Les jours passent et se ressemblent. Malheureusement, j’étais bien obligé de confirmer que ce fait était vrai, puis-ce que pour moi, chaque semaine était la même que la précédente, à quelques détails près. Entre les cours, les fêtes, le travail et les vacances, puis une nouvelle année universitaire à entamer, tout était pareil. Réglé come une horloge. Pour être tout à fait honnête, les seules choses qui changeaient dans ma vie étaient ma santé qui se dégradait progressivement à cause de mon mode de vie, les tatouages qui s’accumulaient peu à peu sur mon corps et le fait que ma date de naissance me donnait l’impression de devenir trop vieux pour trainer avec des gens plus jeunes que moi. Bientôt, j’aurai 28 ans. Déjà. C’était comme si rien n’avait changé depuis maintenant 5 ans, pourtant… je gardais ma mentalité de petit con pour bien marquer ça, sans compter le fait que j’avais arrêté d’avancer du point de vue personnel car il n’était pas question de se remettre avec quelqu’un maintenant que j’avais une phobie des relations amoureuses. Catastrophes sur catastrophes.
Traitez-moi de faible, je ne vous contredirai pas. Je n’avais aucune volonté et ça se traduisait clairement dans mon comportement. Mais vous savez… je m’en fichais complètement. Pas la force de vivre décemment, pas la force de mourir une bonne fois pour toutes, réellement pitoyable comme mec, quand on y regardait de plus près. Combien de fois m’étais-je observé dans le miroir pendant des heures en attendant que l’effet de la drogue que je venais de prendre se dissipe ? Combien de fois ? Je ne sais pas… mon quotidien n’avait plus vraiment de sens, et moi non plus. Je ne sais pas ce que j’appréhendais, d’ailleurs… quel événement, quelle personne… mais dans tous les cas, je me maintenais dans ce monde pour être prêt à accueillir « la suite » lorsqu’elle se présenterait.
Passons.
J’avais aujourd’hui rendez-vous avec mon prof référant pour en voir ce qu’il pensait de ce que j’avais écris dans mon mémoire jusqu’à maintenant. Comme il me prenait pour un étudiant « exemplaire et plein de potentiel », j’évitais toujours de fumer ou de boire le jour avant nos entretiens, histoire d’être présentable et disposé à utiliser tous les neurones qui me restaient durant une heure et demi. Pour l’occasion, je m’étais levé tôt, avais pris une douche et m’étais habillé le plus correctement possible avec une chemise noire et un jeans simple. Je ne recevais certes pas le prix Nobel de médecine, mais j’avais appris à me montrer sérieux face au monde professionnel. Au moins ça, tiens ! Notez-le quelque part « Tyler sait assurer dans autre chose que les parties de jambe en l’air ou l’organisation de fêtes ». Organisation de fêtes… tiens, j’y penserai, si je me reconvertis un jour.
Après être monté dans ma voiture et avoir conduis jusqu’à l’université, je déposais le véhicule sur le parking, puis passais les contrôles de sécurité nonchalamment. Tss… tiens, en parlant de ça, j’avais mis un bon moment avant de m’y habituer, après la fusillade… tout comme j’avais mis un bon moment avant d’oser entrer dans le bâtiment principal.
Cartable en cuir sous le bras, je traçais droit en direction de l’entrée sans me gêner de bousculer les personnes qui venaient en sens inverse et ne se poussaient pas sur mon sillage. Désolé, les premières années Delta, mais votre appartenance à une confrérie, j’en n’ai rien à cirer.
Une fois dans le hall principal, je m’arrêtais enfin pour me baisser car j’avais remarqué que les lacets d’une de mes chaussures étaient défaits. Rah… je détestais cette paire de pompes qui ne tenait pas en place, je n’aurais jamais du les acheter. Bref, une fois ma tâche accomplie et une quinte de toux plus tard, je me suis relevé en m’apprêtant à aller vers les escaliers.
Un autre jour, peut-être.
Qu’est-ce que…
Non.
Si.
Non ?
Mes jambes ont commencé à trembler à la vue d’une fille qui passait par là et que j’ai stupidement suivi des yeux sans pouvoir bouger.
Si.
Sans même avoir la possibilité de réfléchir car mon cerveau venait d’être réduit en cendres à l’instant où je vous écris, je me suis mis à suivre la jeune femme comme un chien errant vous suivrait en espérant que vous le rameniez chez vous, le tout en oubliant complètement ce pour quoi j’étais venu à l’université, à la base. Elle venait d’entrer dans les toilettes, alors je l’ai attendue là. Une minute. Deux. Cinq. Je repris enfin mes esprits. Bon sang… je commençais à avoir des hallucinations, maintenant, ça y’est. Je secouais un peu ma tête pour me remettre les idées en place en me sentant bête de m’être retrouvé là, puis fis demi-tour.
Non.