pretend like nothing happened · miles & rye

3 Mars 2023

Il toque à la porte, discrètement.[1][11]
_____

[1]Pour ne pas déranger.[2]
[2]Car il sait qu'elle sera dérangée.[3]
[3]Et pourtant, cela ne l'incite pas à rebrousser chemin, bien qu'il soit légèrement tenté de le faire.[4]
[4]Si Riley hésite à faire demi-tour[5], c'est parce qu'il n'aime pas particulièrement les confrontations.
[5]S'il ne le fait pas, c'est parce qu'il reste encore sous le choc du décès de Dash. Et qu'il désire donc rester à Los Angeles.[6][7]
[6]Premièrement, pour réellement avoir le temps de faire son deuil.
[7]Mais surtout, parce qu'il fait un transfert émotionnel malsain sur sa soeur, Miley.[8]
[8]En effet, maintenant que Dash n'est plus de ce monde, Riley est persuadé qu'il doit se rapprocher d'elle par tous les moyens, afin de tenter de panser les plaies du passé. Leurs parents le leur avait toujours répété: « la famille, c'est sacré ».

Le bruit de la bouilloire qui siffle. La journée avait été longue. Très très longue. Il y avait plus fun que de voir le cercueil rose fluo contenant le corps de son petit frère brûler. Surtout entourée étouffée par les parents Lockwood et par Riley. Heureusement chacun avait du retourner à ses obligations à Toronto. J’allais enfin pouvoir souffler un peu. Être tranquille. Ouf. Trop de circonvolutions et de preuves d’amour pathétiques pour une seule journée.

Lovée sur le canapé avec ma tasse de thé et j’en part du gâteau de mortiversaire d’Ashley, je m’apprêtais à écrire un nouveau billet sur mon blog. Un toc toc résonne entre les murs dans l’appartement. Ça doit être à côté, pensais-je naïvement. Qui donc sonne chez moi sinon? Je reste enfoncée dans le sofa, grignotant le cake d’une main et tapotant les premiers mots sur mon clavier de l’autre. Pourquoi ces tocs tocs distants ne s’arrêtent pas? Le voisin n’est pas là ou quoi? Je fixe la porte comme si mes yeux verts pouvaient la faire fondre. Je lève les yeux au ciel en maugréant contre l’univers et me décide à vérifier si ce n’est pas chez moi qu’on tape à la porte.

J’ouvre brusquement la porte. Sursaut d’horreur. Lui? « Riley? » Bordel mais qu’est-ce qu’il fout ici? « Tu es pas dans l’avion? Je reste dans l’encadrement de la porte, sans prendre la peine de l’inviter à entrer. Je n’avais pas prévu de jouer les gentilles hôtesses polies là. Flemme.

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[11]Lorsque la porte ne s'ouvre pas, il attend là, un peu bêtement, avant de tenter une deuxième fois.[12] Son visage semble particulièrement gêné et embarrassé lorsque sa soeur lui ouvre la porte.[14] « Salut Miles. »[15], se contente-t-il de répondre à l'interrogation de celle-ci. À la deuxième question de sa soeur, Riley ne perd pas une seconde en hésitations. Il aurait pu jouer le « mâle alpha », macho et stoïque, incapable d'exprimer des sentiments.[16] Au lieu de cela, il se contente de se livrer, avec toute l'honnêteté et la sincérité qui font tout son charme[17]. « Je ... Je n'ai pas réussi à embarquer. »[18] « Est-ce que je peux entrer? »[19]
___

[12]Il attend bien deux minutes avant de le faire, ce n'est pas un sauvage.[13]
[13]En attendant, il commence à se demander si Miley ne serait pas de sortie, ce soir là, avant de se décider à tenter une deuxième fois tout de même: qui ne tente rien n'a rien.
[14]Et l'horreur qui se lit indéniablement sur le visage de sa cadette ne fait rien pour le rassurer.
[15]Un surnom que Miley déteste très certainement depuis sa jeunesse mais que Riley a si rapidement pris l'habitude à employer qu'elle a fini par accepter son destin, à contre-coeur. Si ce sobriquet continue de lui être insupportable, Riley a depuis longtemps oublié qu'elle avait des objections quant à son emploi: il devait bien avoir six ans lorsqu'il avait décidé de l'appeler comme ça pour la taquiner, et la mauvaise habitude s'était ancrée depuis de manière indélébile.
[16]C'est totalement faux: Riley ne pourrait jamais jouer ce rôle de façon convaincante, ce n'est tout simplement pas lui.
[17]Ou, aux yeux de sa soeur, toute sa répugnance.
[18]Ce n'est pas parce qu'il est sincère qu'il ressent pour autant le besoin de s'épancher sur ses ressentis. Ça, c'était plutôt le territoire de leur mère. Et du petit Ashley. Ce pauvre petit Ashley... Puisse-t-il reposer en paix.
[19]Habituellement, Riley n'est pas aussi autoritaire et sans-gène, de sorte à s'imposer chez les autres. Mais les circonstances sont particulièrement inhabituelles. Se référer à [19a] et à [19b].
[19a]Riley est en deuil, ne l'oublions pas.
[19b]Il s'agit quand même de sa soeur. Celle avec qui il partageait sa baignoire, gamin, et qui a été témoin à la mue de sa voix et à ses boutons d'acné. Les protocoles sociaux habituels ne s'appliquent pas en ce genre de contextes.

Soupir extrême. Même pas masqué. Zéro effort. Je le dévisage comme si je ne l’avais pas vu depuis dix ans. Ce qui était à une crémation près vrai. Comment ça? Comment ça pas pu embarquer? « Que? Quoi t’as perdu ton passeport? Comment ça pas pu embarquer? Oh non non je ne la sens pas l’histoire… à tous les coups il va me demander à squat- « Est-ce que je peux entrer?» Bingo! Il avait fallu qu’Ashley décidé d’emménager à LA. Il aurait pu décider de couler ses derniers jours heureux à Hawaï ou aux Îles Canaries…. Mais non il avait préféré l’eldorado loin des siens de sa sœur… m’obligeant au passage - même s’il n’était plus là, à me farcir le grand frère modèle.

Est-ce qu’on peut dire non à un frère en deuil? Ses petits yeux de chien battus me font pitié. « Non. Sorry. Ciao. » . Alors je suis obligée de prendre sur moi. Même dans un jour comme aujourd’hui. Foutu Riley. « Euhm… je suppose que tu peux. » Bon est-ce que c’était vraiment une invitation? Not really. J’entrouvre la porte un peu plus pour le laisser passer. « Ils savent que tu es ici? « ils », les insupportables parents Lockwood évidement. Pourvu qu’ils ne viennent pas en prétendant une pénurie de kérosène ou je ne sais quelle connerie.

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À la question de Miley, Riley se contente de tristement hocher son visage de gauche à droite. « Non, non, j'ai bien mon passeport... » Se contente-t-il de répondre, avec tristesse. Sa voix se fissure un peu sur la fin, alors que ses yeux s'humidifient.[20] « C'est Dash » souffle-t-il finalement, les yeux rougis par les larmes. « Je... J'arrive juste pas à croire qu'il est p...parti... »[21] Il se mord alors la lèvre, avant d'inspirer profondément.[22] Lorsque Miley accepte sa demande d'asile, la gratitude dans sa voix est si sincère qu'elle en est touchante.[23] « Merci, Miles. Tu es vraiment... La meilleure des soeurs. » Riley ne peut pas retenir le sanglot qui s'échappe d'entre ses lèvres en prononçant ces mots. Il réalise à quel point il était chanceux, et à quel point il avait été aveuglé par sa propre chance: il avait un merveilleux frère, et une merveilleuse soeur. Mais Ashley était mort, à présent. Et il ne lui restait plus que la merveilleuse soeur.[24] « Je suis désolé... Je ne sais pas ce qu'il me prend », finit-il tout de même par se rattraper, avant de sortir un mouchoir[25] de sa poche et de se moucher bruyamment. Face à la dernière question de sa cadette, le brun redresse ses yeux de chat potté vers la journaliste avant d'abaisser son regard. « Oui... Je les ai appelé il y a cinq minutes. »[26]
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[20]Contrairement aux « mâles alphas » autoproclamés, Riley est un véritable Homme, dans le sens universel synonyme du mot « humain »[20b].
[20b]Dans ce contexte là, un véritable Homme (ou humain), c'est une personne dotée de véritables sentiments, qui se trouve également capable de les exprimer de façon saine et équilibrée[20c].
[20c]Si cela semble être tout le contraire de Miley, c'est également normal: elle, c'est une véritable Connasse, avec un C majuscule[20d].
[20d]Ceci est le point de vue du narrateur, et non pas du personnage. Riley est bien trop adorable pour pouvoir avoir de pensées si odieuses.
[21]Si vous doutez de la sincérité de ses paroles, ce narrateur vous conseille tout simplement de regarder (ou plutôt, d'imaginer) son visage de labrador apeuré, les yeux bouffis et luisant de larmes. Cette vision suffirait amplement à effacer tout doute à ce sujet.
[22]Ce n'est pas que Riley ne s'assume pas suffisamment pour s'autoriser à pleurer: c'est qu'il se retient de le faire par respect pour Miley.[22b]
[22b]S'il a beau ne jamais comprendre sa soeur, malgré tous ses efforts, il la connaît au moins mieux qu'elle ne le pense.[22c]
[22c]Dans ce contexte, cela veut dire qu'il la connait assez bien pour savoir que les larmes lui sont insupportables.
[23]Pour les lecteurs qui partagent la même personnalité que Miley, il est conseillé de remplacer le mot « touchante » par le mot « nauséabonde ».
[24]Pour clarification, il n'y a probablement que Riley qui serait capable de décrire Miley comme étant « merveilleuse » sans ironie. Et c'est bien pour ça qu'on l'aime!
[25]Propre, bien évidemment, Riley n'est pas un porc voyons!
[26]Évidemment qu'il avait appelé leurs parents! Pour qui le prenait-elle, un monstre?[26b]
[26b]Encore une fois, il s'agit là d'un commentaire de la part du narrateur. Riley est toujours bien trop gentil (et surtout, endeuillé) pour se permettre de pareilles pensées.

Qu’est-ce qu’il fout avec sa voix tremblante? Oh la. Oh lala. Ça ne sent pas bon. Il va quand même pas pleurer? Non pas que j’ai une aversion pour les larmes hein - j’en versae moi même beaucoup devant les épisodes de ma série préférée - mais si Riley pleurait j’allais devoir le consoler et j’avais beau être « la meilleure des sœurs » je n’étais pas la plus chaleureuse. Consoler mon frère pour la mort de mon autre frère n’était pas vraiment prévu au programme de ce soir.

Allez Miley. Sois gentille. Tu peux le faire. « Ah … oui… Dash. » Je souffle comme si ça ne m’avait pas traversé l’esprit que ce soit la raison de son chagrin. Riley avait toujours été plus sensible. Bon … et puis lui il n’avait pas eu des mois et des mois pour se préparer au grand départ du dernier né des Lockwood. Je regarde le bleu des yeux de mon aîné avec une légère inquiétude. Pleure pas Riley. Pleure pas. Et bah ça y est. Il chiale. On touche le fond. Je soupire faiblement. Ce n’est pas vraiment de sa faute s’il est autant affecté. Ils étaient proches tous les deux. Plus proches qu’ils ne l’étaient de moi.

Riley se mouche tel un éléphant , désespéré. J’ai beau ne pas avoir autant de tristesse dans mon âme, je n’aime pas le voir comme ça. Pas vraiment du genre tactile, j’aurais pu lui faire un câlin mais c’était vraiment au-dessus de mes forces . J’ai préféré une petite tape fraternelle sur l’omoplate. Une petite deuxième, allez, soyons fous. « Allez. Ça va aller. Ne t’inquiète pas.» En vrai ça n’allait pas aller. Mais qu’est-ce que je pouvais bien lui dire d’autre. Ma petite sacrée de Birmanie, qui passe dans l’entrée, vient ronronner en se frottant sur les tibias de mon frère. Il semblerait qu’elle venait de l’adopter. Traîtresse!

Je fais signe à Riley de la tête de me suivre dans le salon. « Ok… bon. Tu peux laisser tes affaires là. Et puis… bah … fais comme chez toi. » Qu’est-ce que je n’avais pas dit là. Ohlala. C’était chez moi pas chez lui. Que ça soit clair. « Enfin chez toi provisoirement, naturellement. » Sourire forcé. Je me rassieds sur le canapé tout en lui laissant une minuscule place. « Tu veux du thé? Et si tu veux il reste du gâteau de … de cet aprèm. » On va quand même pas gâcher un aussi bon gâteau. Parole de Miley. Je ferme mon MacBook par correction pour mon « invité ». « Il est vraiment pas mal. Dash avait globalement mauvais goût mais le gâteau qu’il a choisi est pas dégueu. » Aucune idée de si Riley allait trouver mes paroles indécentes. Irrespectueuses. Et à vrai dire cela faisait longtemps que je me moquais éperdument de ce qu’un membre du clan Lockwood pouvait bien penser de moi.

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Miley Lockwood aime ce message

Riley hoche silencieusement de la tête en reniflant lorsque Miley énonce les mots « Ah » et « oui », gardant tout de même un minimum de décorum et de retenue, jusqu'à ce que la journaliste ne commette l'erreur de prononcer le fameux nom qu'il ne faut pas prononcer.[27] Le vétérinaire éclate alors en sanglots, se rattachant émotionnellement à sa soeur comme s'il s'agissait d'une bouée en mer.[28][29] Il faut dire que le Vancouverite avait toujours eu particulièrement de difficultés à accepter la mort d'un être proche.[30] Son visage, habituellement si beau est chaleureux, se voit enlaidi par les contractions de ses muscles faciaux alors qu'il laisse ses émotions avoir raison de lui.[31]

Les mots de Miley, certainement destinés à l'apaiser, ont cependant tout l'effet contraire. « Non, Miles, justement: rien ne va plus... » se contente-t-il de souffler, tristement, sans réellement regarder sa soeur, ni quoi que ce soit d'autre. En état de fugue psychique, le vétérinaire reste focalisé sur le souvenir de Dash, de ses boucles dorées et de son sourire Colgate[32]. Dash, c'était un peu comme le soleil de la famille Lockwood. Il illuminait tout le monde de sa radiance, baignait sa famille dans la joie et la bonne humeur. Sa mort représente pour eux[33] une éclipse solaire interminable et particulièrement glaciale. Riley est tellement sonné qu'il ne remarque pas la chatte qui se dirige vers son mollet droit pour tenter de l'apaiser.[34]

C'est machinalement que Riley suit Miley dans le salon. C'est tout aussi machinalement qu'il pose ses affaires là où elle lui indique de le faire, ses larmes s'étant apaisées, son esprit distrait par les tâches que lui confère assidument sa soeur. Le brun ne relève pas réellement les sous-entendus sous-jacents aux propos de sa cadette, trop contrarié pour pouvoir réellement analyser ses propos. « Merci, Miles. J'ai vraiment de la chance d'avoir une soeur comme toi. Promis, je ne m'imposerai pas trop longtemps... Je ne savais simplement pas où aller. » Son coeur se pince lorsque ses pensées divaguent naturellement en direction du petit-frère choyé qu'il n'a plus la chance d'avoir, à présent. Mais cette fois-ci, Riley retient ses larmes.[35]

Le brun hésite furtivement à accepter l'offre de Miley, par politesse. C'était sans compter sur le tact légendaire[36] de la trentenaire, qui efface rapidement tout désir qu'il pourrait avoir de jouer la mascarade. « N...Non, ça va aller... Merci. »[37] Il a un léger pincement au coeur en voyant sa soeur s'empiffrer avec ce gâteau qui constituait, en quelque sorte, la dernière volonté de leur cadet bien-aimé. Et si Riley avait mangé une part, à contre-coeur et avec réticence, après le service, comme instruit par son frère, c'était uniquement par devoir. Le brun se ravise cependant lorsqu'il réalise qu'il a soif, et décide au moins d'accepter le thé. « Finalement... Je veux bien un thé, oui, si l'offre tient toujours. Est-ce que tu as du Tetley, à tout hasard? »[38]
_____

[27]Pour info, il s'agit bien du nom de « Dash ».[27a]
[27a]Et non, ce nom n'est pas à éviter parce que Dash est Voldemort, bien au contraire: Dash était une crème, et tous ceux qui se permettront d'en dire autrement ne perdent rien pour attendre!
[28]Si Riley a l'air particulièrement lamentable, à l'heure actuelle, c'est pour deux bonnes raisons.[28a][28b]
[28a]Le pauvre est endeuillé, fichez-lui donc la paix!
[28b]Ses lecteurs sont particulièrement cruels et sans âmes. Malheureusement, ce narrateur craint que pour cette affliction-ci, il n'existe aucun remède. La preuve: il suffit de regarder Miley!
[29]À ce stade, toute la famille Lockwood sait qu'il est déconseillé de toucher Miley sans autorisation, et Riley n'y fait pas exception.
[30]Pour plus d'informations, se référer à l'affaire Goo-goo.[29a]
[30a]En 1996, lorsqu'Ashley avait 3 ans, les parents Lockwood ont adopté une Golden Retriever blonde, que Dash prénomma Goo-goo. Riley s'attache particulièrement à l'animal de compagnie, dont il gère le dressage, le toilettage et les promenades. Quelques années plus tard, alors que Riley est en Tanzanie pendant son voyage humanitaire, Goo-goo (désormais surnommée « Gooj ») est percutée par une voiture, et meurt quelques heures plus tard. Riley restera particulièrement affecté de ne pas avoir été là. Cet évènement est celui qui le motiva à poursuivre des études de vétérinaire, plutôt que de médecine.
[31]Même le narrateur est contrait d'admettre, à contre-coeur, et en toute objectivité, qu'Il est pitoyable au regard, au moment présent. Mais ça, il vous est interdit de le lui répéter!
[32]Le sourire emblématique de la famille Lockwood, bien entendu. Même Miley en a hérité, bien qu'elle ne le montre jamais. On remercie le dentiste![32a]
[32a]Fun fact: si RIley n'était jamais devenu vétérinaire, il serait très certainement devenu dentiste à la place!
[33]À l'exception de Miley, bien entendu.
[34]À noter: le Vancouverite a toujours eu une influence particulièrement apaisante sur les animaux, et ce, depuis sa plus tendre enfance. Une aptitude utile lorsqu'on est vétérinaire par vocation!
[35]Par respect pour Miley, mais aussi parce qu'elle lui propose du thé, et que cette proposition suffit pour focaliser son esprit.
[36]Lire: absence de tact légendaire.
[37]En temps normal, Riley aurait très certainement protesté, ou cherché à défendre Dash. Mais ce n'est pas un temps normal: Dash est mort, Riley est en deuil, et Miley est dans son domaine, et l'accueille gracieusement, en tant qu'hôte. Rien ne va: c'est le monde à l'envers.
[38]Il s'agit là de la marque Canadienne qu'ils ont consommé depuis leur enfance, et que Riley affectionne donc particulièrement.

Riley hoche la tête en silence, et j'étouffe un bâillement théâtral. Oui, mon frère, continue de hoqueter comme ça, c'est sûr que ça va résoudre tous nos problèmes. Quoi de mieux qu'une séance de reniflements et de sanglots pour égayer notre soirée ? Déjà que cette journée avait été horrible… Franchement, s'il pouvait convertir ses sanglots en énergie renouvelable, on pourrait probablement alimenter toute la ville en électricité à l'heure qu'il est.

Je le laisse se laisser aller à son petit mélodrame, les émotions coulant librement comme s'il était en train de vider un réservoir. Mon dieu, qu'est-ce que je préférerais être en train de regarder une rediffusion ennuyeuse de Titanic à la télévision. Ses sanglots rendent son visage tout chiffonné, comme s'il avait essayé de l'essuyer avec un rouleau à pâtisserie. Je crois que je vais avoir un haut-le-cœur. Mais bon, au moins il se lâche, et peut-être que cela signifie qu'il pourra sortir de cette phase de deuil plus rapidement. Et arrêter de foutre ses larmes sur mon parquet.

J'essaie de paraître vaguement compatissante lorsque je lui dis que tout ira bien. Mais même moi, je ne crois pas vraiment à mes propres paroles. Rien n'a vraiment jamais été comme il le faut, pas depuis... eh bien, vous savez. L’annonce du cancer d’Ashley. Enfin son annonce à ma personne. Dash n’avait jamais dit à Riley quel mal le rongeait. Peut-être qu’il s’était dit qu’avoir un Riley compatissant et surprotecteur sur le dos était pire qu’avoir une tumeur.

Alors qu'il commence à parler, j'essaie de me concentrer sur ses mots, mais sérieusement, sa voix monotone m'endort. Je regarde d’un œil un coussin qui trône fièrement sur le canapé, peut-être que je pourrais discrètement me coucher pendant qu'il déverse tout son chagrin, il ne le remarquerait même pas. Je prends une bouchée de gâteau essayant de masquer mon ennui sous un air faussement concentré . Quand il parle de ne pas vouloir me déranger, je lève un sourcil d'incrédulité. Comme si j'avais l'intention de le jeter à la rue en plein deuil familial. « Oh Riley, voyons.. » Soyons honnêtes cinq minutes. «… je ne vais pas laisser mon frère dormir dehors. Tu ne survivrais pas à LA de toute façon. » Je souris. Ou du moins j’essaie. Le réconforter à ma façon. Méchamment. Ça m’endort un peu qu’il chiale... mais je n’aime pas voir son visage plein de morve.

Il accepte finalement mon offre de thé, et je dois presque retenir un rire. Tetley, sérieusement ? Comme si j'étais une ménagère des années 80. Mais bon, je vais faire un effort pour ne pas lui donner encore plus de raisons de pleurnicher. Harney & Sons n’ont qu’à bien se tenir avec leur thé délicieux… « D'accord, Tetley, le thé du peuple. Je vais te faire ça… » Je m’éclipse un instant cherchant dans ma cuisine un sachet de ce thé poussiéreux et je le jette dans une tasse d’eau brûlante. Meurs satané thé immonde! Je l’apporte à mon frère, qui, oh surprise, était toujours là. Je pose sur la table basse, à côté du thé, une boîte de mouchoirs. « Voilà pour toi. Je le fixe comme si je regardais un chiot abandonné. « Allez. Dash n’aurait pas aimé te voir dans cet état. Et moi non plus d’ailleurs. Je me doute que ça doit être soudain pour toi… mais ça finira par aller mieux.» Oups. « Pour toi ». Je me mords la langue en espérant que le vétérinaire soit trop à l’ouest pour relever.

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Miley n'a pas tort: Riley ne survivrait probablement pas plus de cinq minutes tout seul dans les rues de Los Angeles.[39] Si le Vancouverite ne réagit pas à la réflexion de sa soeur, c'est pour deux raisons bien simples (Voir [40] et [41]). Touché et ému, au plus profond de son être, la seule réponse que Riley est capable d'articuler, c'est de prendre la main de sa soeur dans la sienne pour la serrer fort. Il sait bien, pourtant, que Miley et le contact physique, ça fait deux. Mais ce sont des circonstances atténuantes, et le geste semble particulièrement inoffensif. Il prend cependant note de son hospitalité: il lui revaudra ça, tôt ou tard.[43]

« Merci, frangine » finit-il par souffler lorsqu'elle part lui préparer un Tetley, alors que Riley sort son téléphone pour soupirer tristement devant l'album photo intitulé « Dash » dans sa pellicule digitale. Chaque sourire est une dague dans le coeur, chaque regard pétillant, un coup dans le ventre. Ses yeux s'humidifient à nouveau alors qu'il repense à son échec: celui de ne pas avoir réalisé que quelque chose n'allait pas. Celui de ne pas avoir pu le sauver.[44] Heureusement que Miley revient à ce moment là pour le distraire. « Pardon. Tu... Tu as raison. » Riley s'éponge les yeux à l'aide des mouchoirs que son adorable soeur[45] lui tend, avant de se moucher bruyamment. Il est tellement distrait par la situation qu'il ne remarque pas le lapsus de Miley.[46][47] « Merci Miles. » Il est ému du soutien de sa soeur. Elle ne réalise probablement pas à quel point ses agissements font une différence – la concernant, il ne s'agit très certainement pas de grand chose[48]. Mais pour Riley, c'est déjà beaucoup. « Il me manque tellement », admet-il finalement avec tristesse. Riley n'imagine pas sa vie sans Dash. Ça avait beau être son petit frère, ils étaient si proches qu'il a presque l'impression d'avoir perdu une part de lui même. La vie ne sera plus jamais la même, sans Dash.[49]
_____

[39]Bien que le vétérinaire peut être si inoffensif et mignon qu'il serait tout aussi capable de survivre par la force de sa gentillesse. Si les gens peuvent être particulièrement odieux, parfois, la bienveillance légendaire du brun lui a toujours attribué un karma particulièrement positif.
[40]Riley est bien trop sonné actuellement pour réellement réaliser ce qu'il se passe et
[41]Quand bien même cela ne serait pas le cas, le brun est bien trop humble, naïf et optimiste pour pouvoir lire une critique quelconque dans les propos de Miley: il la sait plus débrouillarde que lui. Il n'a aucune raison de douter d'elle lorsqu'elle lui affirme que les rues de Los Angeles sont particulièrement plus hostiles que celles de Vancouver. Il perçoit, au contraire, cela comme une preuve d'amour de la part de sa soeur: elle s'inquiète assez de son sort pour le préparer aux rudes réalités du monde.[42]
[42]Ignorez le bruit de fond, c'est simplement Miley qui vomit le gâteau d'enterrement face à tant de bienveillance et de naïveté insipide.
[43]Le vétérinaire est, après tout, un as de la politesse et de la reconnaissance.
[44]Ce nouvel échec le renvoie à un traumatisme d'adolescence, lorsque la chienne familiale, Goo-goo, avait été percutée par un camion lors de son voyage humanitaire en Tanzanie. Riley ne s'est jamais pardonné de ne pas avoir été là pour la surveiller.[44b]
[44b]Bien entendu, Gooj était sous la supervision de Dash le jour de sa mort. Et si tout le monde en a conscience, personne ne le lui a jamais reproché. Le blondinet avait été suffisamment traumatisé comme ça sans que sa famille n'en rajoute une couche, et la famille avait été suffisamment compréhensive pour ne pas en rajouter une, justement.[44c]
[44c]Sauf, bien évidemment, Miley, qui, dans son manque de tact inimitable, n'avait eu aucun mal à parler du sujet qui fâche, sous les regards horrifiés, scandalisés et réprimandants du reste de sa famille.
[45]Les mots de Riley, et non ceux du narrateur! Arrêtez de me regarder comme ça, je n'y suis pour rien!
[46]Heureusement pour lui.
[47]Contrairement au narrateur, qui lui a bien tout relevé et note tout dans son petit carnet. Scritch scritch scratch. (Miley, ça va mal finir pour toi, parole de narrateur!)
[48]Bien qu'elle râlera probablement des efforts Herculéens dont elle a fait preuve, il ne faut pas se leurrer.
[49]Heureusement pour Riley, il va bientôt faire une rencontre qui va lui mettre du baume au coeur.[49b]
[49b]Mais chuuut! C'est un secret (pour l'instant)!

J'observais mon frère en silence, je ne pouvais pas m'empêcher de penser que Riley exagérait. Sa façon de sombrer dans la sentimentalité me subjuguait. Je me demandais si, à un moment donné, il prévoyait de se mettre à genoux pour accentuer le dramatique de la situation. Il hoche la tête, perdu dans ses pensées. J'aurais bien voulu lui suggérer de mettre un peu d'ordre dans cette mélasse émotionnelle qu'il avait dans la tête, mais à quoi bon ? Il avait l'air de croire que chaque souvenir qui traversait son esprit avait une importance cosmique, et il était là, à les savourer comme un vin millésimé. C'était comme s'il avait complètement oublié tous les côtés excentriques et parfois franchement agaçants de Dash.

Il prend ma main dans la sienne, et je fronce les sourcils en essayant de comprendre pourquoi il se sentait soudainement obligé de jouer au dramaturge de bas étage et sans même me demander la permission. Je ne trouvais pas de réconfort dans la nostalgie, mais Riley semblait s'y vautrer comme un enfant dans une piscine de bonbons. J'avais l'impression d'être coincée dans une telenovela, où chaque geste devait être dramatique, chaque mot devait être chargé d'émotion. J’étais … très très mal à l’aise.

Il remercie pour le thé. « De rien. Je suis sûre que le chagrin ne peut que se noyer dans le Tetley. » Et franchement je m’y noierais aussi volontiers plutôt que d’en boire une tasse. Quels goûts de chiotte il a. Il se mouche bruyamment, et je ne peux réprimer un petit rire sarcastique. Tant d'émotions, tant de larmes, tout ça pour un gars aussi étrange qu’Ashley. Je me demandais comment notre mère avait pu donner naissance à des enfants si différents … est-ce qu’on a vraiment partagé le même utérus? Pourquoi est-ce que Rye était aussi affecté alors que moi je peinais à ressentir la moindre émotion concernant le décès de Dash? « Ouais, il nous manque à tous » je dis. Je ne le pense pas vraiment mais je doute que ce que je pense, Riley ait envie de l’entendre. Et même si je ne comprenais pas tout ce qu'il aimait chez notre frère, je ne pouvais pas nier que son absence laisserait un vide aux Noëls que je manquais systématiquement pour des raisons plus ou moins valables.

Je me défais de sa main et je reprends mon ordi qui patientait tranquillement. C'est alors que j'entendis le doux "ding" de ma boîte de réception. Un nouvel e-mail. Quelque chose dans ce message me fit froncer les sourcils. Les mots menaçants étaient évidents : Tu vas payer. Je ne pouvais pas m'empêcher de penser que la personne qui avait écrit ça avait un sens de la dramaturgie aussi aigu que Riley en ce moment. Comme si un vilain de série B avait improvisé la réplique de sa vie… Je ne voulais pas inquiéter Riley avec ça. Il avait déjà assez de chagrin à gérer… et il le gérait franchement mal. Alors, j'opte pour une approche différente. Je me referme mon MacBook Air, en faisant semblant de m'étirer. « Écoute, j’ai assez bossé pour ce soir. On a qu’à se commander des sushis et regarder un film. Et frangin.. ?» dis-je d'un ton détaché « Si tu as besoin de rester ici un moment… tu peux. Après tout, on est une famille, non ? » Oui certes j’avais le sens de la famille sélectif mais bon… il était là quelque part au fond de moi. Pourvu qu’il ne me fasse pas encore un câlin.

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Il ne s'agit que de mots. Pourtant, ils le heurtent très certainement plus qu'elle ne l'aurait pensé possible. Ironique, n'est-ce-pas? Pour tous les faux pas, pour tous les travers que Miley serait capable de faire, au détour d'une conversation... Riley parviendrait à rationaliser chaque joute, chaque pique, comme étant une marque d'affection ou une remarque qu'il aurait mal interprétée. Ironique, donc, que la seule et unique remarque qui le transperce et le heurte particulièrement, soit celle destinée à (simuler) de la compassion.

Ouais, il nous manque à tous.

Soudainement, voilà que le brun sèche ses larmes, retrouvant de sa contenance habituelle. « ... Je suis tellement désolé, Miles... » finit-il par souffler. « ...C'est terriblement égoïste de ma part d'étaler mon chagrin ainsi, alors que tu es très certainement tout aussi affectée par la situation. J'espère que tu sauras me pardonner. » Il marque un temps d'arrêt, avant de reprendre, plus doucement: « Et que tu sais que je suis là pour toi. Si jamais tu as envie d'une oreille en laquelle te confier, ou simplement d'une épaule sur laquelle pleurer. »[50] Il enserre sa main un peu plus fermement, avant qu'elle ne se défasse de son emprise[51], visiblement pour consulter son ordinateur portable.[52] Il profite du moment pour siroter ce thé qui dessine un sourire sur son visage, le ramenant à une époque réconfortante: l'enfance, lorsqu'il était encore jeune et insouciant, et que Dash était encore en vie.[53] Son visage s'illumine lorsque Miley reporte son attention vers lui: le vétérinaire était préparé à ce qu'elle passe le restant de sa soirée sur son ordinateur. Le fait qu'elle lui propose de passer un moment en famille l'émeut particulièrement, le Vancouverite se disant qu'il reste encore de l'espoir que sa relation avec sa soeur puisse retrouver un peu de son éclat d'antan.[54] Un sourire timide se dessine sur ses lèvres alors que sa soeur lui propose ce qu'il espérait qu'elle lui proposerait. Il hoche de la tête face aux derniers mots de la blonde: oui, évidemment que oui ils sont une famille. « Merci, Miles. Tu n'as pas idée à quel point ça me touche.[55] » Il boit une nouvelle gorgée de thé, avant de terminer sa réponse: « Des sushis, c'est vraiment une super idée. Et pour le film, je te fais confiance! » C'est vrai qu'il commençait à avoir faim.[56]
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[50]Ha, ha, ha![50b]
[50b]C'est les rires du narrateur, qui est bien amusé parce que contrairement à Miley, il sait parfaitement à quel point Riley sera là pour Miley.[50c]
[50c]À compter d'aujourd'hui, il sera là de façon permanente![50d]
[50d]Un détail qui lui aurait très certainement donné le courage de le mettre à la porte, si seulement elle en avait conscience. Pauvre Miley![50e]
[50e]Cette dernière réflexion, en italiques, est à prendre avec ironie: cohabiter avec Riley est un privilège dont Miley est indigne!
[51]Un geste qu'il ne prend pas mal, bien évidemment: il s'agit de Riley, voyons!
[52]Si nombreux remarqueraient qu'il s'agit là de quelque chose de particulièrement mal élevé, Riley se contente de penser que Miley a probablement une carrière très pleine qui requiert son attention en permanence. Il ne s'en vexe donc bien évidemment pas! (Cf: note [51])
[53]Et que Miley ne les détestaient pas encore.
[54]Car si Miley a clairement eu du mal avec le reste de la famille Lockwood depuis sa naissance (ou presque), la mémoire sélective de Riley idéalise un peu (beaucoup) (trop) leurs « années dorées ».
[55]Pour les lecteurs qui, eux aussi, n'ont pas idée, sachez que ça le touche énormément.
[56]Le pauvre était tellement endeuillé qu'il ne l'avait même pas remarqué!

Ah, mon cher frère Riley, le roi de la guimauve et du pathos. Ses émotions dégoulinent de lui comme un flan mal cuit. Et voilà qu'il s'excuse maintenant. Il finit par souffler qu’il est désolé, d'une voix qu'il voudrait sans doute empreinte de gravité. Son laïus sur la peine que je dois partager est un coup de grâce. Je retiens un soupir, mais je ne peux pas m'empêcher de lever les yeux au ciel discrètement. Et bien sûr que je suis un peu affectée par la situation, mais je ne vais pas me rouler en boule et pleurer comme un bébé, pas comme lui. Je garde mon cynisme dans ma tête, mais sachez que c’est difficile. Il force insiste encore, m'offrant son épaule imaginaire pour pleurer. Comme si je savais pleurer j'avais besoin d'une épaule pour pleurer.

Pendant que je regarde mes mails, il sirote son thé avec une expression niaise, sans doute perdu dans ses souvenirs de notre enfance à Toronto. Je pense que je commence à comprendre pourquoi Dash ne voulait parler de son cancer à personne, quand on voit comme les Lockwood sont ravagés par la nouvelle. Il avait choisi la seule qui n’avait pas de cœur dont il savait qu’elle serait capable de tenir le coup pour sa confession.

Une menace de mort plus tard, je lui fais cette proposition, la seule qui me vient à l'esprit pour lui donner une excuse de rester. Bien sûr je n’y tenais pas à la base, même si on avait peut-être des choses à rattraper… mais avoir Riley à la maison, même si je doute qu’il sache faire du mal à qui que ce soit, y compris des mouches, me rassurait un peu. Il me dit que je ne sais pas à quel point ça le touchait. Oh que si. C'était si prévisible. C'était ça, Riley, toujours prêt à saisir la main tendue et à la serrer bien bien fort. Il me fait confiance sur le choix du film… Bien sûr que tu me fais confiance, Riley. Un film, des sushis, et nous voilà partis pour une soirée guimauve.

Quelques heures plus tard

Le ventre gavé de poisson cru (et des restes du gâteau que j’avais avalés avant), le film que j’avais choisi, « la proposition », film feel good par excellence se termine. Je me suis levée, étirant mes membres fatigués et j’ai éteint la télévision. « Eh bien, Riley, je suppose que c'est l'heure de dire au revoir à ma reine, Sandra Bullock. J'espère qu'elle a passé une bonne soirée avec nous.» Personnellement c’était ma came ce film, même s’il commençait à dater. Plus que pleurer sur le sort de Dash en tout cas. Je hochai la tête, décidant d'être momentanément gentille. « Je vais me coucher. Bonne nuit, Riley. Tu peux prendre le canapé. »
Je m'éloignai vers ma chambre, me préparant à une nuit de sommeil bien méritée, après cette journée abominable. Même si le choc de la menace de mort continuait à résonner dans un coin de ma tête. Même si nous avions dit adieu à Dash. J’ai eu du mal à trouver le sommeil. Mais finalement il m’a trouvée.

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Talya S. Adams aime ce message

Le film se termine. Riley a poliment regardé le long-métrage du début à la fin, sans consulter son téléphone, ni même se lever pour aller à la salle de bains.[57] Il a dégusté les différents sushis[58] qu'il a insisté pour payer, parce que « C'est la moindre des choses, enfin, Miles! »[57b][59]. Il avait particulièrement apprécié pouvoir déguster les fameux nigiri à l'anguille sauce barbecue, un des choix moins conventionnels sur le menu mais dont il raffole particulièrement depuis qu'une ex japonaise lui avait fait découvrir le mets à Vancouver. Les sashimis au saumon et les makis au concombre avaient également connu un franc succès auprès du Vancouverite, qui avait cependant laissé les nigiri au bras de pieuvre de côté dans l'espoir que Miley les mange.[60] Bien entendu, les fameux California Rolls n'ont pas duré particulièrement longtemps — un plat aussi délicieux qu'il est inauthentique, non pas que ce soit un détail qui ait dérangé les Lockwoods.

Et si Riley a est resté assis devant le film du début jusqu'à la fin, sans pauses ni interruptions, dire qu'il l'a regardé serait une grande exagération. La vérité, c'était que Riley était trop préoccupé par son deuil pour pouvoir réellement se plonger dans le fantastique[61] jeu d'actrice de Sandra Bullock. Toutes ses pensées étaient consacrées à Dash. Il se demandait si Dash s'était senti isolé, pendant ces dernières années, loin des siens. Il se demandait si Dash avait souffert, dans ses derniers moments, lorsque la maladie avait resserré son emprise sur sa vie. Il se demandait si Dash avait regretté sa décision de ne pas tenter cette opération que Riley lui aurait très certainement conseillé de faire s'il avait été mis au courant. Il se posait énormément des questions qui ne trouveraient jamais réponse maintenant que Dash était mort.

Le film se termine, donc, et Riley reste criblé de questions. Pour Miley, il est cependant l'heure de dormir.[62] « Je suppose qu'il est tard, effectivement » finit-il par répondre en consultant sa montre. Vingt-deux heures trente. Une heure idéale pour se coucher. Riley s'étire légèrement. « Bonne nuit, frangine. » Un sourire, un salut de la main. Ses yeux restent humides, torturé par le désir de fondre en larmes à nouveau, mais il se retient. Il accepte l'oreiller et la couverture que sa soeur lui tend. « Merci encore. Pour tout. » Il finit par affirmer. Il a un moment d'hésitation avant de laisser ses émotions prendre le dessus et d'offrir un câlin à sa soeur, visiblement surprise par son attention.[63] « Je suis vraiment content d'être ici avec toi » confesse-t-il finalement, avant de la laisser regagner la quiétude de sa chambre.

Après s'être préparé pour le lit, Riley s'installe sur le canapé, en silence. Il reste là, à regarder le plafond, rongé par ses pensées et les sentiments complexes qui se battent en lui à cet instant présent. Le deuil. La tristesse. La douleur. Le regret. La culpabilité.

Ses pensées fusent à toute allure, les questions s'accumulent dans sa tête. Le brun ne parvient pas à fermer l'oeil de la nuit, l'esprit préoccupé par la mort de leur frère cadet.

Au réveil de Miley, Riley est déjà debout, dans la cuisine. Malgré l'insomnie, il s'était levé aux aurores, avait fait son footing, ses étirements et ses pompes, et entamait la cuisson de crêpes. Il allait s'occuper de sa petite soeur. Il se le promettait. Il ne commettrait pas la même erreur qu'il avait commise avec Dash. Plus que tout, pour lui, c'était essentiel que Miley sache qu'elle pouvait toujours compter sur lui.

Toujours.
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[57]Voyez comme il a été bien élevé!
[58]Notez que Riley aime particulièrement les sushis, car la prévalence du riz permet une bouchée particulièrement douce et neutre, aux saveurs subtiles et loin d'être agressives.[58b]
[58b]N'oubliez pas que pour toutes ses qualités, Riley a malheureusement un palet et un estomac particulièrement sensibles. Même une orange peut être trop amère pour le canadien!
[57b]cf: note [57] plus haut.
[59]Non pas que Miley ne se soit précipitée pour payer non plus, soyons honnêtes.
[60]Ayant un palet sensible, certaines textures alimentaires lui sont également particulièrement désagréables! Riley ne mâche d'ailleurs jamais de chewing-gums car la texture lui donne la nausée!
[61]Ses mots, non pas ceux du narrateur qui n'a pas d'opinion tranchée sur la question!
[62]Vous avez vu comment elle est terrible? Même pas une once de culpabilité! Ce narrateur est particulièrement outré!
[63]Il faut dire que Miley avait toujours été particulièrement vocale sur le fait qu'elle n'aimait pas qu'on la touche sans son consentement.[63b]
[63b]Un détail que Riley respecte presque toujours, sauf circonstances exceptionnelles.[63c]
[63c]Oui, le décès soudain et inattendu de son frère chéri compte comme une circonstance exceptionnelle. #sorrynotsorrymiley