I'm an unicorn !!! - pv.

Le crayon tapote sur la tablette du comptoir de la galerie McKenzie. Je m’ennuie et j’aimerais vraiment que le temps passe plus vite. Je suis fatigué et la nuit a été courte. Cette histoire avec Adélaïde m’a tellement perturbé. Je décide de tenter de me changer les idées en allant sur Twitter, c’est alors que je tombe sur les publications d’Oscar. Un intérêt romantique des plus intéressants. Intéressant parce que j’ai été très con dans l’histoire. Je me demande ce que nous aurions pu « vivre » si je n’avais pas été aussi bête, aussi ignorant. J’imagine…

Et c’est le noir complet.
Le sommeil.

( … )

Quand je rouvre les yeux, je me retrouve dans une grande plaine bordée par des arbres. Une véritable prairie féerique, tout est beau, le soleil est bleu, l’herbe est verte et douce sous mes pieds nus et l’air rafraichi avec douceur ma peau que les rayons du soleil tentent de réchauffer. C’est le paradis ici ? Que fais-je ici ? Je n’en sais rien. Mais je suis trop bien ici. C’est alors qu’une main se pose sur mon épaule. Une main qui me retourne complètement tout en me faisant du bien. Je me retourne pour voir qui est là…  

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Une grande plaine...

Bordée par des arbres.

Et un souffle, timide, discret, qui se perd, perd, perd, dans la clarté suffocante du jour...

Un soleil bleu, froid, enflammé, incendie la plaine aussi verte que le plus toxique des composants chimiques. Radioactif... Tout est radioactif, dans cette prairie, dans cette plaine... Et les arbres, autour, qui empêchent la moindre issue. Des arbres rouges, des arbres roses, des arbres bleus, des arbres à la couleur qu'on ne saurait décrire, d'autres, eux, qui changent de couleur à chaque instant, à chaque battement de cils...

L'air frais et craquant croustille dans les poumons qui se soulèvent et retombent, lentement, dans le corps. Des poumons remplis, d'air, d'oxygène... Des poumons artificiels, inventés par le rêve... Pour le rêve...

La main se pose sur l'épaule, comme ça. Doucement. C'est une évidence. Et un sourire, chaleureux comme le four, évocateur d'une contrée lointaine, la Sicile... Son visage est rougi par la chaleur, ses cheveux, plaqués par de l'eau. L'italien sourit tandis que ses doigts s'accrochent à son épaule, à lui lui lui lui...

Il hennit, une fois puis deux, ses jambes se métamorphosant.

Un centaure, aux belles jambes noir de jais.

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2013

2018

2023

« Oksar… »    Un murmure, un soulagement…

Mon cœur palpite dans ma poitrine à sa vision. Qu’il beau, qu’il est parfait… Le rêve surpasse le souvenir. C’est un bonheur, un plaisir autant qu’un regret…

Surprise !
Un son étrange s’échappe de lui.
Puis il n’est plus vraiment…

Un centaure… un mystère…
Il est beau…
Mes doigts s’attardent avec lenteur sur le reste de son corps, là où l’animal est en passant par le torse musclé.

Excitant…

Je ne peux m’attarder à le regarder seulement ‘lui’ et pourtant, c’est ce dont j’ai envie depuis le début. D’autres détails m’attirent… Le paysage change à tel point que mes yeux en sont captivés.

Des arbres… ils sont beaux, colorés… un sourire s’échappe de mes lèvres. J’ai l’impression de retrouver les œuvres perdues… détruites…

Un monde nouveau…

Puis un bruit… des oiseaux… ils se posent autour de nous. J’ai perçu des ailes voletées, colorées mais quand je les regarde enfin…

Autant qu’ils nous regardent…
Des oiseaux de fer…
Ils sont beaux, ils sont petits ou grands, gros ou fins.

Je ris. Je recule légèrement mais je me sens… empêché de bouger plus que ça. Comme si… ma tête se tourne pour voir. Je sens comme des mouvements influés par ma propre pensée…

Des ailes ? Je regarde Oscar, abasourdi.

« où sommes-nous ? »

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Son nom saute du bout des lèvres de l'autre avant de se perdre entre les odeurs du vent.

Tam, tam, tam, tam.

Résonne un coeur qui claque contre une poitrine.

Boom, boom, boom, boom.

Bat l'autre coeur, au même rythme.

Un regard affamé dévore son visage. Une main curieuse découvre sa chair, sa peau. Le poil doux de l'homme cheval. Un frisson s'échappe à la collision des peaux. Il y a de la tension dans l'air qui abrutit les sens. L'atmosphère lourde pèse comme une hâche sanglante.

Des oiseaux de métal, ciseaux aiguisés, tombés du ciel, sont venus s'arrêter. Formant un cercle, rattaché aux arbres, ils admirent la scène, épient avec malice.

Puis, le centaure disparaît. Pouf. Comme ça. Laissant en son sillage une trainée de cendres, de poussières. De paillettes d'amour dorées, argentées, multicolores, scintillantes...

Le visage réapparait, différent, déformé. Il réapparait, corsé, écorché, dans du bois, dans les troncs... Chaque arbre gagne le visage, chaque arbre gagne son identité. Oscar partout, Oscar le tronc. Oscar le visage dessiné autour de Liam.

– Nous sommes partout et nulle part à la fois... ois... ois... ois... ois... Résonne et murmur la voix qui se dissipe dans les airs, dans un écho assourdissant. Le ciel se recouvre, voûté d'étoiles. Puis, se matérialise. Devient une caverne. La roche est fraîche, froide, glissante. L'obscurité embrasse son corps à lui. Les visages dans les arbres ont disparu à nouveau. Un rire, cristallin, résonne partout dans la caverne. Son rire à lui. Sa voix à lui. La voix de l'italien. Le rire du vilain.

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Oscar n’est plus. Un nuage sec se forme autour de moi et dévoile enfin l’étrange paysage qui s’offre à moi. Les visages de mon confrère sur tous les troncs.

« Nous sommes partout et nulle part à la fois ois... ois... ois... »

Je me sens encore perdu. Et à présent, je suis seul… Terriblement seul…

« Oksaaaaaar ! Oksaaaaaar ! » Je cris dans l’espoir qu’il m’entende. Qu’il revienne. Mais je ne vois que des visages.

Sans comprendre ce qui m’arrive, je me mets à courir. Mes jambes me portent sans chercher à réfléchir, je cours…

Je pense avoir atteint la limite de mon corps quand soudainement, je me sens propulser, changer… Soudainement, je m’arrête quand j’aperçois une grande étendue d’eau d’un rose clair éblouissant. Je me penche pour comprendre pourquoi je courais si vite…

« Je suis une licorne !!! »

Puis un craquement se fait entendre derrière moi, je me retourne enfin… Dans ma tête, j’espère le retrouver ici…
 

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« Oksaaaaaar ! Oksaaaaaar ! »

La plainte désespérée déchire la texture de l'air. Déformation, détournement, retournement, surprise, inattendue, imprévisible, improbable...

Un corps, qui court, court, court, dans la distance.

Un lac. Un lac rose scintille sous l'étincelle d'un sourire rayonnant. Le ciel est recouvert de paillettes et construit d'hexagones, de sphères, de trapèzes en silicone. Face au miroir de l'eau se dresse une créature au pelage blanc, le front couronné par une corne confectionnée d'un matériel inconnu, indescriptible, plus pur que l'ébène, encore.

« Je suis une licorne !!! »

Le cri gambade dans les plaines, comme un écho assourdissant, abrutissant ces plaines vides, dépourvues de vie, d'humanité... Des plaines contenant une licorne et toute la magie naturelle de la flore locale. Des fleurs en papillons, des saules en spaghettis, des barques en boutons, aux rames-fourchettes.

L'eau du lac bouillonne comme un chaudron ensorcelé.

De la fumée, buée embrumée, éclôt à la bordure de l'horizon.

Lentement, progressivement, se dresse une fleur, nacrée, perlée, au dessus de l'eau bouillante rosée. Un nénuphar qui fleurit, ses pétales s'entrouvrant silencieusement, puis, dans une déchirure sourde et incontestable.

Les pétales tombent, s'évaporent au contact de l'eau.

Recroquevillé à l'intérieur, un corps nu, frissonnant et frigorifié.

– Froid... Froid... Froid... Des murmures, lâchés sur l'eau, perdu entre les vagues, les vagues de ses mots.

Trempé, imbibé d'eau rosée, recouvert de la tête au pieds, ses cheveux, ses poils, tout lui colle au corps. Puis, majestueusement, il se lève, tel un roi de printemps.

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Je me sens si seul… L’angoisse me prend, encore plus quand le lac se met à offrir un spectacle à la fois impressionnant et angoissant.

Ça boue.
Ça fume.
Ça ensorcèle.

Que se passe-t-il ? Est-ce la fin du monde ? Je suis déboussolé, le poil blanc de mon flan frémit à l’idée de mourir. Je m’agite, je cours mais rien n’y fait, je suis incapable de trouver une sortie. Je veux partir, m’enfuir.

C’est alors que je vois cette fleur, au loin…

Je me rapproche, je galope… Puis je constate qu’elle s’ouvre, s’éclot et s’évapore telle une fumée bleutée sur cet océan rose lumineux. Elle est si grand, c’en est magnifique…

Quand on voit ce qu’il y a à l’intérieur, on comprend pourquoi. Un homme, grand, fort… On pourrait dire un roi comme on dirait un Dieu.

Et pourtant si fragile, frigorifié.

Fidèle à moi-même, je me rapproche, je galope encore pour venir à son aide. Le corps equin et bouillant se rapproche de l’homme en faisant attention de ne pas le blesser avec la corne. Doucement, ma tête animale se frotte au torse pour petit à petit, sentir véritablement le contact peau contre peau.

Ce sont des lèvres qui embrassent accidentellement ce torse froid et humide. Je me rends compte que je suis redevenu l’homme que je suis. Mon regard gêné se plante dans celui du majestueux sans m’empêcher de me rapprocher de lui.

Mes bras entourent son ventre pour le rapprocher de moi : « Viens, réchauffes-toi… » dis-je timidement en toute innocence. Après tout, il est frigorifié et moi non… Nous étions tel un brasier tentant de réchauffer un glaçon…

« ça va aller ? » dis-je en m’écartant légèrement pour le regarder les yeux dans les yeux.

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Recroquevilé, position foetale, un cycle, un cercle. Le cycle de la vie. Le corps forme une boule qui ne veut pas s’élancer afin de baigner dans toute sa splendeur. Le corps tremble, frissonne, marmonne, gémit.

Tu-dup, tu-dup, tu-dup.

Des sabots résonnent contre la terre poussiéreuse et l’herbe verdoyante. La licorne galope vers le garçon, vers l’italien, sa joue frôlant ses côtes, son torse, ses flancs.
Friction.
Frisson.
Chaleur.

Le corps frémit.
Le corps frémit.
Le corps... Ralentit.

Les secousses, moins forts, moins violentes, se calment petit à petit. Des lèvres parcourent son corps, y déposant un baiser mouillé, humide, collant, éclatant. Un baiser enflammé qui réchauffe le corps tout entier, de l’intérieur vers l’extérieur, le corps qui devient véritablement de feu,

Un feu joli, qui ne brûle pas.
Un feut tendre, calme... Calme plat.
Un feu délicieux, qu’on peut goûter simplement par le toûcher.
Le feu ne brûle pas.
La peau de Liam ne le craint pas.

Des bras s’enroulent autour de sa taille, l’invitant à se réchauffer. Ses paupières se battent avant que ses yeux ne s’ouvrent, scintillants malgré la lueur du jour, d’une étincelle verte, son étincelle verte dans les yeux. “Réchauffe toi”, l’invite la voix. Se blottissant contre Liam, il observa le monde partout autour de lui. Des lumières, des couleurs, de la nature, de l’herbe, de partout. Comme un jardin d’Eden, ils n’étaient que deux face à toute cette splendeur ; toute cette richesse.

On lui demande si ça ira. Il hôche de la tête. Oui. Un sourire fend la toile de son visage. Merci. Le regard de Liam se plonge alors dans le sien. Grossière erreur.

Tourbillon.
Tornade.
Cyclone.
Oeil de la tempête.

Dans son oeil se trouve un bâteau.
Sur le bâteau, des matelots.
Dans la cabine, deux hommes.
Oscar, Liam.

Spirale infernale. Profondeur occulaire. Miroir de l’âme. Univers visuel.

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L’animal n’était plus désiré par sa présence. L’homme voulait toujours revenir, être présent et détruire la beauté. Comme tous les hommes sur cette planète. La planète Terre. On retrouve un peu de cette « Terre » dans le monde de Liam, mon monde. Dans mon attitude. Je suis comme les autres et à la fois, tellement différent.

Je me demande si Oscar ressent ce combat perpétuel ? L’esprit tiraillé, qui tente de réfléchir mais qui n’a plus aucun pouvoir sur ses gestes. Mon corps n’obéit pas à une logique, il joue… Il embrasse, réchauffe ce corps de glace. Oscar. Il ressent l’effet, il ressent cette gratitude…

Le Phi se blottit dans mes bras. Un sentiment heureux plane en ce rêve. J’ espère le réchauffer, être efficace. Finalement, je ferme les yeux, c’est délicieux…

Puis le monde change. Les bruits, l’ambiance… Tout…


Au début, j’ai du mal à comprendre ce qu’il se passe. Je me sens perdu et regarde Oscar avec désespoir. Mes doigts montent au visage de l’italien et y caresse la barbe de plusieurs jours : « Où somme-nous ? » dis-je d’une voix troublée.

La houle me pousse contre Oscar, le tenant avec plus de fermeté, j’essaie de comprendre les tourments qui nous entourent. Le vent souffle avec intensité avec l’extérieur, les vagues font tangués le bateau. Sur le pont, on entend les voix des marins.

Nous, on est à l’abri. Au chaud… Le confort est à notre disposition. « Que fait-on, maintenant ? »

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– Nous sommes dans le navire de tes peurs.

C'est affirmatif. Il sait où ils sont. Il ne se perdrait jamais dans le domaine de sa création. Lui, apparition, mirage, invention... Condamné à vivre dans des songes sans jamais prendre conscience pleinement. Un arrière-goût au fond de la pensé. Un écho oublié sur le bout d'une langue écorchée.

Il n'existe pas, mais ici, rien n'existe plus fortement que lui. Les plages de son âme, c'est son domaine. Il y vit, il y grandit. Il y est nourri, par l'imagination et la force de la création. Sans Liam, cet Oscar ne pourrait exister. Pour Liam, cet Oscar existe. Pour lui servir, répondre à ses questions. Expliquer ses rêves, expliquer ses pensées... Un guide dans pour braver sentiers les plus sinueux de son âme.

Ses yeux, tendrement, se posent sur Liam. Il le regarde avec des iris éclatantes. Il y a un certain enthousiasme dans ce regard. Il y a une douceur apparente dans la caresse que ses doigts effectuent contre la sienne, de joue.

Le bateau vibre de façon violente. Les vagues se fracassent contre la proue, le vent claque contre les lattes de bois. Le bateau tangue, la mer l'emporte dans des maelstroms mystérieux. Au dessus, des cris, des plaintes, des grognements.

Dans la cabine, il ne bouge pas.

– Il ne faut pas avoir peur. Tu as peur?

Il arque un sourcil en le regardant.

Dans un coin de la cabine, il y a une cheminée en briques où un feu brûle avec insistance.

« Que fait-on, maintenant ? »

Il marche, sans le regarder.

Suis-moi.

Cet Oscar là s'installe dans ses pensées. Il s'assoit au coin du feu et se frotte les mains devant les flammes.

– C'est joli, non?

Il regarde les flammes avec insistance.

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