@Noah J. Adams alerte au pavé
Mon souffle se coince dans ma gorge, une onde d'appréhension monte en moi, et je me sens comme une biche prise dans les phares d'une voiture. Mes paumes deviennent moites, mes doigts serrant mes clés comme si elles étaient une bouée de sauvetage. Un soupir échappe de mes lèvres, faible et tremblant, un murmure à peine audible au milieu de la tempête qui se déchaîne en moi. Ses mots s'insinuent dans ma conscience, un écho lointain de souvenirs que j'ai cru oubliés. Mon esprit tourbillonne, cherchant à saisir les fils fragiles du passé qui se sont soudainement rattachés à moi. Un fragment de mémoire émerge, une image floue d'un petit garçon aux boucles brunes riant. Un rayon doré de soleil caresse le jardin de notre maison, créant des ombres douces et chaleureuses sur l'herbe fraîche. Nous jouons, insouciants, nos mains agrippant des jouets en plastique coloré. Ses yeux pétillants de malice reflètent la pureté enfantine. Les rires résonnent, une symphonie de joie et d'innocence qui remplit l'air.
Ai-je déjà vu cet homme quelque part ? Dans un rêve peut-être, ou dans les recoins nébuleux de ma mémoire ? Mais ses mots continuent de flotter, une mélodie discordante dans l'air stagnant. Mon père… malade? Le souffle du passé se fait plus insistant. Mon cœur se serre, la douleur de l'inquiétude éveillant des échos d'affection et de souvenirs partagés.
Un frisson parcourt mon échine alors que ses paroles se déversent comme une cascade tumultueuse. Il veut me voir. Les rires joyeux d'une soirée de famille surgissent dans ma mémoire, une image de moi, plus jeune et insouciante, une témérité candide. La table de famille est dressée, une scène qui devrait être empreinte de rires et de partage. Mon cœur bat plus vite, l'anxiété tapissant les parois de mon estomac. « Maman, papa, il y a quelque chose que je dois vous dire... » Mon souffle est presque coupé, l'air devient lourd, chargé de tension. Mon annonce plane dans l'air, comme une feuille fragile portée par le vent. Les sourires s'effacent, remplacés par des regards incrédules, des murmures qui montent comme un orage lointain. Et puis, les paroles acerbes, tranchantes comme des couteaux, percent l'atmosphère tendue. « Gay? Il n’y a pas de ça chez nous. Tu es malade, Talya. » Le dégoût dans les yeux de ceux qui m’ont faite naître me retournent l’estomac. « Ce n’est pas normal. Tu n’es pas normale. Ce que tu ressens, c'est une erreur. » Les paroles cinglantes de mon père percent mon cœur comme des pics de glace. Je revis le moment où j'ai osé dévoiler mon identité, seulement pour être confrontée à une violence verbale qui laisse des cicatrices invisibles mais profondes. « Papa, je suis qui je suis, et rien ni personne ne pourra me changer. »
Mon père, le visage crispé par une détermination implacable, me conduit vers un endroit que je ne peux qu'imaginer être une épave de cauchemar. Le camp de thérapie de conversion. Les murs sont froids, les regards scrutateurs. Le sentiment d'être pris au piège dans un endroit où tout ce que je suis, ma véritable essence, doit être réprimé, éradiqué. « C'est pour ton bien, Talya » dit mon père d'une voix presque inexpressive, comme s'il essayait de se convaincre lui-même de la justesse de ses actes.
Un autre flash-back, une scène douloureuse qui refuse de se dérober à ma mémoire. Mon père, le visage crispé par une détermination implacable, me conduit vers un endroit que je ne peux qu'imaginer être une épave de cauchemar. Le camp de thérapie de conversion. Les murs sont froids, les regards méchants. Le sentiment d'être pris au piège dans un endroit où tout ce que je suis, ma véritable essence, doit être réprimé, éradiqué. « C'est pour ton bien, Talya » it mon père d'une voix presque inexpressive, comme s'il essayait de se convaincre lui-même de la justesse de ses actes. « Je t’en supplie… ne me laisse pas ici… j’ai peur… » L'odeur clinique de l'établissement se mêle à l'odeur de mon propre désarroi. Mon père me conduit, son visage une toile d'émotions contradictoires que je ne peux pas décrypter. « Tu as besoin d'être guérie, Talya. Guérie de cette maladie qui te ronge. » Ses paroles, empoisonnées de mépris, résonnent dans le silence glacial. Les murs blancs semblent se refermer sur moi, une prison froide et implacable. Les larmes coulent le long de mes joues alors que je suis conduite vers l'inconnu, vers une thérapie qui ne vise qu'à briser mon identité, à me plier à un modèle de normalité que je ne peux accepter.
Le jeûne, les heures interminables de course jusqu'à l'épuisement, comme si nos corps étaient réduits à de simples machines dépourvues de volonté propre. L'huile d'onction, qu’on devait avaler avec répugnance, censée laver nos péchés de l'intérieur, comme si l'homosexualité pouvait être éradiquée par une potion magique. Les exorcismes, séances d'agonie où nos voix se brisaient sous la contrainte, où nos cris désespérés se mélangeaient à la cacophonie des hurlements. Les visages tordus de douleur, les yeux écarquillés d'effroi, nous étions poussés au-delà de nos limites, contraints de vomir nos doutes, comme si le démon lui-même se cachait dans les recoins sombres de notre être. Chaque séance laissait une empreinte indélébile, un cauchemar qui persistait bien après que les lumières se soient éteintes. Les insultes, les menaces, les humiliations perfides qui brisaient nos âmes autant que nos corps. Les anxiolytiques administrés de force pour étouffer notre résistance, transformant nos esprits en un brouillard épais de résignation et de confusion. Les humiliations physiques, conçues pour détruire toute trace de dignité, pour que nous renoncions à ce qui nous restait de nous-mêmes… tout était là, enfoui juste ici. Caché sous ce drap. La simple évocation de mon paternel faisait tout remonter à la surface comme le tourbillon de merde qu’il avait engendré.
J’ai du mal à respirer. Je me sens faiblir. « Je… Ça fait bien longtemps que je n’ai plus de père... Tu dois te tromper de personne. » Mes mots sonne comme des éclats de verre, éclatant la façade calme que j'ai si soigneusement construite. Mes mains tremblent légèrement, mon cœur tambourine dans ma poitrine. Les souvenirs, comme des fantômes tourmentés menacent de m'engloutir. Mon souffle devient court et saccadé, une sensation d'oppression se forme dans ma poitrine, comme si un poids invisible s'était abattu sur moi. La réalité se brouille. Les rires enfantins, les paroles violentes de mes parents, les couloirs froids – tout cela se fond en un kaléidoscope infernal qui danse devant mes yeux fermés. Mon souffle se transforme en halètement, ma poitrine se soulève et s'abaisse avec frénésie alors que je lutte pour retrouver une once de contrôle.
Mon corps entier vibre sous l'effet de l'angoisse qui me submerge, comme une tempête dévastatrice qui déchire tout sur son passage. Mes jambes me lâchent, comme coupées du tronc. Je m’effondre sur les trois marches qui me séparent de la porte.
Des larmes brûlantes s'échappent de mes prunelles, glissant le long de mes joues pour se perdre dans l'océan de ma peine.
Tout autour de moi devient flou, indistinct, comme si la réalité elle-même se retirait pour me laisser seule, vulnérable, démunie, à la merci de forces invisibles qui semblent me déchirer de l'intérieur.
Respire.
Respire.
Respire.