Lorsque Snow me dit qu'il n'aurait jamais raté mon anniversaire, je le regarde du coin de l'oeil, haussant des épaules, avant de marmonner entre mes dents : Si c'était pour venir ainsi accompagné, le déplacement n'était vraiment pas nécessaire. Je suis, en réalité, furieuse contre lui et sa tête d'idiot. Je me demande bien ce qu'il a dans le crâne pour pouvoir oser ne serait-ce même envisager la possibilité de ramener cette garce ici et je dois avouer que je suis plus qu'émerveillée devant le fait accompli. S'il pense que je pourrai un jour le pardonner d'avoir invité si vil serpent dans mon jardin d'Eden, il se met un doigt dans l'oeil. À mes yeux, Thea C. Stonehevean n'est pas à sa place, ici, ce soir. Elle devrait donc retourner rôtir en enfer, voir si j'y suis ; cela lui irait tellement mieux au teint, en plus ... L'arrivée de Snow, pendu comme un imbécile au bras de Thea, semble avoir été l'évènement ayant mis toute la machine en marche. Voilà maintenant que Knox était venu se joindre à la fête, accompagnant son arrivée d'un léger noeud ancré au fond de mon estomac. Lorsque les deux tourtereaux (ou plutôt, corbeaux sataniques) étaient réunis, ce n'était jamais bon signe et, en l'occurrence, leur présence inattendue et, surtout, non-souhaitée à mon anniversaire me surprend et m'effraie également. Note à moi même ? Bannir leur entrée l'an prochain si je me décide à refaire une fête d'anniversaire. Ce dernier m'offre alors un verre, me garantissant qu'il n'y a pas mis de poison. Si sa joute doit très certainement l'amuser, elle ne m'induit pas en confiance, bien au contraire. C'est donc tout poliment que je décline sa proposition par un simple :
- Non merci, ça ira. Déterminée à en dire le moins pour ne pas laisser leur présence me gâcher ma grande soirée. Un quart de siècle. Ce n'est pas tous les jours que l'on peut fêter pareil évènement et je ne compte laisser rien ni personne me le gâcher. Je crois entendre Snow toucher deux mots à Knox mais déjà, je ne prête plus attention à eux, distraite par l'arrivée d'Émilie et d'un garçon que je ne connaissais jusqu'alors pas encore, visiblement l'un de ses nouveaux amis. Me mordant la lèvre, je me demande si cette soirée pourrait s'empirer davantage ou si elle avait atteint son seuil maximal dans la jauge "déceptions", étant donné que chaque instant ajoutait en moi une sensation de malaise et de malheur. J'ai l'impression de ne pas exister, presque. De faire office de décoration dans cette salle au mobilier sublime, perdue dans une masse de personnes que je ne connais finalement pas et attirant uniquement à moi les personnes cherchant à me faire mal comme personne d'autre ne sait le faire. Souriant poliment à mon ancienne meilleure amie et à son compagnon, je me retrouve surprise lorsque celui-ci ramasse ma main afin d'y déposer un tendre baiser. Lorsque le contact entre ses lèvres et ma main est terminé, je la rapproche de mon coeur par réflexe, le regardant, curieusement, le temps qu'il finisse de parler. Ses mots me réjouissent quelque peu et voilà que mon sourire s'agrandit.
- Je vous en prie, ce n'est rien. Je suis comblée de voir que vous passez un bon moment, en tous les cas et je vous remercie pour vos voeux qui me touchent profondément. Je suis presque émue face à tant de politesse de la part d'un inconnu total, étant donné qu'une grande partie des autres personnes présentes n'a même pas eu la présence d'esprit de venir me dire bonsoir. Il me présente alors Émilie et reprenant mon sourire diplomatique, je lui fais savoir qu'elle n'est pas inconnue à mes yeux, bien au contraire. Il me semble que nous avons déjà eu l'occasion de nous rencontrer par le passé, oui. Observant mon ancienne amie comme si notre dernière dispute datait d'hier, je remarque que son sourire est aussi crispé que le mien et cela me gêne davantage. Visiblement, elle semble aussi enchantée de me voir que moi, elle ... Et je me demande brièvement comment nous nous y étions prises pour en venir à cela, nous qui, autrefois, étions si proches et si chaleureuses l'une envers l'autre. Elle tente alors de lancer une conversation après avoir arrêté le premier serveur passant sur son chemin et, ne souhaitant pas lui paraitre froide ou distante, je tente de lui répondre du mieux que je le peux.
- En effet ... Trop longtemps, même. Je lui fais alors comprendre que notre amitié me manque plus qu'elle semble le penser, étant donné que nous n'avions jamais repris contact depuis ce jour où je lui avais demandé de partir pour ne plus jamais revenir. J'étais jeune, j'étais amoureuse, j'étais bête ... Et elle l'avait également été, étant donné qu'elle m'avait laissé continuer sur mes délires sans me reprendre en main et me dire que j'allais trop loin. Elle aurait pu revenir me voir, après la rupture ... Elle aurait pu tenter de me retrouver, comme j'aurais aimé le faire sans jamais réellement l'oser ... Mais ce sont des histoires passées, maintenant, donc autant les laisser là où elles sont. Sa remarque concernant les gens étranges me pousse instinctivement à me retourner lentement afin d'observer rapidement ce qu'il se passe du côté de Thea, Snow & Knox. Satisfaite lorsque je vois que personne n'est en train de s'étrangler - pour le moment - je me retourne à nouveau vers Émilie afin de rire, légèrement. N'est-ce pas ? Je suis contente, en tous les cas, que tu sois venue. Cela compte beaucoup, à mes yeux ... Si seulement elle savait à quel point. Émilie se présente alors à Thea et c'est à ce moment là que Snow profite du fait que je sois seule pour en rajouter une couche comme seul lui sait si bien le faire. Si lui aussi doit me faire le baise-main ? Et puis quoi encore ? Lui envoyant un léger sourire taquin, je me contente de lui répondre que : Étant donné que je ne sais pas où sont passées ces lèvres, je pense que ça ira pour cette fois, merci. Je me sens cependant plus à l'aise, maintenant qu'il a laissé Thea dans son coin pour me regarder, moi. Je me demande s'il me trouve belle, ce soir. Je me demande ce qu'il pense de mes cheveux blonds qui ondulent légèrement, cascadant le long de mon cou grâce au brushing que je me suis fait faire ce matin. Je me demande s'il trouve que ma robe me va bien ou s'il a envie de m'aider à ... Puis, j'arrête de réfléchir, me rendant compte que je commence à m'emballer, et je me permets de lui répondre, d'un ton plus sérieux, cette fois-ci :
- Tu n'aurais pas pu me trouver mieux, comme cadeau ? Mon regard se pose alors sur Thea avec désinvolture. Je sais qu'il comprendra que je parle d'elle. Je suis cependant curieuse de connaitre les raisons ayant motivé son choix. Le connaissant, elles devaient être bien bonnes ... Et, étrangement, je suis prête à les accepter. Probablement parce qu'elles viennent de lui, certes ... Mais bref. J'attends donc sa réponse ... Et pendant cet instant là, plus rien n'existe. Plus personne n'existe. Il n'y a que lui et moi et nos yeux qui se dévorent bien trop et de façon bien trop flagrante pour notre propre bien. Pendant cet instant là, je me sens liée à lui comme cette fois où il m'avait embrassé, à la soirée déguisée, et je me souviens du fait qu'il me plait et des raisons cachées derrière cela. Le sait-il ? J'en suis persuadée. Mais jouons. Nous verrons bien ou cela pourra bien nous mener.
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