La nuit est tombée depuis quelques heures et les choses ont pris de la nuit son intensité. Son hypnose. Les contours se floutent dans le noir. L’absence de couleur mutile la vue et excite les autres sens.
Ethan a bu quelques coupes. Quelques degrés habiles qui sont passés dans son sang. Les autres invités lui paraissent vaporeux, dissouts dans la chaleur d’août, bruyants de leurs joies et de leurs peaux exaltées par les sueurs de fin de soirée.
Il sourit encore de la blague que Monsieur Leigh a lancée il y a quelques minutes. Il sourit mais il s’isole. Les spiritueux le poussent à la jouissance solitaire, à la narcose tranquille. Ses jambes bougent un peu plus lentement que d’habitude. Le sol, sous ses pieds, semble ouaté et douillet. Son cœur pianote plus vite, plus fort, entre ses poumons et ses côtes. Ethan a envie de s’envoler. De se dé-contraindre, de se dé-matérialiser. Il a envie de voyages, de liberté. De prendre, de laisser.
Une blondeur soyeuse chatoie dans le noir. De tels reflets dorés, dans le noir, cela ne peut qu’attirer. Il est attiré. De dos, la femme – car c’est une femme, à n’en pas douter – la femme parait jeune. Ses mouvements sont souples, déliés. Il devrait penser qu’elle est une naïade starlette, une sirène mannequin, une créature en mal de plaisirs. Il ne le pense pas.
Quelque chose ne va pas.
L’air est parfumé d’agression. D’étouffement et d’invasion. Autour d’elle, le paysage noir est tordu de couleurs. Deux hommes se tiennent debout près d’elle. Trop près d’elle. Deux hommes trop grands, trop larges, trop musclés. Habillés de criard et de marques « jeunes ». Deux visages aux regards pleins d’appétence et de brillance corrompue.
Elle… Elle ne bouge pas beaucoup. Elle, dans le bas de son dos, dans sa colonne vertébrale, elle a la rigidité factice. Cette roideur de vieux corset prêt à exploser pour fuir, pour crier.
- Oh, te voilà… Je te cherche depuis quelques minutes déjà…
Il n’a plus de barrière. Plus de masque. Grâce à l’alcool, ou à cause de l’alcool, les tics de sa classe sociale reviennent au galop. La prononciation a pris un peu de la langueur des britanniques, un peu de l’inflexion des oxfordiens. Et sa veste foncée coupée par un tailleur londonien, et son pantalon clair italien, ne démentiront rien de l’argent qui l’a couvé quand il était enfant. Argent qu’il dépense, professeur inconscient des finances, sans compter.
Il a lancé une main, en apesanteur. Un geste sans effroi et sans hâte. Un mouvement vers la femme, vers sa taille, vers le haut de ses hanches.
La main ne touche pas la taille, pas les vêtements, encore moins la peau. La main est restée à quelques millimètres indociles au-dessus des reins. Des millimètres insuffisants pour toucher avec la la pulpe des doigts. Des millimètres suffisants pour hurler une intimité pudique. La main s’ouvre entre le creux des reins. Toute la main, qui couvre plus de la moitié de la taille fine. La chaleur de la paume, près du dos. Pour hurler une intimité pudique mais indéniable.
Ethan s’est avancé la hauteur de la femme. A ses côtés, l’air de rien. Posé là comme un oiseau de chasse près de sa compagne de chasse qui veille sur leur nid des montagnes.
- Monsieur Leigh nous demande…
Il lui sourit. Il sourit à celle qu’il fait passer pour sa compagne du moment. Avec la douceur sur le bord des cils et la détermination sur le bord des lèvres.
La main s’est étendue sur le dos. Il la touche, il la pousse. Une légère pression, vers la sortie de ce quatuor sans violons.
- Et moi aussi je te demande, my love.
Ethan a bu quelques coupes. Quelques degrés habiles qui sont passés dans son sang. Les autres invités lui paraissent vaporeux, dissouts dans la chaleur d’août, bruyants de leurs joies et de leurs peaux exaltées par les sueurs de fin de soirée.
Il sourit encore de la blague que Monsieur Leigh a lancée il y a quelques minutes. Il sourit mais il s’isole. Les spiritueux le poussent à la jouissance solitaire, à la narcose tranquille. Ses jambes bougent un peu plus lentement que d’habitude. Le sol, sous ses pieds, semble ouaté et douillet. Son cœur pianote plus vite, plus fort, entre ses poumons et ses côtes. Ethan a envie de s’envoler. De se dé-contraindre, de se dé-matérialiser. Il a envie de voyages, de liberté. De prendre, de laisser.
Une blondeur soyeuse chatoie dans le noir. De tels reflets dorés, dans le noir, cela ne peut qu’attirer. Il est attiré. De dos, la femme – car c’est une femme, à n’en pas douter – la femme parait jeune. Ses mouvements sont souples, déliés. Il devrait penser qu’elle est une naïade starlette, une sirène mannequin, une créature en mal de plaisirs. Il ne le pense pas.
Quelque chose ne va pas.
L’air est parfumé d’agression. D’étouffement et d’invasion. Autour d’elle, le paysage noir est tordu de couleurs. Deux hommes se tiennent debout près d’elle. Trop près d’elle. Deux hommes trop grands, trop larges, trop musclés. Habillés de criard et de marques « jeunes ». Deux visages aux regards pleins d’appétence et de brillance corrompue.
Elle… Elle ne bouge pas beaucoup. Elle, dans le bas de son dos, dans sa colonne vertébrale, elle a la rigidité factice. Cette roideur de vieux corset prêt à exploser pour fuir, pour crier.
- Oh, te voilà… Je te cherche depuis quelques minutes déjà…
Il n’a plus de barrière. Plus de masque. Grâce à l’alcool, ou à cause de l’alcool, les tics de sa classe sociale reviennent au galop. La prononciation a pris un peu de la langueur des britanniques, un peu de l’inflexion des oxfordiens. Et sa veste foncée coupée par un tailleur londonien, et son pantalon clair italien, ne démentiront rien de l’argent qui l’a couvé quand il était enfant. Argent qu’il dépense, professeur inconscient des finances, sans compter.
Il a lancé une main, en apesanteur. Un geste sans effroi et sans hâte. Un mouvement vers la femme, vers sa taille, vers le haut de ses hanches.
La main ne touche pas la taille, pas les vêtements, encore moins la peau. La main est restée à quelques millimètres indociles au-dessus des reins. Des millimètres insuffisants pour toucher avec la la pulpe des doigts. Des millimètres suffisants pour hurler une intimité pudique. La main s’ouvre entre le creux des reins. Toute la main, qui couvre plus de la moitié de la taille fine. La chaleur de la paume, près du dos. Pour hurler une intimité pudique mais indéniable.
Ethan s’est avancé la hauteur de la femme. A ses côtés, l’air de rien. Posé là comme un oiseau de chasse près de sa compagne de chasse qui veille sur leur nid des montagnes.
- Monsieur Leigh nous demande…
Il lui sourit. Il sourit à celle qu’il fait passer pour sa compagne du moment. Avec la douceur sur le bord des cils et la détermination sur le bord des lèvres.
La main s’est étendue sur le dos. Il la touche, il la pousse. Une légère pression, vers la sortie de ce quatuor sans violons.
- Et moi aussi je te demande, my love.