieu était apparu entre les vagues. Will n’arrivait pas à détacher ses yeux de ce corps si parfaitement sculpté, des mouvements qu’il opérait avec grâce sur sa planche. C’était sans doute aussi pour cela qu’il s’était rendu sur la plage. Il avait toujours l’espoir de croiser un quelconque surfeur qui ferait au long une démonstration de son savoir-faire et de ses compétences. De pouvoir admirer un corps hâlé au milieu du bleu de l’océan. L’occasion n’était pas si rare à Los Angeles mais il chérissait tout particulièrement de tels instants, où il pouvait s’oublier, où il pouvait oublier qui il était. Continuant de boire avec joie, il posa son livre sur ses genoux et se surprit à rêvasser que le jeune homme viendrait peut-être lui parler, qu’ils commenceraient ainsi une folle histoire d’amour et que cela ferait une merveilleuse histoire à raconter à leurs enfants. Secouant la tête devant une telle absurdité, Will reposa la bouteille de vin et retourna à sa lecture.