farmville — thaddeus

La moto en arrêt, la clope au bec, j't'attends en bas de l'immeuble après t'avoir envoyé un sms de rappel. Bon, ok, j'sais pas si on peut techniquement parler de rappel quand j't'ai pas explicitement dit que j'passais te chercher mais en ma défense comme j't'avais proposé d'venir et qu't'a pas dit non dans ma tête c'était acté quoi. Mais maintenant que j'suis là après 0 communication, j'me rends compte que j'aurais p'têtre dû t'envoyer un p'tit mess la veille au cas où. Oopsi. J'commence à taper du pied nerveusement tellement j'suis saoulé d'attendre. Ça fait combien de temps là? CINQ minutes? Putain la loose, ça craint. J'me fais déjà chier. Lol. Ouais j'suis impatient, et alors? On a tous nos défauts hein.

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Spoiler :

Allongé de façon nonchalante sur ton canapé, tu caresses doucement Arwenn. Depuis la découverte de la paternité d'Ezra, t’essaies tant bien que mal de te détendre. C’est pas tout le temps simple. Aujourd’hui, t’as même pas pris la peine de t’habiller, parce que tu déprimes. Tu pensais que t’aurais un week-end de repos, après la proposition de Caleb, mais à cause de votre pseudo embrouille à deux balles, tu te retrouves comme un abruti, rien de prévu. Alors qu’une vieille émission sur la vie des animaux de la savane passe à la télé, tu hésites fortement à envoyer un message à Adri, ou Yori. Sinon, tu finiras pas aller te balader, retrouver tes potes d’urbex, ou quelque chose dans le genre. Ton téléphone vibre : c’est Caleb. Tu ne comprends pas vraiment ce qu’il te dit. Les quelques SMS échangés t’éclairent. Sans vraiment comprendre, un petit sourire se dessine sur tes lèvres. Tu te lèves, retire ton vieux jogging, attrapé un sac à dos, y fourre quelques vêtements, puis tu t’habilles en vitesse. En descendant, tu découvres qu’il est vraiment là. T’es assez surpris. 《 J’avais rien d’autre de prévu, j’avoue. 》 t’es un peu intimidé, tu sais pas trop pourquoi. 《 On y va ? 》

« Ahhhh bah c'est pas too soon hein!!! » que j'finis par railler quand tu daignes enfin pointer le bout d'ton nez. C'est que j't'ai attendu quoi... Cinq minutes? Une éternité! J'ai failli clamser, bro, j'te jure, t'as po idée! « Dis tout de suite que I'm your roue de secours while you're at it, why don't you? » Nan mais c'est vrai mec, j'me fais iech à venir te chercher aux aurores et tu me sors des conneries pareilles. Ahlala ce qu'il faut pas entendre. Tu mériterais que j't'abandonne là comme une merde. Heureusement que j'suis de bonne humeur. « Bah I'm waiting for you hein, hop on! » C'est à ce moment là que j'te tends le casque de moto tout neuf que j'ai acheté y'a pas longtemps pour pouvoir trimballer des gens sur ma bécane. De rien. J'te demanderai même pas un billet, si c'est pas gentil ça.

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Spoiler :

Tu lèves les yeux au ciel quand il se met à râler, mais tu commences à être habitué avec Caleb. Et puis votre dernière discussion par message était un peu tendue, alors t’espères pas grand-chose, pour le moment. Sans doute qu’il a besoin de se calmer, de passer un peu ses nerfs, t’en sais rien, mais tu lui en tiens pas rigueur parce que tu le connais un minimum. « C’est pas ce que j’ai dit. » tu réponds, très sérieusement. « J’m’attendais juste pas à ce que tu viennes, c’est tout… » même si dans ton for intérieur t’étais sans doute à deux doigts de lui envoyer un message pour aller le voir. T’attrapes le casque qu’il te tend, tu le regardes avec un petit sourire. Ça te fait plaisir et à ce moment-là, t’es heureux qu’il n’ait pas fait le con, il a fait un pas vers toi, clairement. Tu l’enfiles et grimpes sur la moto. T’ose pas vraiment t’accrocher à lui, alors tu choppes les barres sur les côtés pour te tenir fermement. « On va où ? » tu demandes avant qu’il ne démarre. T’as hâte, en tout cas, même si t’appréhendes un peu de passer deux jours entiers avec lui, après votre petite altercation.

J'hausse un sourcil. « Bah why je viendrais pas? I told you we'd be going to la ferme, so we're going to the farm, right? » C'est pourtant simple, non? Et après on dit qu'c'est moi qu'a rien dans l'crâne, j'vous jure. Mais bon, au moins tu souris. « Ah, there's that smile que j'attendais. » Un p'tit clin d'oeil et un p'tit sourire de rendu plus tard, on s'met en route. À ta question, j'réponds un simple: « We're going to paradise, Teddy. Woohoo!!! » Et hop, c'est parti.

L'avantage de la moto, c'est que c'est pratique dans les embouteillages. J'essaie de pas aller trop vite pour pas que tu me vomisses dessus (et surtout parce que j'voudrais pas que tu crèves dans un accident d'la route à cause de moi – conduire vite quand j'suis tout seul, ça y'a pas d'soucis), mais une ou deux fois j'accélère quand même bien exprès, quand on est sur l'autoroute, que c'est clairement sans danger et que j'ai la certitude de pouvoir te filer la frousse quelques instants, juse pour déconner.

On arrive enfin à la ferme. J'arrête la moto, avant d'retirer mon casque. « Ça va, back there? » Si tu comptes vomir aies au moins la gentillesse de te tourner un peu steuplait' frère.

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Spoiler :

Tu hausses les épaules à sa réponse. « Parce qu’on s’est pris la tête par message. » et que de base tu n’avais pas envie de venir à cause de ça. Parce que Caleb peut se montrer particulièrement énervant quand on se va pas dans son sens, tout comme toi tu peux être très têtu quand tu le veux aussi. Mais tu ne peux pas t’empêcher de sourire et d’être content, surtout qu’au final, tu n’avais vraiment rien prévu du week-end. Tu envoies un rapide message à Ezra pour le prévenir, puis prends le casque et grimpes à l’arrière de la moto. Le trajet ne te semble pas être très loin, mais c’est probablement parce qu’être à moto est particulièrement divertissant. Même si tu tapes quelques petites frayeurs sur le chemin, c’est d’ailleurs pour ça que, lorsque Caleb accélère sur l’autoroute, tu t’autorises à l’attraper par la taille pour le tenir, histoire d’être plus stable.
Vous arrivez à la ferme, tu retires ton casque quand Caleb coupe le moteur. « Pourquoi ça n'irait pas ? » tu as toujours aimé la moto. Tu descends et observes l’endroit, vous n’êtes pas si loin de L.A et pourtant c’est dépaysant, ça te fait du bien. « T’as loué pour le week-end ? » t’es vraiment curieux de savoir comment il a pu se procurer cet endroit. « J’vais visiter. » tu cours à l’intérieur, prêt à découvrir cette immense ferme, t’as l’impression d’être dans un film et t’as déjà hâte.

« Close your eyes et inspire profondément, Teddy. Laisse la nature fill you up. » Et j'en fais de même. Mmmmh ce super parfum de foin, d'herbe et de bouses de vache. Impossible à répliquer: il faut le sentir pour le croire. « I don't know, frère, la moto c'est pas for everybody », je juge pas mais c'est vrai j'ai déjà connu des go qui voulaient pas grimper derrière moi dessus, et pas que parce que je les intéressais pas (même si j'avoue que c'est la cause principale des refus lol). « J'venais souvent here with mémé quand j'étais gosse », j'finis par expliquer, souriant légèrement en te voyant courir comme un gamin. Mon sourire s'efface cependant lorsque j'réalise un truc. « Wow wow what the fuck? » Il lui est arrivé quoi à la ferme des Cohen? On dirait une épave le truc. C'est quoi ce délire?!

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Spoiler :

Tu fais exactement ce qu’il te dit de faire. Tu fermes les yeux et inspires profondément l’air de la campagne. Bon, l’odeur n’est pas la meilleure que t’ai senti de toute ta vie, faut bien l’avouer, mais t’es quand même content d’être en pleine nature. « Moins pollué qu’à L.A c’est sûr. » tu remarques en souriant. Tu hausses les épaules à sa phrase, ça t’a toujours plu la moto, alors rien de bien flippant. Tu descends, prêt à découvrir l’endroit. Votre petite embrouille par sms semble bien lointaine. « Trop mignon. » tu dis, en te moquant un peu de lui, même si tu trouves ça cool qu’il se confie. Et alors que tu prends un pas bien assuré, tu te retrouves face à une ruine. Enfin… Presque. C’est probablement habitable, mais ça date au moins du siècle dernier. Et t’es presque un peu déçu. Toi qui croyais que Caleb avait réservé un superbe Airbnb, lit king size et tout ce qui s’ensuit. C’était ce à quoi tu étais habitué, en même temps. « C’est normal si on dirait que les marches du porche ne vont pas tenir si je grimpe dessus ? » tu demandes à Caleb, alors que tu t’avances prudemment vers ce qui ressemble plus à la maison hantée de Disneyland qu’à un paradis rural. Bon, l’endroit a du charme quand même. « En fait tu voulais qu’on fasse un urbex, c’est ça ? » Caleb a l’air aussi perdu que toi, pourtant.

tw: mention de décès

J'te tire la langue parce que t'es quand même bien con avec tes réflexions à deux balles. « Ça m'apprendra à tell you things », j'finis par grogner, avant de te suivre vers...

Oh non.

Mais pincez-moi, c'est quoi ce cauchemar, sérieux? « I... I don't get it... » J'suis tellement sapé que j'relève même pas ta réflexion sur l'urbex. Direct, j'me dirige vers la porte, avant de toquer. « Mister Cohen? It's me, Caleb. Edna and Raphael's kid. »

***

Assis sur une motte de foin, le regard vers l'est, l'esprit à l'ouest, j'rumine. Ça doit bien faire une heure que j'suis là en silence à regarder le bétail se chamailler. Madame Cohen est morte y'a deux ans. Apparemment c'était elle l'homme de la ferme puisque sans elle tout se casse la gueule. Son mari est une vraie épave, c'est à peine s'il savait qu'on était là. Et cette magnifique ferme, qui tombe en ruines... C'est minant, en vrai.

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Spoiler :

Tu t’attendais pas forcément à ce que les week-ends se transforment en moment déprime. Mais tu comprends Caleb et tu partages sa peine. L’excitation du moment a vite laissé place à une certaine tristesse. Il est parti s’asseoir au loin, sur une motte de foin, après avoir essayé de faire la conversation avec le vieux monsieur en deuil qui tenait l’endroit, t’as décidé de le rejoindre. « Hey… » tu lances, même si tu sais que tes tentatives de réconfort ne seront pas les meilleurs, t’aimerais au moins essayer de le faire penser à autre chose. Ou l’aider, t’en sais trop rien. « J’suis désolé… » tu t’assois à ses côtés. Tu regardes l’horizon aussi, l’endroit est magnifique. « On pourrait peut-être aider ce monsieur à se remettre sur la bonne voie ? Qu’il essaie de retaper cette ferme. » tu essaies d’être positif, mais en même temps, tu sais que c’est totalement irréalisable. Le pauvre se fait vieux, a l’air déprimé et n’a plus aucune raison de s’en sortir. Tu baisses la tête. « Si seulement quelqu’un avait pu reprendre la ferme… » tu souffles doucement. Un jeune, quelqu’un avec du dynamisme, qui aurait pu redonner à l’endroit une seconde vie. Tu donnes un petit coup d’épaule à Caleb pour essayer de le sortir de ses réflexions. « Tu veux qu’on rentre ? »

J'y crois pas. C'est comme... J'saurais pas expliquer. J'ai passé tellement de weekends, ici. Vécu tellement de choses. Bernard, représente, meilleur meilleur ami de tous les temps. J'arrive juste à croire que c'est terminé, comme ça. Plouf. « Yo », j'souffle enfin. Désolé frère, j'en avais presque oublié que t'étais là. Faut dire que quand j'suis contrarié j'me rappelle pas forcément de grand chose, tu vois. Mais quand tu fais ta proposition, finalement, j'me retourne sur toi brusquement. « What did you just say? » T'as fumé quoi, mec? T'as vu ce taudis? Même une armée arriverait pas à la remettre sur pieds, cette ferme. « Je... Sure, rentrons. » J'me relève d'un bond, avant de jeter un dernier regard à la ferme. « Sorry d'avoir gaspillé your time. » J'te trimballe jusqu'ici pour rien, finalement.

Le trajet de retour se fait en silence, mais pendant tout ce temps, les questions fusent dans ma tête: cette ferme peut-elle seulement être sauvée?

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