Dans ce pub aux allures peu accueillantes, Adélaïde prenait place au bar avec son acolyte. Elle ne disait rien de plus à sa réflexion, se contentant d'un regard tendre et d'un sourire qui parlait pour elle. Il jugeait pas... ou peut-être un peu... il était irrécupérable ce type. Mais c'était comme ça entre eux et elle mentirait bien mal de dire qu'elle n'aimait pas ça, ces petites taquineries qu'ils se lançaient de temps en temps. Enfin bref. Plus le temps passait, plus elle se disait que les paroles d'Aaron qui dataient de quelques minutes étaient vraies: elle ressemblait vraiment à un pauvre chien mouillé. Ses cheveux très raides lui collaient au visage, sa robe mouillée était moins volante qu'elle ne devrait l'être, alourdie par l'eau. Elle la collait un peu et bon dieu ce que c'était gênant... et ridicule par la même occasion. A vrai dire, elle se fichait bien de son apparence mais elle n'était pas à l'aise, n'aimant absolument pas porter des vêtements mouillés trouvant la sensation procurée désagréable, elle souhaitait silencieusement que la chaleur du bar aiderait à la sécher un peu plus vite. Elle voulait d'ailleurs accélérer le processus en séchant un peu plus ses cheveux avec une serviette en papier mais quelle idée avait-elle eu! Une mauvaise idée, une terrible idée pour ses pauvres cheveux qui venaient d'absorber la couleur rouge de la serviette. Elle n'en croyait clairement pas ses yeux, elle ne voulait pas y croire et pourtant les faits étaient là et le rire d'Aaron aussi. « Je sais bien mais pas sur les cheveux, j'ai juste l'air ridicule là. » Oh que oui, elle avait clairement compris qu'il parlait des sous-vêtements qu'il avait découvert sur elle pendant leur semaine new-yorkaise. Elle aurait pu en rire, en sourire, mais c'est une moue boudeuse sur le visage qu'elle arborait, les yeux rivés sur ses cheveux. « Pfff, je suis plus à ça près, je verrais plus tard ce que je peux faire. » Voir plus tard si c'était lavable ou non ou si elle allait devoir se rendre chez le coiffure pour une teinture.
Remerciant la serveuse d'un sourire poli, elle entourait immédiatement ses mains autour de la tasse de chocolat tandis que le silence s'était installé après qu'ils aient trinqué. Si Aaron partait un instant dans ses pensées, l'esprit d'Adélaïde, lui, demeurait vide. Non pas qu'elle avait un pois chiche à la place du cerveau - quoi que - mais elle n'avait juste rien à penser. Son esprit était en accord avec ses décisions: profiter de la soirée en ne pensant à rien... ou juste au fait de profiter. C'est cette pensée qui la fit sourire un instant avant qu'elle ne porte le chocolat brûlant mais réconfortant à ses lèvres alors que la voix d'Aaron s'élevait de nouveau dans les airs. Un sourire en coin, elle ne pu s'empêcher d'aligner quelques mots qu'elle savait prévisibles. « Adélaïde, promis c'est définitif et c'est peut-être pour les deux que je me suis mise en vente. » Reposant sa tasse de chocolat, elle ne savait pas vraiment quoi lui répondre pour être honnête. Si elle s'était mise en vente, c'était pour retrouver la confiance en elle, en Adélaïde plus particulièrement. Se prouver qu'elle pouvait plaire, qu'elle pouvait être attirante, attiser la curiosité pour une soirée sans être cette croqueuse d'hommes impulsive et insatiable. Mais comment dire ça à un homme qui ne vous a connu qu'ainsi? Laisser paraître ses faiblesses aux yeux des personnes ce n'était pas son genre, encore moins lorsqu'elle ne connaissait pas tant que ça la dite personne. « Je voulais juste m'amuser et me changer les idées. » Si elle lui avait donné une réponse sincère, elle entrouvrait par la même occasion une porte qu'Aaron aurait juste à pousser s'il en avait envie. Se changer les idées... c'est bien ce qu'elle avait dit et qui sous-entendait qu'avant ce soir, elle n'était pas spécialement d'humeur joyeuse ou détendue. Evidemment, elle n'était pas dépressive non plus, c'était terminé ça, mais elle était coincée, comme dans un étau, par ses craintes et ses peurs qui s'étaient envolées ce soir. « Peut-être pour faire de nouvelles rencontres aussi et j'ai un peu l'impression que c'est le cas. » Et bien qu'on pouvait penser que son esprit se tournait dans le sens où Adélaïde rencontrait Aaron, c'était en réalité plus dans le sens où il semblait avoir changé depuis la dernière fois où ils s'étaient vu, comme un nouvel homme. Peut-être comprendrait-il ce qu'elle voulait dire, peut-être pas, peu importe. Elle appréciait ce qu'elle considérait être comme une nouvelle rencontre, voilà tout.
« Je reviens de suite. Ça me perturbe trop. » Riait-elle vis-à-vis de ses cheveux décolorés et il fallait dire qu'elle était persuadée que si elle ne faisait rien maintenant, ça allait être fichu. Elle se rendait donc sans attendre dans les toilettes du bar. Elle fut d'ailleurs étonnée de leur propreté par rapport au reste. Au moins, elle n'avait pas à craindre quoi que ce soit. Arrivée au lavabo, elle fit une grimace face au miroir. Merde, elle ressemblait vraiment à rien maintenant. Haussant les épaules face à son image, elle prenait un peu de savon et venait faire mousser ses cheveux, certes à regret mais c'était mieux que rien. Les dégâts d'un savon peu adapté au nettoyage serait plus vite rattrapable que ceux causés par une teinture. Fort heureusement pour Adélaïde, la roue de la chance tournait enfin en sa faveur puisque deux petits shampoings de mèche plus tard, ses cheveux retrouvaient leur couleur d'origine. Amen! Soulagée, elle en profitait même pour se rendre aux toilettes tout court, quitte à être là hein. Quelques instants plus tard, sa petite affaire terminée, elle envisageait de sortir de la cabine... mais ça c'était sans compter sur le loquet, coincé. Chance vous avez dit? « Non mais c'est pas sérieux là, c'est quoi cette poisse bordel?! » Et plus elle s'énervait contre le loquet, moins il voulait s'ouvrir. Enfoiré! « AARON! HE CAMPBELL! » S'il ne l'entendait pas, tant pis, elle se doutait qu'il viendrait si elle mettait trop de temps à revenir. Oui, elle l'appelait à l'aide et oui cela ferait une honte de plus mais elle n'était plus à ça près, pas vrai? Elle qui comptait en plus profiter du sèche-main pour se sécher un peu, c'était peut-être fichu aussi.
she feels safe in |