Il y a un peu d'alcool sur ta chemise mais ce n'est pas vraiment important parce qu'au moins, elle va bien. Vos yeux se rencontrent, s'apprivoisent, se domptent. Ses regards à elle nourrissent les tiens, leur déclarant des choses qui te feraient rougir si tu les avais entendues prononcées de vive voix. Mais il n'y a rien de vive voix, ce soir. Tout est dans le regard. Tu entends le son de son regard, tu perçois les caresses de ses yeux. Tu vis par tes cinq sens, ils vivent à travers elle, te font ressentir ces choses qui te forcent à te remettre en question.
Et si...?
Il faut l'avouer: tu avais toujours été assez curieux, comme garçon.
Et si, cette fois-ci, tu devrais essayer?
Avec une fille, avec une femme... Essayer d'aimer?
Et si c'était le moment, la bonne opportunité?
Celle qui te permettrait de découvrir le coït avec le sexe opposé?
Elle dépose son verre tandis que tu retiens sa main. Tu ne saurais expliquer pourquoi mais ce contact, ce regard... Il y a quelque chose. Tu as faim, tu as soif. Soif de connaissances. Faim des richesses qu'elle pourrait te faire découvrir. Les richesses de son âme, les reliefs de son corps... Tu t'y vois déjà, en réalité. Au dessus d'elle, en train de l'embrasser. Noyer son corps de caresses, mettre tes mains bien là où il faut, pour obtenir des soupirs, des gémissements. Le même scénario se peint devant toi que celui déjà vécu nombreuses fois par le passé. La seule différence, cependant, c'est que cette fois-ci, c'est une elle que tes lèvres brûlent de rencontrer. Tu ne sais pas trop comment ça marche, les seins, le vagin, le corps de la femme. Mais tu as envie de t'y essayer, de découvrir tout ça. Peut être que tu es bisexuel. Peut être que tu es juste curieux. Peut être que tu es hétérosexuel, aussi, en fait... Mais tout ça, tu ne pourras jamais le savoir tant que tu ne te seras pas lancé.
La bouche en coeur, tu l'observes, la dévisage. Tu te demandes si elle aussi l'a ressentie et vécue, cette connexion complice entre vos regards. Tu te demandes si elle aussi, curieuse, aurait envie de tenter. Elle te déclare qu'elle ne devrait peut être plus boire, te destinant un sourire charmeur qui fait fondre ton coeur en un millier de petits papillons bariolés. Tu commences un peu à saliver, tu as du mal à te concentrer, à focaliser tes idées. Elle est tellement belle... Comme les poupées avec lesquelles tu jouais lorsque tu étais petit. Tu les coiffais, tu les habillais. Les déshabillais. Les rhabillait à nouveau. Tu les adorais, tes poupées. Elle aussi, tu as envie de la déshabiller. Voir le corps nu, qui, inévitablement, sera différent de celui des poupées. Ton rire cristallin essaie de chanter à ses oreilles, de les charmer, de les séduire avec les échos de ton île, la Sicile. Ton regard, tendre, attendri, attendrissant, dans ses yeux, se dépose, s'ancre, se noie... Et tu lui réponds, dans un sourire.
– Si tu vas bien, alors tout va bien.
Elle est vraiment belle, cette fille du Coachella. Tu te demandes pourquoi tu ne l'avais jamais remarquée avant. Lorsqu'elle te remercie de l'avoir rattrapée, tes joues virent un peu au rouge. Oui, tu es timide, mais ça, ce n'est pas elle qui l'aurait inventé. Tu avais toujours été timide avec les gens qui t'impressionnaient. Et dire qu'elle t'impressionne relèverait de l'absurde tant il s'agit d'une évidence à tes yeux.
– Je... Ce n'est rien. Tu es timide. Excité. Tu as l'impression qu'elle s'intéresse à toi et cela te fait rougir un peu, davantage. Tu aimes cette attention qu'elle te prête. Tu aimes ce regard qu'elle pose sur toi, impunément. Tu aimes sa candeur, sa fugacité. Tu as envie de les rattraper, les papillons de ton coeur, afin d'en faire un collier et de le lui offrir. En bas, dans ton pantalon, tu le sens, ce feu qui commence, le feu de l'excitation, le feu de tes ardeurs, le feu qui commence chaleureusement à brûler, d'un éclat neuf, renouvelé, impatient. Tu... Wow. Tu n'avais jamais ressenti ça avant, jamais comme ça, pour une elle. Habituellement, c'était les ils qui retiraient ton attention, valaient des regards de ta part et réclamaient l'intégralité de ton désir et de ton affection. Et désir et affection, tu leur distribuais, allègrement et généreusement. Aujourd'hui, cependant... C'est une elle que tu as envie de séduire. Tu ne sais ni pourquoi, ni comment, et c'est bien ce qui te laisse autant sans voix. Tu as l'impression d'avoir cinq ans à nouveau. Le petit garçon pâteux qui zozote et qui offre une fleur à la première fille qu'il voit dans la cour de récréation. "Tu veux être mon amoureuse?" Le refus rieur de cette petite fille, tu ne l'oublieras jamais.
Mais tu n'as plus cinq ans et elle, ce n'est pas une petite fille. Tu as envie de faire des choses. Tester des choses. Des expériences. Tu as envie... D'autre chose. Tu es conscient de ce que cela veut dire. Que les choses se feront différemment. Qu'elle ne pourra pas te satisfaire comme un homme te satisfait. Mais l'espace d'une nuit, tu tentes d'oublier, le plaisir carnassier éprouvé entre leurs mains... L'espace d'une nuit, tu tentes d'être autre chose. Quelqu'un d'autre. Le preux chevalier, à l'opposé de la demoiselle en détresse que tu adores pourtant si souvent incarner. Elle te promet alors un "restant de soirée génial". Ton sourcil s'arque, enjoué, remarquant au passage le léger changement comportemental dont elle semble être victime. Ou plutôt, l'instigatrice. C'est une Alice plus séduisante que toutes femmes ayant jamais vécu qui se présente à présent à toi. Tu réponds timidement, mais enjoué malgré tout.
– Oh... J'accepte cette récompense avec plaisir.
Tes doigts descendent alors le long de son bras, de façon timide mais osée malgré tout. Ton regard suit le tracé de ta main alors que ceux-si se mêlent à ceux de sa main, aux siens. Puis, ton regard se relève, légèrement aguiché, légèrement aguicheur. Ta bouche s'entrouvre et tu lui lances ce regard interrogateur. Tu aimerais qu'elle t'emmène ailleurs. Loin d'ici, loin de tout. Loin de la musique enivrante et de la symphonie entêtante. Tu aimerais pouvoir te perdre, avec elle, ailleurs. Tu aimerais lui faire l'amour. De tout coeur, de tout bonheur.
– Would you like to go elsewhere? Tu lui demandes alors, entre deux chansons. Tes doigts, tu ne les lâche pas. Ta main chaude et chaleureuse s'y accrochant comme une promesse ensoleillée.
extensionauto_awesomeac_unitvolunteer_activism