Un sourire sur les lèvres malgré tout, Adélaïde n'en tenait pas rigueur à Lola. Elle pourrait, clairement, elle pourrait. Etre celle qu'elle avait été, celle qui se vexe, qui enfonce des portes ouvertes. Celle qui se braque et rejette. Elle aurait pu être ainsi et se barrer de l'atelier de la galerie telle une drama queen qu'elle adore être avec Andreas par exemple. Mais présentement, elle n'en avait pas envie. Si Lola ne voulait pas de chemisier, elle n'en aurait pas et tant pis. Il n'y avait pas de quoi en faire tout un plat comme on dit et Adélaïde saurait très bien se contenter d'un portrait comme cadeau. « Disons que je me débrouille. » Sur sa toile vierge, les premiers traits naissaient, les premières prémices de l'oeuvre - si c'est ainsi qu'on pouvait l'appeler - noircissaient l'immaculée. Soudainement, le sourire de Sullivan disparaîsaitt. La concentration prenait la place de la bonne humeur, ses yeux dérivant sur la toile, puis sur Lola, puis de nouveau sur la toile. Elle voulait quelque chose de réaliste mais aussi assez rapide. Lola l'avait avoué elle-même, elle n'était pas spécialement douée pour le modelage, conclusion: son pot en terre allait être vite fait. Adélaïde ne devait pas perdre de temps. Elle ne voulait pas que Lola finisse trop vite, trop longtemps avant elle pour éviter de la gêner. Elle savait combien parfois cela peut être très gênant très regardée, observée, carrément détaillée.
Ca prenait forme, doucement mais sûrement. Adélaïde tentait de ne pas trop jouer avec les contrastes de couleur, un passage obligé pour éviter d'y passer trop de temps. Elle se contentait du minimum, du plus rapide. Elle lui inventait même un couvre-chef, une technique classique pour éviter de passer trop de temps sur le détail des cheveux. A vrai dire, elle ne savait pas vraiment depuis combien de temps elle la peignait, mais elle savait une chose. Lola était d'une beauté fascinante! Pour sûr qu'elle se rappellerait de son visage et qu'elle pourrait la dessiner de nouveau dans son coin, la mettre en scène dans ses pensées et la coucher sur le papier. Adélaïde était sensible à tout ça, et ça se voyait. A cette concentration, à ses yeux pétillant dès l'instant où elle posait ses pupilles sur Lola. « Presque. » Encore quelques minutes, elle ne saurait vraiment dire combien, avant qu'elle ne lâche son pinceau et s'éloigne de la toile, l'observant d'un peu plus loin. Satisfaite, pas totalement mais la ressemblance était assez frappante pour qu'elle puisse dire quelques mots. « Je crois que j'ai réussi mais je peux mieux faire. » Disait-elle en tournant la toile vers Lola afin de lui exposer son tableau qui, elle l'espérait, sécherait assez vite pour qu'elle puisse l'emmener. « Qu'est-ce que tu penses d'aller se laver un peu? » demandait-elle en désignant un grand lavabo à plusieurs robinets qui se trouvait là à cet effet. Quitte à ne pas racheter de fringues, autant faire en sorte d'être plus propres quand même.
she feels safe in |