CRAZY YOUNGSTERS
– Elle ? … Les filles ? Non… Elle n’a pas la tête à être…
Assis à côté de moi au bar, le grand brun aux yeux gris (et au physique peu avantageux, accessoirement) se met à rire avec nervosité, peu enclin à croire ce que je viens de lui dire – de lui répéter, même. Mes yeux auparavant posés sur ma meilleure amie, au loin en train de danser, retournent sur le gars et quand je vois sa grimace semi–choquée, semi-intéressée, à mon tour j’éclate de rire. C’est qu’on peut les rendre tellement facilement benêts, ces hommes…
– La tête à quoi ? A être gouine ? … C’que vous pouvez être cons, ma parole ! Lancé-je sur un ton délibérément moqueur avant de boire d’une traite le shooter de vodka qui vient de m’être servi.
La tête à être gouine… Sérieusement… Bon… Peut-être, en fait ? Il y a bien des têtes à être cons, la preuve avec lui, alors il doit bien y avoir des têtes à être gouines…
Je ne sais plus à combien de verres j’en suis. Je n’ai pas tenu le compte. J’aime pas tenir les comptes et je n’ai jamais aimé ça en fait. Que ce soit pour surveiller mes dépenses – qui peut bien avoir envie de crever des suites d’une crise de panique atroce ? – ou à propos des verres que je vide dans les soirées… Puis on a mieux à faire non ? Je crois que le bonhomme n’a qu’à moitié apprécié ma remarque… Je ne lui en veux pas le pauvre, j’ai un peu violenté ses conventions arriérées… Mais il fallait bien que quelqu’un le fasse un jour, hein. Un instant plus tard, je l’ai déjà mis de côté en quittant le bar pour rejoindre Riley au milieu du dancefloor enflammé.
– J’ai cru te sauver d’un gros relou en lui disant que t’étais branchée uniquement par les nanas mais ça l’a encore plus séduit. Tu le verrais, il bave en te regardant te déhancher.
Après avoir montré le gars en question du bout du menton, j’adresse un sourire amusé à mon amie et me rapproche davantage pour danser avec elle. A son oreille, je viens murmurer – ou crier, en fait :
– Chiche de le rendre fou ?
Cela ne sera qu’un défi de plus, vu et revu.
Avec une insupportable vanité, elle s'était imaginé pouvoir sonder le cœur de tout le monde. Les évènements avaient montré qu'elle s'était complètement trompée. Austen