APPEL D'ANDREAS A GRACE

Grace est partie à l'aube ce matin, avant même que je ne me réveille, comme une fourbe qu'elle est. Cela ne m'a même pas étonné même si je m'attendais à retrouver quelqu'un à mes côtés. En y repensant bien, cette soirée et cette nuit surtout avaient été étranges, un peu bancales, ambiguës, appelez ça comme vous le souhaitez mais au final, le ressenti était bizarre. Une journée s'est passée sans que je n'aie spécialement l'envie ou le besoin de la contacter. Cela dit, une fois la nuit tombée il me prend de l'appeler. Parce que partir le matin sans attendre que l'autre se réveille ça contribue certes à se faire désirer et ça a un petit côté charmant mais c'est surtout une invitation aux doutes. J'aimerais juste savoir ce qu'il se passe dans sa tête, pourquoi elle s'est barrée alors qu'elle aurait pu le faire après me l'avoir précisé en face à face. Ce n'est pas comme si j'avais voulu créer cette ambiguïté non plus. Assis à mon bureau dans ma chambre, je cherche son nom dans mon répertoire et lance enfin l'appel.

APPEL EN COURS...

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Je serais juste l'attrape-cœurs et tout. D'accord, c'est dingue, mais c'est vraiment ce que je voudrais être. Seulement ça. Salinger

J’ai passé la journée chez moi, j’aurai pu sortir, faire n’importe quoi, mais j’ai juste passé la journée chez moi sans savoir quoi faire de moi, je me suis trainée, d’une pièce à l’autre en ruminant toute cette soirée. J’ai pris une douche, et malgré l’eau chaude, j’ai eu froid, j’ai mangé, et étrangement j’ai trouvé tout mauvais. Alors en désespérance de cause, j’ai appelé Micah, pour du réconfort, n’importe quoi. Quand il a décroché, la première chose que j’ai dit ce fut « Je crois que je suis malade. » Il n’a pas rigolé, pour une fois, comme s’il avait compris que je ne déconnais pas. « Qu’est-ce qu’il t’arrive ? » Il m’a demandé, et moi je ne savais même pas quoi répondre. « Grace tu peux tout m’expliquer. » Sa voix m’avait rassuré, c’est vrai, et j’ai réalisé que ce n’était pas lui que je voulais entendre en réalité. « C’est devenu compliqué … » Après cette phrase, par contre, il a ri, je suis certaine qu’il a compris un truc que moi je n’arrive pas à capter. « C’est ce fameux mec ? » J’ai soupiré, ne sachant pas quoi rajouter d’autre, parce que oui, c’était ce fameux mec, impossible de le nier. « T’es malade d’amour c’est ça ? » Putain, ce qu’il pouvait être con parfois. Enfin pas si con que ça. « Arrête tes conneries. » Ouais parce que cela ne pouvait pas se résumer à ça. « Et toi, arrêtes les tiennes et dis-lui. » J’ai raccroché finalement et suis allée me mettre dans mon canapé, endroit où je me trouve depuis une dizaine de minutes à ruminer ses paroles et au fait que je me rends malade. Plus de doutes à avoir, ça vient de moi tout ça. Je fais tourner mon portable entre mes doigts quand celui-ci se met à sonner. Je m’attends à voir le prénom de mon frère sur l’écran, sauf que ce n’est pas le cas. Andreas. J’en ai un haut le cœur, j’hésite à décrocher, je ne saurai pas quoi dire de plus qu’hier soir, ne suis pas plus avancée. Et pourtant, je ne peux pas empêcher mon pouce droit d’appuyer sur la touche verte du clavier. « Qu’est-ce que tu me veux toi ? » je me veux mauvaise mais en fait, je suis juste fébrile et un brin soulagée qu’il m’appelle, que ce ne soit pas terminé.

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Tu vois ce moment entre le sommeil et le réveil,
ce moment où on se souvient d'avoir rêvé ?
C'est là que je t'aimerai toujours,
c'est là que je t'attendrai.

Très peu de temps se passe entre le moment où je lance l'appel et celui où elle décroche. Au lieu de recevoir un bonsoir habituel, elle m'agresse directement en me montrant que je dérange. J'hausse les sourcils de dépit avant de répondre. « Euh, j'voulais discuter. » Ouais, sauf que le moment ne doit pas être bien choisi malheureusement pour moi. A moins qu'elle soit vénère contre moi... mais pour quelles raisons, ça je me le demande bien. Bref, je poursuis dans la logique. « Je rappellerai si je te dérange. »

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Je serais juste l'attrape-cœurs et tout. D'accord, c'est dingue, mais c'est vraiment ce que je voudrais être. Seulement ça. Salinger

Je me lève pour allumer une cigarette, en ressentant le besoin quand il me répond « Euh, j'voulais discuter. » Je m'aperçois qu'il ne doit pas comprendre une seule seconde le ton de ma voix, ma phrase et le reste avec ça. Comment il pourrait savoir ce que mon frère vient de me dire après tout ? En secouant le visage je tire sur ma clope en soupirant fortement lorsque je recrache la fumée, et comme il est un fumeur, je me doute qu'il doit comprendre que je suis en train de le faire, « Je rappellerai si je te dérange. » je ne saurai dire si je suis vraiment capable de discuter sur le moment, et encore moins si j’en ai l’envie, le truc dont je suis certaine c’est que cet appel, dans le fond, je le voulais. Je m’approche de la fenêtre du salon pour l’ouvrir et ne pas empester tout l’appartement avec mes conneries, je ne suis pas sûre qu’Alice apprécierait se retrouver dans un aquarium à fumée. « Tu me déranges pas, j’ai eu une mauvaise journée, désolée. » Ne raccroche pas … Ouais mauvaise parce que je ne savais juste pas quoi faire de moi. A me rendre malade pour des conneries, du vent, un putain de n’importe quoi. Mon regard observe les lumières nocturnes et je poursuis en lui disant, pensive « Tu veux parler de quoi, Andreas ? »

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Tu vois ce moment entre le sommeil et le réveil,
ce moment où on se souvient d'avoir rêvé ?
C'est là que je t'aimerai toujours,
c'est là que je t'attendrai.

Une mauvaise journée ? C'est une raison pour être aussi désagréable au combiné ? J'pense pas, enfin personnellement j'aurais fait l'effort pour elle, mais il semblerait qu'elle ne soit qu'une fille, autrement dit un être vivant né pour faire chier ses congénères. « OK. » Ouais, j'ai rien d'autre à dire sur le moment. J'hésite un peu avant de reprendre la parole, préférant fixer le stylo que je fais tourner entre mes doigts machinalement. Puis c'est elle qui finit par reprendre en me posant une question légèrement dérangeante mais à laquelle je lui dois légitimement une réponse, enfin, si ça veut sortir. « De rien en particulier... » C'est con, j'ai pas l'habitude de regretter ce que je fais, surtout quand c'est des trucs aussi cons mais là je regrette presque de l'avoir appelée. Cela dit je me force à reprendre du poil de la bête, de l'assurance. Alors je me redresse, soupire un bon coup. « Pourquoi t'as passé une mauvaise journée ? » Qu'elle parle d'elle, ça m'arrangerait pas mal pour cette fois.

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« De rien en particulier... » J’expire lentement en réfléchissant au pourquoi du comment. Comment on a pu en arriver à ce point-là ? Je ferme les yeux en fait je me rends compte qu’à cause de lui-même Los Angeles n’est plus pareil, après tout, hier soir il m’en a montré une des plus belles vues, rêvée, putain rien en particulier, ça me fait enrager, on n’est pas amis lui et moi, on n’a pas à se parler alors même si je ne veux pas qu’il raccroche, je me dis que j’en ai peut-être besoin, pour mon bien. « Pourquoi t'as passé une mauvaise journée ? » Parce que je suis malade que j’ai envie de lui répondre mais comme mon frère m’a répondu que c’était à cause des sentiments, du coup je suis partagée. Mais puisqu’il veut que parle autant le faire de toute façon je n’ai rien à perdre étant donné que je reste sur mes positions de « on ne recommencera plus jamais. » « Je n’ai rien fait et j’ai horreur de ça, mais la vérité c’est que j’n’avais rien envie de faire, ne me demande pas pourquoi, je n’en sais strictement rien, alors je me suis trainée chez moi en ruminant un tas de choses, avant d’en arriver au point d’appeler mon frère histoire de savoir si lui comprenait mieux que moi, mais tu vois, mon frère, il a le don de me dire les choses que j’n’ai pas envie d’entendre, histoire de me planter vraiment dans le vif du sujet, à tenter de me faire réagir pour que je finisse par me poser les bonnes questions et juste après ça, tu m’appelles, ouais à dix minutes d’écart même pas, alors j’en suis rendue au fait que je suis énervée contre mon frère, que ma journée a été des plus improductives et à me demander à quoi on joue toi et moi, ce n'est pas que j'aime pas le jeu hein, juste que j'aimerai bien en connaitre les règles. » Finalement je m’assois sur le rebord de la fenêtre tout en rajoutant. « Oh et je pense que je suis malade en plus de ça, je vois que ça comme explication plausible. » Il veut parler de rien en particulier et moi je me dis que je suis en train de tout balancer.

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Tu vois ce moment entre le sommeil et le réveil,
ce moment où on se souvient d'avoir rêvé ?
C'est là que je t'aimerai toujours,
c'est là que je t'attendrai.

Je ne m'attendais pas à ... ça. A un discours digne d'un moulin à paroles et aux dernières nouvelles, Grace n'était pas ce genre de nanas à dire tout ce qui lui passe par la tête. Alors forcément, j'suis un peu sur le cul. Pas que pour ça, ce qu'elle dit me cloue un peu le bec aussi, j'ai du mal à tout assimiler parce qu'elle raconte trop de choses, la plupart n'ayant aucun sens pour moi d'ailleurs. Bordel j'me sens con. Quand elle me parle de nous deux, j'ai l'impression de comprendre enfin un truc. Ouais ça, ça a du sens au moins, toute l'histoire avec son frère par contre... Bref, je passe une main sur mon visage en riant à moitié lorsqu'elle ajoute qu'elle est malade. « Tu m'excuseras mais je n'ai pas compris la moitié de ce que tu as dit... » J'dois avoir le cerveau un peu brouillé après avoir bossé pendant - étrangement - plusieurs heures pour un rendu demain. « J'savais pas qu'on jouait moi, mais si tu aimes alors tant mieux. » Je souris vaguement, réalisant qu'en fait, je vois un peu où elle veut en venir. Juste un peu. « C'est toi qui compliques tout en fuyant. Il n'y avait pas de quoi, tu sais. C'est pas parce que tu serais restée le matin qu'on aurait eu l'air d'un couple. » Bah ouais puisqu'il s'agit de ça, non ? J'suis pas con au point de ne pas comprendre ça quand même. Moi aussi il m'arrive de quitter un pieu dès que je le peux afin de ne pas être confronté au fameux moment du réveil trop embarrassant autant pour l'un que pour l'autre. Sauf que là c'est différent non ? Grace n'est pas juste une aventure, c'est plus... Plus, quoi.

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Du presque rire qu’il m’offre j’ai l’impression que je me détends, je calle mon dos à moitié sur le mur en continuant de fumer et d’écouter sa voix. « Tu m'excuseras mais je n'ai pas compris la moitié de ce que tu as dit... » À mon tour de ricaner, tu m’étonnes qu’il n’a pas compris, je ne suis même pas certaine de réaliser moi-même tout ce que je viens de lui déballer. J’ai mal au cœur, genre vraiment la nausée, j’ai l’impression que je flanche trop vers un chemin que je ne veux pas, et le pire, c’est que je le réalise, c’est ce dont j’ai horreur dans cette histoire. « J'savais pas qu'on jouait moi, mais si tu aimes alors tant mieux. » Je tire une dernière fois sur ma cigarette en me disant que le tabac me manque déjà, surtout pour survivre à une conversation telle que celle-là. Si on joue, je ne vois pas ce qu’on pourrait faire d’autre. Je me prends le visage dans ma main libre en soupirant, il m’exaspère, c’est pour le coup, agaçant, vraiment. « C'est toi qui compliques tout en fuyant. Il n'y avait pas de quoi, tu sais. C'est pas parce que tu serais restée le matin qu'on aurait eu l'air d'un couple. » Je hausse les épaules et remonte mes jambes sur le rebord, de sorte à me retrouver complétement assise, je ne sais pas pourquoi, je me dis que ça va durer, qu’on en a pour des heures à blablater, mais je me trompe peut être, j’avoue ne pas vouloir perdre de temps à espérer. Puis merde depuis quand j’envisage d’espérer pour un garçon moi ? Je fais du n’importe quoi, encore une fois. « Et on aurait eu l’air de quoi, hein ? » J’ai vraiment envie de savoir, franchement, parce que je ne sais pas sur quel pied danser, je comprends tout de même que c’est mieux qu’on ait cette discussion au téléphone, parce que si j’avais eu son regard face au mien, ce soir, je n’aurai pas pu dire ça … « Tu vas me dire que tu prends souvent le petit déjeuner avec tes conquêtes ? » Et là, j’ai un gout amer en bouche quand je pense aux autres filles. Mais je ne rajoute rien, il manquerait plus que ça, une crise de jalousie, très peu pour moi, quand on sait que lui et moi, on est rien, n’est-ce pas ? Bordel, y a un truc dans mon corps qui hurle que ce n’est pas que ça, qui veut que je ne sois pas une simple conquête, sinon je n’en aurai pas parlé à Micah, alors je me déteste et mon frère aussi avec, sans oublier celui qui provoque tout ça. Et putain je le fais encore plus, le haïr autant qu’il me plait, quand je demande trop vite pour m’arrêter. « Et si on joue pas, on fait quoi, d'ailleurs ? » Faut que tu m’expliques, parce que je vois rien d’autre mis à part cela.

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Tu vois ce moment entre le sommeil et le réveil,
ce moment où on se souvient d'avoir rêvé ?
C'est là que je t'aimerai toujours,
c'est là que je t'attendrai.

Pour ne pas changer de d'habitude, je n'ai pas trop réfléchi en lui sortant ma dernière remarque. C'était spontané et je le pense vraiment. Grace aurait très bien rester le matin sans que cela vire au malaise. J'ai beau ne pas vivre ce genre de situation fréquemment, je ne suis pas le genre de mec à m'embarrasser pour des trucs aussi futiles, enfin je crois que c'est futile en tout cas. J'attends quelques secondes avant qu'elle ne me pose sa question. Question qui me laisse de marbre un moment parce que franchement, je n'y ai pas de réponse sur le coup. A moins que ce soit trop évident pour en mériter une ? J'en sais rien... De quoi aurait-on pu avoir l'air si ce n'est de deux personnes qui ont certes couché ensemble mais qui ne s'embarrassent pas pour autant ? Elle me bute un peu avec ses interrogations, j'avoue. Je réalise que j'suis loin d'être aussi inquiet qu'elle là-dessus quand elle rajoute une couche. Si je prends souvent le petit-déjeuner avec mes conquêtes. J'y réfléchis un court instant avant de rire à nouveau, parce que c'est drôle tout de même, non ? « Non. » - Pas souvent en tout cas... - Que je réponds en toute franchise. Même si ça a dû arriver parfois... quand la fille en question est une pote, justement. Comment ça j'ai peu de principes ? On a qu'une vie, vous comprenez. « Ce n'est qu'un petit déjeuner, j'vois pas le malaise. » Je fixe mes feuilles de cours un instant, avant de dessiner un truc totalement abstrait sur le coin de l'une d'elles. Lorsqu'elle me demande ce qu'on fait si on ne joue pas, je hausse les épaules significativement avant de sourire vaguement, en fronçant les sourcils de concentration. « Pourquoi tu veux forcément une réponse à ça ? » Franchement, elle se pose trop de questions, alors qu'elle pourrait juste profiter de nos moments ensemble, comme je le fais moi. Et c'est parfait comme ça, je vous assure. « Je ne vois aucun intérêt à vouloir toujours tout justifier. On aime bien être ensemble, on fait ce qu'on a envie de faire, point barre. Regarde, si t'étais restée, on aurait pu aller courir ensemble ce matin, ça aurait été cool. » Au lieu de ça, j'y étais allé seul, comme un malheureux. « Enfin j'sais pas, tu voudrais que je te réponde quoi ? » Parce que je suis peut-être simpliste dans ma vision des choses après tout. J'ai conscience d'être un peu je m'en foutiste alors quitte à ce qu'elle m'interroge, autant me donner son point de vue à elle non ?

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Je m’énerve un peu sur un fil de tissu de mon t-shirt qui dépasse alors que j’attends qu’il me dise à quoi on aurait pu ressembler, si ce n’est à un petit couple bien parfait, l’idée est à gerber, mais surtout pour le fait qu’elle soit née dans mon esprit. Depuis quand je m’imagine en couple avec quelqu’un, avec lui ? Il faut qu’on m’abatte, vraiment, et que je passe un long moment sans le voir, sans lui parler, ouais, histoire que je puisse refoutre de l’ordre dans mes pensées. Je vis pour moi, et je n’ajoute personne dans cette équation-là. Grace et sa vie. Point. « Non. » Je soupire en riant un peu, non, bien sûr qu’il ne déjeune pas souvent avec les filles qu’il baise, alors pourquoi on aurait fait une différence ce matin ? J’ai fuis son lit, ses bras, sa peau, et son appartement, et quoi qu’en dise mon frère, je ne le regrette pas. « Ce n'est qu'un petit déjeuner, j'vois pas le malaise. » Encore une fois je ricane, mais il est partout le malaise Andreas ! Partout bon sang, dans tes caresses et dans tes sarcasmes, dans ton allure et dans tes sourires, ça me fout les boules, tellement j’ai l’impression qu’il le fait exprès, je me sens même incapable de répliquer. Cependant je me permets de demander une nouvelle fois ce qu’on fabrique lui et moi. Je n’ai rien envie de construire mise à part mes bâtiments et je vous promets qu’en ce moment ce n’est pas vraiment ce qui occupe le plus mon esprit. « Pourquoi tu veux forcément une réponse à ça ? » Parce qu’aucun mec me fait cet effet-là, et que merde, je ne comprends pas. « Je ne vois aucun intérêt à vouloir toujours tout justifier. On aime bien être ensemble, on fait ce qu'on a envie de faire, point barre. Regarde, si t'étais restée, on aurait pu aller courir ensemble ce matin, ça aurait été cool. » Finalement j’arrache le fil de mon t-shirt, il a surement raison, je me prends la tête pour des broutilles, seulement je n’y peux rien. Je suis comme ça et je ne risque pas de m’en excuser. « Enfin j'sais pas, tu voudrais que je te réponde quoi ? » Je n’en ai aucune idée, je crois bien que c’est ce qui me rend encore plus dingue dans cette histoire. S’il m’avait dit qu’il souhaitait qu’on devienne sérieux, j’aurais fui, j’aurais eu l’envie de le virer de ma vie. Et puisqu’il ne le dit pas, je m’agace à vouloir trouver des solutions à tous les problèmes que semble me poser notre relation. Je tourne en rond et franchement c’est de plus en plus con. « Andreas … » Je me sens vaincue alors que je voulais vraiment lui tenir tête, je soupire son prénom, une supplique, un murmure, une bêtise peut être. « J’ai pas de réponse, j’n’en sais rien. » Je marque une pause sans savoir quoi dire de plus, je n’aime pas la position dans laquelle je suis, ça me dérange à l’intérieur. « Je suis partie, d’accord, je me suis juste dit que c’était fini, qu’on n’allait pas faire durer ce truc encore longtemps … Je voulais garder le contrôle, parce que je trouve qu’avec toi je le perds souvent, et ça commence vraiment à me rendre folle. » Pour la fin de ma phrase, j’utilise un ton rieur, presque ironique, parce que je me pose assez de questions auxquelles je ne trouve pas de réponses, alors si maintenant je dois rajouter les siennes à la liste, je crois bien que je suis foutue.

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C'est là que je t'aimerai toujours,
c'est là que je t'attendrai.

Grace s'adresse à moi comme si l'on parlait de quelque chose de dramatique, sauf que ça ne l'est pas, n'est-ce pas ? Qu'est-ce qui mérite autant de perplexité dans tout ce que nous venons de vivre ? Dès le départ, tout a été clarifié. Elle ne recherchait rien de sérieux, elle n'est d'ailleurs pas une fille sérieuse si je me remémore ses dires, et je ne le suis pas non plus, alors pourquoi sa voix est autant marqué par l'incertitude ? Il n'y a rien de grave dans cette discussion, ni dans tout ce que nous vivons. C'est ce que je me dis avant qu'elle ne se remette à parler, pour me communiquer son ressenti face à tout ça. La fin me laisse sans voix un moment. La rendre folle ? Lui faire perdre le contrôle ? C'est censé vouloir dire quoi, ça ? Il m'arrive souvent de ne pas comprendre les femmes, mais c'est rarement que cela me met mal à l'aise. Là, je le suis étrangement, et je dois me reprendre à ma manière. Peut-être maladroitement, j'en sais rien et je m'en fiche un peu à vrai dire. « Quoi, tu es en train de tomber amoureuse ? » Un sourire aussi malin que niais vient prendre possession de mes lèvres sur ces paroles que j'ai dites sans trop réfléchir. Et puis, quand je suis parti sur quelque chose de con, je m'arrête difficilement. « Ce n'est pas une très bonne idée tu sais. Il va falloir qu'on arrête de se voir peut-être... » Ce même sourire ne me quitte pas, je dis ça en plaisantant parce que je ne la prends pas au sérieux, et j'espère qu'elle en fera de même. Ouais, j'espère vraiment.

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Je suis plus qu’esseulée, emplie d’une fragilité nouvelle que je ne croyais pas possible de naitre en moi, recroquevillée sur ma fenêtre à me torturer pour cette histoire qui fait éclater en moi des choses dont je ne veux pas. J’aimerai qu’il réagisse plus, qu’il me montre que je ne suis pas dingue pour rien, que nous deux en étant amis et amants c’est plus une mauvaise idée qu’une évidence malsaine qui me détruit à petits feux sans que je ne le vois, que j’ai raison, que je ne mérite pas toute cette mascarade et qu’il va enfin me laisser ruminer seule sur cette supposée maladie que je suis en train d’attraper. Ce virus, il est trop intense pour exister. Alors de mes mots rieurs et de ce que j’ai sur le cœur j’ai une nouvelle fois la nausée, j’attends qu’il me réponde et je m’aperçois que j’ai arrêté de respirer. « Quoi, tu es en train de tomber amoureuse ? » J’ai envie de hurler quand j’entends ses mots, l’amour c’est juste laid. Ils se sont tous ligués contre moi aujourd’hui pour être aussi cons ou ce n’est qu’une impression ? Je racle ma gorge, dégoutée. « Ce n'est pas une très bonne idée tu sais. Il va falloir qu'on arrête de se voir peut-être... » C’est mon désir premier, ne plus le voir, tout arrêter. On fonce dans un mur et je suis bien loin d’être suicidaire. Du coup autant arrêter maintenant, m’épargner des blessures nouvelles et vivre pour moi. Le plan quoi, c’était ça. Je regrette ma proposition ce jour, la douche je veux dire, maintenant c’est moi qui le suis, douchée, et ce par ses mots. Faut qu’on arrête de se voir. J’approuve, j’approuve vraiment. « Si t’arrête de me courir après, ça peut se faire, hein. » Je n’y arriverai pas seule, c’est suintant de vérité, ça me fait chier, mais c’est comme ça. Je ne peux pas m’empêcher d’être joueuse, de rire à moitié même pour le provoquer, parce que c’est aussi ce qu’il a voulu faire non en me parlant de son amour bon à gerber ? Ô d’ailleurs j’avais presque oublié. « Amoureuse ? Non merci. » Ça ira.

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Je n'étais donc pas sérieux. Parce qu'elle ne l'était pas non plus en disant que je la rendais folle, ou quelque chose comme ça, non ? Ce n'est pas comme si nous avions fait plein de trucs extraordinaires qui auraient réellement pu la rendre dingue de moi – rien que l'expression est étrange à dire – non au contraire, je trouve que nous avons tapé dans la simplicité, puisque de toute façon nous n'avons jamais voulu autre chose. Enfin, pas aux dernières nouvelles. Sa réponse me fait rire parce que merde, j'la trouve sacrément culottée. Je réfute fait, je ne lui cours pas après, c'est juste que notre duo me plaît, sous tous ses aspects. Alors pourquoi je la laisserais de côté ? Sans même réellement prendre en considération sa deuxième remarque, je reviens sur l'autre point. « A la base, c'est toi qui m'as couru après. » Quoi, il fallait juste que je le précise ; ce n'est pas moi qui ai lancé les festivités, c'est elle. Mes yeux prennent tout à coup du recul sur ce dessin étrange que j'ai crayonné dans le coin de ma feuille. J'ai la confirmation nette que je suis un piètre dessinateur, le piano restera donc mon seul atout pour faire fondre les âmes artistes. Quand mes doigts lâchent le crayon, j'amène ma main vers mon visage dans un mouvement de dépit. Elle termine dans mes cheveux que j'ébouriffe à moitié avant de froncer mes sourcils. « J'arrêterai de revenir vers toi si c'est ce que tu veux, je suis docile quand je veux. » Dis-je en haussant les épaules vaguement, avant de pivoter sur mon tabouret pour regarder le ciel encore clair. J'ai envie d'aller courir je crois, me changer les idées parce que quelque chose commence à me déranger vraiment, dans cette discussion. « Notre amitié aura été courte mais ça en valait le coup, t'es une chouette fille. Un peu spéciale mais chouette. » Je ne sais pas pourquoi j'ai cet air sérieux sur le visage, alors que je nuance mes propos d'un léger brin d'humour, ou de sarcasme peut-être. « On doit faire comme si on ne s'était jamais rencontrés ou … ? Enfin c'est quoi le délire ? »

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Je m’attends à une réponse idiote de sa part, parce qu’il n’est capable que de cela, de m’agacer au plus haut point et de me laisser seule dans mon merdier maladif. Quand il me dit que c’est moi qui a couru après l’autre dans un premier temps, je ne peux pas m’empêcher de pouffer et de sourire fortement. C’est tellement vrai que ça me donne envie de rire vraiment, ça m’apprendra à croire qu’un acte peut rester anodin. Oui, j’ai couru après lui, j’aurai du me casser une jambe moi ce jour-là, plutôt que de lui courir après, cela m’aurait empêché des centaines de délires mentaux que même moi je ne comprends pas. Et puis, il faut avouer qu’Andreas ne m’aide pas, que même Micah ne m’aide pas, que personne ne m’aide. Tout le monde me laisse avec mon malaise et je dois faire comme si tout allait bien en plus de ça. Pourquoi on s’appelle lui et moi ? Pourquoi il m’appelle ? Il ne me court pas après là ? Bon on a couché ensemble mais ça ne marche pas. Il n’y a rien qui marche avec moi. Lorsqu’il me dit qu’il est capable de ne pas revenir me voir j’ai du mal à le croire, non pas sur le fait que si je le veux vraiment il ne reviendra pas, mais sur sa prétendue docilité. Je me mords la langue pour m’empêcher de lui dire que je n’ai pas envie de sortir de sa vie. Et que j’en ai marre d’avoir ce tas de sentiment contraire en moi. « Notre amitié aura été courte mais ça en valait le coup, t'es une chouette fille. Un peu spéciale mais chouette. » Il se moque clairement de moi, et je réalise soudainement le ridicule de ma condition, de ma presque protection. J’ai envie de me taire jusqu’à ce qu’il me dise au revoir, parce que j’ai le sentiment profond que c’est le chemin que nous sommes en train d’emprunter, sauf que je ne peux pas m’empêcher de commenter. « Un peu spéciale ? C’est vrai que t’es le mieux placé pour juger ! » Je suis simplement trop fière pour le laisser dire ça sans répliquer, c’est aussi bête que ça. Et puis, il n’est pas en reste côté spécialité, on est d’accord, non ? Ce mec, il a un grave problème, bon d’accord, j’en possède peut-être un, mais le sien, c’est pire, j’en suis certaine. « On doit faire comme si on ne s'était jamais rencontrés ou … ? Enfin c'est quoi le délire ? » Je soupire, longuement, fortement, en me tirant un peu les cheveux, j’en sais rien, il n’a donc pas compris que je ne sais pas grand-chose sur notre sujet ? Et encore moins sur lui. J’ai envie de le connaitre, apprendre par cœur ses expressions, deviner ses mots avant qu’il ne les prononce, ça me dérange de l’avouer même si je ne le fais que dans ma tête … Et comme je suis une peste, comme je ne voudrai ne penser qu’à moi et non à lui, je me fais insupportable en paroles, pour son bien, et surtout, ouais, surtout pour le mien. « Y a pas de délire, on n'est pas amis toi et moi. » aucun délire c’est vrai, bien au contraire, je nous en évite des prochains. « On a réussi à vivre sans l’autre avant cette journée au parc, on va bien y arriver maintenant, non ? » J’aurai du mal, peut-être, au début, je ne sais pas, mais je ferai avec pour moi.

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C'est là que je t'aimerai toujours,
c'est là que je t'attendrai.

Notre discussion semble prendre une tournure plus glissante tout à coup, comme si l'on devait payer d'une manière ou d'une autre la proximité qu'on a vécu ensemble. Je ne suis pas un expert en femmes mais le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elles ont toujours tendance à vouloir tout compliquer. Peut-être que je la cherche un peu, mais je me suis connu plus chiatique que ça quand même. « Pardon, je remplace spéciale par torturée. C'est pas comme si tu te laissais vivre tranquillement quoi. » A ma connaissance en tout cas, et surtout lors de nos dernières entrevues. Pourtant, c'est une fille plus simple, du genre à ne pas aimer se poser de questions que j'avais rencontrée au parc, enfin je crois. Je ne suis plus sûr de rien la concernant et ça me déséquilibre un peu, je dois l'avouer. Quoi qu'il en soit j'utilise de mon sarcasme pour diriger un plus cette discussion vers la dispute, sans que je ne me contrôle vraiment ; j'en ai juste envie. Mais pourquoi ? Pourquoi est-ce que tout ça m'agace ? Ce qu'elle a dit, ces choses que l'on ne se dit pas. Il y a clairement un hic dans cette affaire et je n'aime pas ça. Spontanément je lui demande comment je dois me comporter avec elle dorénavant, puisque je ne suis qu'un idiot qui ne comprend décidément rien aux maux féminins. Après quelques secondes de silence étouffé, elle me sort que nous ne sommes pas amis, qu'on devrait réussir à faire comme si jamais nous ne nous étions rencontrés. Concrètement, oui ça devrait être possible... mais c'est pas un peu débile ? Non franchement, et après elle me dit qu'il n'y a pas de délire ? Sauf que son plan il est foutu d'avance, on s'est rencontrés, on a couché, on a vécu des trucs ensemble et c'est comme ça, on n'refait pas le destin. « OK... » Que voulez-vous que je lui dise ? Cette discussion ne mènera à rien d'autre qu'à ça, une conclusion triste à mourir. « Faisons ça, ça a l'air super simple. Par contre évite d'aller courir au parc aux mêmes horaires que moi, c'est-à-dire le soir vers sept heures, parce que si je te croise, je ne saurai pas faire semblant. » Et d'ailleurs je n'en vois toujours pas l'intérêt.

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Je serais juste l'attrape-cœurs et tout. D'accord, c'est dingue, mais c'est vraiment ce que je voudrais être. Seulement ça. Salinger