Dans un coin, un strip-tease. Chez nous. Un strip tease dans notre maison. Je devrais m'indigner... Dans un autre, les relents de la dispute, comme les cercles dans l'eau, qui s'étendent...
Et sa main dans la mienne, qui m'entraine vers la piste. Les battements sourds des basses, qui font vibrer, doucement, le sol et ma peau. Mon corps qui se plie au rythme. Je ne sais pourquoi ils passent un si vieux morceau... Mais je ferme les yeux, je me laisse tournoyer. L'alcool tourbillonne dans mes veines, dans ma tête, l'envie de rire aussi, l'envie d'être bien, de me détendre.
« Je suis de ceux qui pense que les pulsions, c’est ça, c’est ça qui nous fait nous sentir vivant … »
Ses mots résonnent encore en mon esprit. Pulsion. Pulsions. Pulsions. Vivants. Vivants. Vivants. Obéir à ses pulsions et devenir vivant...
Des mondes différents. Sans doute, oui... Mais les déguisement, qu'est-ce, sinondes ponts, des échelles, des cordes lancées entre les mondes? Pour, un instant, les faire se joindre?
Je danse toujours sur les cordes... des cordes tendues au dessus des falaises de mensonges. Je suis une spécialiste. Laisse nos mondes se rejoindre. L'alcool sera une excuse... Laisse nos mondes...
Je tourne, tourne, tournoie.
Je tangue, tangue, tangue, me noie...
Je suis tes mains, je suis tes pas.
Je danse, je ris, je me bats.
Je ne songe pas, je ne me bats pas.
Ne me débats même pas...
Je le laisse m'attirer à lui. C'est naturel. Mon coeur qui s'était emballé manque un battement, fait silence. Il me semble que je devrais m'éloigner... Je n'en ai pas vraiment envie. Juste besoin de profiter. Le laisser me faire oublier... un instant... une heure... ma solitude.
Je hoche la tête, la gorge nouée. Ne pas réflé...
Mes mains se posent dans son dos. Mes doigts se crispent. C'est peu de chose. Si peu de choses. Des lèvres sur ma peau. La peau de mon cou. Mon cou sensible. Si sensible. Tout mon corps qui frémit, ma peau qui se hérisse. Peu de choses...
Quelque part, quelqu'un crie « Open bar ». J'entends vaguement.
Je suis ailleurs. Toute dans ce coin de peau qui s'est éveillé brusquement. Toute dans mes doigts crispés sur le dos. Toute dans la réalisation affreuse qui m'écarquille les yeux.
Pourquoi maintenant? Je ne sais pas. Tout se met en place. Il... Elle me touche. Elle m'embrasse la peau. Furtive. Je SAIS qui elle est. Le puzzle s'est assemblé. Je sais qui elle est et un incendie s'allume dans mes veines. Quel est le but de son jeu? Me ridiculiser? Se moquer? En public, peut-être...
Je titube, me retiens à son dos.
J'ai failli me laisser prendre à son petit jeu. J'ai la gorge nouée, l'envie de hurler, de gifler, de faire une scène. L'envie de...
Je ne peux pas, pas en public, pas là... elle gagnerait...
C'est terrible, avoir si froid, si chaud en même temps. Etre si déçue, si enragée, si excitée... Oh... Oh... je vais lui faire payer... Il me faut juste le temps de trouver comment. Gagner du temps...
« Si là, je ne réfléchissais pas... je te demanderais de recommencer... plus fort... plus longtemps... plus... plus plein de choses... »
Elle va payer. Elle va regretter d'avoir voulu me ridiculiser... Sont-ils plusieurs à savourer le spectacle? Je ferme les yeux. Ma voix avait une fêlure, je crois. Je serre les doigts sur le coton épais de son costume.
« Plus fort... si je ne réfléchissais pas. Mais il y a trop de monde pour ça. »
Commencer par m'éloigner du public avide...
« Empêche-moi de réfléchir...»
Je me suis penchée avec un rire, avec une supplique, avec un peu plus d'alcool dans les yeux et la voix que je n'en ai réellement...
Profiteras-tu, Riley?
J'ai chuchoté à ton oreille et mes doigts se son attardés sur tes reins, à travers ton déguisement.
Je te hais. Je te hais... Si tu savais...
Plus que jamais, je te hais.