Beautiful Ghost • Joia

Je rejette violemment sa main lorsqu’elle agrippe la mienne avant de me tourner vers elle en la fixant méchamment. Arrêtez avec ce prénom, oubliez-le, oubliez-moi. Tu comprends pas que je le déteste maintenant ? Park Shin-hyuk, parce que j’étais ça… Parce que je suis ça, ma famille a été tué, maintenant, mes proches sont en danger… Pourquoi l’univers me fout face à elle maintenant hein ? Si vous avez envie que je me déteste, que j’ai peur, que je perde pieds, c’est déjà le cas. « Andwae ! (Non) » Je recule jusqu’à toucher un mur en tremblant. J’ai les larmes qui montent. Elle est morte, ma Hyun-Ae, elle est morte. Elle est morte depuis plus de 20 ans. « Shireo ! GGeojyeo ! (Je ne veux pas, dégage) » Arrête, arrêtez, j’en peux plus d’être torturé. Je lui crie dessus, je m’en rends compte. Elle a grandi, mais elle a toujours la même tête. Elle ressemble à Eomma (maman). Pourquoi ça ? Pourquoi maintenant ? C’est juste… Je la regarde encore avant de me laisser glisser le long du mur, jambe contre le torse. J’en tremble. Elle était morte. J’ai entendu crier, hurler. « Les poignées étaient trop chaudes… » J’ai essayé. « J’ai voulu ouvrir les portes… » J’ai vraiment essayé… « Oh mon dieu… » Et j’éclate en sanglots comme un gosse.

Je voulais qu’il reste, je voulais savoir si c’était bien lui. Je n’arrive pas à y croire mais l’impossible peut devenir possible quand on y croit. Je veux y croire… il lui ressemble tellement que je peux y croire. Cependant, je ne m’attendais pas à ce qu’il me repousse. Le refus de la réalité qui nous frappe. Je l’observe sans pouvoir rien faire pour l’aider. Désarmée…

Ses mots me surprennent qu’à moitié. Est-ce vraiment lui ? Des poignées brûlantes, enfermés dans la maison. Je n’y étais pas. C’est comme s’il parlait des détails d’un incendie… de l’intérieur… comme s’il en avait connu un. Il se met à pleurer, je n’ose même pas laisser aller mes larmes. Je ne voulais pas céder, j’ai envie d’être forte. La situation demande un sang-froid extrême pour ne plus céder même si c’est meilleur dehors que dedans.

Si c’est lui, si c’est Shin-Hyuk… je me devais de m’occuper de lui…

Parce qu’il y a une évidence… je n’arrive pas encore à réaliser que « Joshua » serait … mon petit-frère ? Mais comment est-ce possible ? La maison était en feu… Les pompiers, tout ça… Je comprends sa peine, j’ai vécu la même chose. Je ne pensais pas qu’il… avait survécu.

J’inspire lentement pour retrouver mes esprits. Joshua a besoin de moi, il pleure et je ne fais rien. Même si ce n’était pas mon petit-frère, je devrais être là pour lui… Je me souviens dans mon enfance de ce moment où mon petit frère pleurait. La raison à l’époque m’échappe, pas le souvenir. Il était encore un bébé, je n’avais que six ans à cette époque, mais je m’en souviens comment j’ai pu le réconforter.

Je peux le refaire ?

Lentement, je me rapproche de « Joshua » pour m’accroupir à ses côtés. Je dépose un baiser sur son front avant d’enlacer ses épaules. « Dongsaeng ? (Petit-frère ?) » Je resserre un peu mon emprise pour qu’il ne me repousse pas : « Jaljinalkeoyeyo … (ça va aller… ) »

Mais je voulais être sûre. « Shin-Hyuk, c’est vraiment toi ? » Mes lèvres tremblent…

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Dongsaeng, un mot que je n’ai pas entendu depuis tellement, tellement de temps. J’aimais bien quand Hyun-ae et mon frère m’appeler comme ça. J’ai si peu de souvenir d’eux. Des brides, rien de plus. J’étais petit. Pourtant, parfois, une odeur, un rire, quelque chose me revient en mémoire d’un coup et c’est comme d’être de nouveau avec eux. Je ne peux pas l’expliquer, c’est juste comme ça. Je crois… Je ne suis pas sûr que j’aurai pu reconnaître son visage mais son regard n’a pas changé. Il est toujours aussi espiègle. Ça va aller, ça va aller. Si le gouvernement nord-coréen lui fout la main dessus, non, ça n’ira absolument pas. Je dois la prévenir de ça. Ils m’ont déjà eu moi. Elle redit mon prénom, je frissonne à nouveau avant d’essuyer mes yeux rapidement pour redevenir un homme, un vrai, j’ai trop de fierté (ou d’orgueil) pour pleurer encore et mes jambes me poussent à me lever pour la regarder. J’attrape ses mains. « Ne… Hyun-Ae. » Je vois bien le déclic dans son regard. « ça fait longtemps qu’on t’a pas appelé comme ça hein Noona ? » Je soupire un peu avant de regarder autour de nous, puis de l’entraîner dans un coin un peu plus sombre. « Hyun-ae. Il ne faut pas qu’on sache pour nous deux. » Je la regarde dans les yeux, attristé. « Le gouvernement nord-coréen… Je les ai sur le dos à cause de Maman. Elle vient de là-bas visiblement, elle avait des dettes, j’ai rien compris à ce qu’ils m’ont dit, mais je veux pas que tu tombes aussi dans leurs filets. » Un ça suffit. « S’ils savent qu’un autre descendant est resté en vie, tu les auras aussi sur le dos. C’est pas comme un gang ou une mafia. C’est bien pire que ça. » Avoir un pays contre soit c’est pas de tout repos. « Pour le moment, il faut qu’on garde cette découverte pour nous ? Tu comprends ? T’es la première à qui j’en parle, ils ont des yeux partout. Téléphone, internet, vie privée. J’ai beau avoir tout sécurisé chez moi, j’ai quand même été attrapé. » Je tiens ses mains fermement. « J’t’en prie, écoute et sois prudente. Ça ne sert à rien de jouer les superhéros avec eux. » Pas pour le moment en tout cas. « Je suis content de voir que tu as survécu à l’incendie… Tu as eu une bonne famille ? »

Je souris tendrement en l’écoutant. Tout ce bien-être qui me traverse rien qu’à l’avoir contre moi, qu’à l’entendre. Je crois que je n’ai pas vécu de plus beau souvenir dans ma vie. C’est juste bon et j’ai envie d’en profiter parce que je ne veux pas souffrir à nouveau de sa perte. Je veux pouvoir faire tellement de choses avec Joshua, le redécouvrir, le chérir pour le rattraper toutes les années. Je ris quand il parle de cette appellation que je ne pensais pas entendre… « Oui, ça fait du bien… » Toujours près de lui, je l’observe et est surprise qu’il nous emmène à l’écart. Que se passe-t-il ? Je l’observe, inquisitrice. Jusqu’à ce que je me sente déboussoler. Il ne veut pas qu’on sache… mais… pourquoi ? « Mais… après… je… » Je n’arrive pas à comprendre, à aligner une phrase alors qu’il continue à nouveau. Il m’explique alors que le passé le rattrape, le passé de notre famille. De notre mère précisément. Je me mords la lèvre en apprenant qu’il y a une sale affaire. A vrai dire, je n’ai pas peur. Je pousse un long soupir en acquiesçant même si je n’ai pas abandonné l’histoire pour autant : « D’accord, je ferais attention. Mais ne penses pas que je ne ferais rien pour toi ! Dongsaeng… » Je soupire. J’étais si heureuse de retrouver un membre de ma famille, mon frère, pas un cousin ou une tierce personne, mon frère que je croyais mort. J’ai tellement espéré pendant quelques secondes de partager mon bonheur avec le monde entier. Je pose ma main sur sa joue en le regardant tendrement : « Disons que ma famille proche est géniale. Mon père adoptif est un homme très gentil et je n’ai jamais rien manqué… » En même temps, vu l’immense richesse de la famille, ça n’étonnera personne. Cependant, ça m’ennuie de m’étaler dans cet endroit, je ne sais pas qui pourrait surprendre notre conversation. « On pourrait parler dans un endroit sûr, si tu veux bien ? Je… Je possède un complexe hôtelier à Santa Monica, le Ryokan Club, tu demandes Gia Leonetti… passes me voir dès que possible. On parlera de tout et en sécurité. D’accord ? » Je le regarde plusieurs secondes avant de fondre et de le serrer contre moi. Putain… j’ai encore du mal à y croire. Un seul regard m’a suffi pour le reconnaitre, comme si c’était hier que l’on était réuni tous les deux.

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Elle est aussi tête de bois que moi. C’est un bon signe, ça prouve qu’elle est bien ma Hyun-Ae après tout. Elle m’a manqué, je me rends compte maintenant. J’avais un peu occulté tout ça pour ne pas trop vivre dans le passé et être malheureux de ça, mais oui, elle m’a franchement manqué. Je souris un peu en voyant sa détermination avant de hocher faiblement la tête. Je suis content, elle a eu une bonne famille, moi aussi. Dans notre malheur, on a eu une certaine chance comparé aux autres. C’est vraiment un soulagement. « On pourrait parler dans un endroit sûr, si tu veux bien ? Je… Je possède un complexe hôtelier à Santa Monica, le Ryokan Club, tu demandes Gia Leonetti… passes me voir dès que possible. On parlera de tout et en sécurité. D’accord ? » C’est vrai que là-bas, ils n’auront jamais de prises, d’espions. Je peux bien aller me détendre quelque part sans qu’ils me suivent non ? C’est à en devenir parano toute cette histoire, je me demande comment je vais m’en sortir. « Je viendrai. D’ici quelques jours. » J’essaierai. Je regarde l’étage, puis elle. « Retourne à la fête Hyun-Ae. » Je n’arrive pas l’appeler autrement. Je l’ai toujours connu comme ça. « Je vais rentrer, c’est mieux qu’on se sépare là pour ce soir. » Il faut que je réfléchisse à tout ça calmement. « Fais attention à toi d’accord ? » Un baiser sur sa joue et je souris avant de partir dans les escaliers, encore chamboulé. Avant d’arriver à la voiture, j’envoie un message à Owen pour m’excuser.